Davantage de marge de manoeuvre pour le gouvernement qui table, dans le cadre du projet de Loi de Finances 2015, sur un cours de pétrole de 103 dollars le baril. La facture énergétique s'allège, de même que les dépenses liées à la compensation. De quoi permettre, in fine, de réduire le déficit budgétaire l'année prochaine. La chute du baril de pétrole est suivie avec un grand intérêt au Maroc, particulièrement par le gouvernement actuel. L'évolution du cours de l'or noir reste en effet l'un des éléments centraux qui est pris en compte dans l'élaboration des différents projets de Loi de Finance, surtout pour un pays comme le Maroc qui est énergétiquement très dépendant de l'extérieur. Le projet de Loi de Finances 2015 table ainsi sur un cours de pétrole de 103 dollars le baril, après 105 dollars le baril en 2014. En supposant que le pétrole devrait subir une hausse modérée autour de 10% au cours du prochain exercice, le baril se situerait donc aux alentours de 70 dollars. De quoi, véritablement, ravir le gouvernement marocain, qui va disposer d'une marge de manoeuvre on ne peut plus importante. Quand on sait, comme l'avait précisé il y a quelques mois le ministre du Budget, Driss Azami Al-Idrissi, qu'au-delà de 65 dollars le baril de pétrole brut, chaque Dollar de hausse coûte environ 700 millions de dirhams au budget de l'Etat, on mesure bien toute l'importance de la fluctuation des cours de l'or sur l'économie nationale. En cela, les dernières données macroéconomiques disponibles tendent à le prouver. Selon la Direction des études et des prévisions financières (DEPF), le déficit commercial s'est allégé, en glissement annuel, de 5,1% ou de 7,6 milliards de dirhams à fin septembre 2014, pour s'établir à 143,5 milliards de dirhams. Cette amélioration est due à la hausse de la valeur des exportations, conjuguée à la quasi-stagnation des importations. Ces dernières ont bénéficié du repli de la facture énergétique de 3,1% pour atteindre 73,9 milliards de dirhams, après la première baisse de 2,1% enregistrée à fin août. «Cette évolution a découlé du repli des importations des produits énergétiques au cours du deuxième trimestre 2014, et qui s'est accentué au cours du troisième trimestre 2014, contrebalançant les hausses enregistrées au cours du premier trimestre 2014», note la DEPF. Ainsi, les importations d'huile brute de pétrole et de «gas-oils et fuel-oils» ont reculé, en glissement annuel, respectivement de 9,1% et 4,6% pour atteindre 22,8 et 27 milliards de dirhams à fin septembre 2014. La baisse des cours à l'importation des produits pétroliers, la mise en place du système d'indexation partielle des prix, la décompensation de l'essence et du fuel N°2, ainsi que les révisions progressives à la baisse des subventions unitaires du gasoil décidées en janvier 2014, se sont logiquement traduites par une atténuation des subventions accordées au titre de ces produits. De fait, les charges de compensation ont reculé de 19,7% pour s'établir à 24 milliards de dirhams, soit un taux de réalisation de 68,6%. Au regard de la tendance actuelle, et sauf à utiliser ce matelas financier potentiel pour apaiser les tensions sociales nourries par les syndicats et l'opposition, le gouvernement marocain pourrait voir s'alléger considérablement le déficit budgétaire. A ce titre, est-il utile de rappeler que la charge de compensation est passée de 54,9 milliards de dirhams en 2012 à 41,6 milliards de dirhams en 2013, soit une réduction de 13,3 milliards de dirhams. Et cet effort budgétaire de l'ordre de 1,9 point du PIB a expliqué en grande partie la réduction du déficit budgétaire en 2013. Aussi, selon le ministère de l'Economie et des Finances, «pour certains pays importateurs de pétrole de la région MENA comme le Maroc et la Tunisie, les déficits du compte courant devraient diminuer graduellement en 2014 et 2015, suite à la baisse de la facture pétrolière et alimentaire et au redressement progressif des entrées de capitaux extérieurs, des recettes touristiques et des transferts des travailleurs migrants». Un peu plus de pouvoir d'achat Au-delà de son impact positif sur les agrégats macroéconomiques, certains secteurs comme l'aérien devraient tirer grandement profit du décrochage du cours du brut. D'autres, beaucoup moins. C'est le cas notamment du raffineur national, chahuté par la fluctuation des cours de l'or noir, et qui a été contraint d'émettre un profit warning sur les résultats 2014. «Dans le contexte actuel de baisse persistante des cours du pétrole brut et des produits raffinés, et malgré une progression notable de 15% des ventes locales hors fuel industriel et l'amélioration des marges de raffinage, la Samir anticipe des résultats négatifs à la fin de l'exercice 2014», explique le raffineur dans un communiqué. Le plongeon des cours pétroliers impactera négativement la valorisation des stocks à la clôture de l'exercice, d'autant que la Samir «a l'obligation de détenir un stock stratégique de pétrole brut de 4 millions de barils, en plus du stock outil représentant environ 15 jours de ventes». Et pour faire face à cette situation et minimiser l'impact sur ses résultats, le raffineur a pris un certain nombre de mesures déclinées, entre autres, en la réduction du niveau des stocks, la maîtrise des risques de change et la mise en place d'instruments de couverture contre les fluctuations des cours des matières premières. Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Pour dire que les grands gagnants de cette baisse des prix, sur fond de rivalités entre les USA et les pays de l'OPEP, seront les consommateurs qui vont gagner en pouvoir d'achat, avec, entre autres, la réduction des prix à la pompe. Au Maroc, depuis le 16 décembre, tous les prix des produits pétroliers ont reculé. Ainsi, le gasoil a cédé 70 centimes le litre pour passer à 8,99 dhs/litre, alors que le prix de l'essence super a perdu 92 centimes le litre à 10,86 dhs/litre. Pour leur part, les prix du fuel n°2 et du fuel n°2 ONE ont connu des baisses respectives de 571,20 dhs/tonne à 4.030,73 dhs/tonne et de 571,18 dhs/tonne à 3.829,19 dhs/tonne. De son côté, le prix du fuel spécial s'est replié de 459,21 dirhams la tonne pour se fixer à 4.526,41 dirhams la tonne.