La microfinance a réalisé depuis la dernière décennie un important saut qualitatif. Au demeurant, le fait que l'activité des associations de microcrédit soit essentiellement confinée au financement des activités génératrices de revenus constituerait une limite. D'où la pertinence de revoir le dispositif juridique qui confère aux établissements de microcrédit le statut d'association. La transformation de leur statut pour le faire converger vers la société de financement et la banque de microcrédit serait plus bénéfique pour le renforcement des fonds propres, l'élargissement de la clientèle, etc. Pouvoirs publics et autorités de régulation financière prennent de plus en plus conscience de l'intérêt de promouvoir l'essor de la microfinance au Maroc. Pour cause, celle-ci a comme principales vertus la réduction de la pauvreté et l'enrayement de l'exclusion sociale. Parmi les efforts déployés au plan national, il y a lieu de citer la création d'un fonds de financement du microcrédit en 2007. Cela dit, le récent séminaire international organisé à Rabat par la Direction du trésor et des finances extérieures (DTFE), en partenariat avec la Banque mondiale, portant sur la régulation et la supervision de la microfinance au Maroc, a remis en selle le débat sur les défis du secteur du microcrédit et l'impératif d'élargir son champ d'activités essentiellement confiné au financement d'activités génératrices de revenus (AGR). En effet, la nécessité de faire évoluer le cadre législatif et institutionnel du secteur avait amplement dominé les débats. Les lacunes inhérentes au statut associatif Force est d'admettre que les établissements de microfinance contribuent un tant soit peu au renforcement de l'inclusion financière au Maroc. Ce qui est d'autant important que près de 47% des ménages marocains n'utilisent pas de services bancaires. Plus alarmant encore, seuls 10% de la population du monde rural possèdent un compte bancaire. L'effet de levier social de la microfinance au Maroc est quelque part démontré par une étude de la Banque mondiale. A en croire Teymour Abdel Aziz, spécialiste en Finances et Marchés à l'institution de Bretton Woods, il est avéré que dans le segment des plus pauvres, l'utilisation du microcrédit est plus élevée que celle des crédits bancaires. Celui-ci reste par ailleurs convaincu que la microfinance est complémentaire à l'activité bancaire, ce qui balaie les velléités de concurrence entre les deux secteurs. Cela dit, même si la microfinance a connu une réelle croissance et une profonde modernisation (gestion des risques) au Maroc, le statut d'association constitue à certains égards une limite pour le développement de l'activité des établissements de microcrédit. En effet, les associations de microcrédit ne peuvent ni collecter l'épargne, ni effectuer des transferts pour leur compte. Ces activités sont du ressort des établissements bancaires. A cela s'ajoute qu'en raison de leur statut associatif, elles n'ont guère la latitude de lever des capitaux sur les marchés financiers. «Le véritable enjeu se situe au niveau de l'élargissement des services proposés par les associations de microcrédit (financement des TPE, des logements sociaux, etc.», clame Teymour Abdel Aziz. L'intérêt du séminaire international tient aussi au fait qu'il a mis en relief la pertinence de la transformation du statut des associations de microcrédit en le faisant converger vers les sociétés de financement et les banques de microfinance. L'avantage est que les établissements de financement offrent une multitude de services (crédit-bail, crédits à la consommation, services de paiement, etc.), contrairement aux associations de microcrédit. Pour leur part, les banques de microfinance peuvent aisément avoir accès au marché de financement et à la Banque centrale, tout en jouissant de bien d'autres opportunités. Outre, ces avantages avérés qu'offrent ces deux catégories d'établissements financiers, les associations de microcrédit sont aujourd'hui confrontées à des défis de taille au Maroc. Principaux challenges De l'avis des experts de la Banque mondiale qui s'emploient à appuyer le développement de la microfinance au Maroc, les établissements de microcrédit marocains font face à la difficulté de renforcer leurs fonds propres. Ce qui est en partie dû à leur accès limité aux marchés de capitaux. Et pourtant, les banques leur accordent des prêts en fonction de la consistance de leurs fonds propres. L'autre défi qui se pose aux associations de microcrédit au Maroc, est la nécessité d'élargir leur clientèle encore réduite à cause de leur offre de services restreinte et de leurs activités limitées. En dépit de ces contraintes, il est important de noter que 67% des clients du secteur de la microfinance sont satisfaits des services qui leur sont proposés, contre 42% des clients du secteur bancaire. L'autre information non moins importante révélée lors du séminaire international, est que le secteur de la microfinance présente des risques minimes pour le système bancaire national. La raison à cela tient aux faibles volumes de crédit traités. A cela, il faudrait ajouter que le coût de la supervision du secteur de la microfinance pour Bank Al-Maghrib, demeure faible en comparaison à celui du secteur bancaire. Selon Teymour Abdel Aziz, les associations de microcrédit pourraient davantage contribuer à l'inclusion financière au Maroc, si le dispositif législatif les autorise à élargir leurs services et leurs offres.