La multitude des intervenants et la lenteur des procédures compliquent la réalisation des documents d'urbanisme. Le plan d'aménagement ne doit pas être une loi imposable à tout le monde, mais plutôt un document d'orientation. Ces documents donnent de la visibilité aux investisseurs et limitent la spéculation sur les ter-rains urbains. La réalisation des documents d'urba-nisme est la princi-pale contrainte qui perturbe le développement des grandes villes. C'est un constat que partagent les pro-moteurs et autres profession-nels du secteur. Il est clair que la croissance démographique nécessite la réalisation de zones pour le logement, les activités, pour les loisirs, les équipements et aussi les espaces verts. Malgré le lancement de nou-velles assiettes foncières, leur accompagnement sur le plan administratif pour leur viabi-lisation et leur homologation pose différents problèmes. «Le retard dans la réalisa-tion des plans d'aménage-ment a un impact terrible sur l'investissement. Ce sont des documents qui sont réalisés sur la base de concertations avec tous les acteurs concer-nés. Sur le plan local, chacun doit donner son point de vue et ses recommandations. Le document doit être soumis par la suite au Secrétariat général du gouvernement pour une autre lecture. C'est pour cela qu'il y a plusieurs étapes, différents interve-nants et par conséquent les délais deviennent longs. Leur durée d'approbation est en moyenne de deux ans», sou-ligne Driss Effina, expert en immobilier. En effet, il y a plusieurs inter-venants dans ce domaine notamment les départements ministériels ou leurs repré-sentants locaux, l'Habitat et l'Urbanisme, l'Intérieur, la Direction des domaines, la Protection civile, l'Eau et l'En-vironnement, les communes, l'ONEE, les régies de distribu-tion de l'eau et de l'électricité, les Eaux et forêts, les sociétés de télécoms... Chaque intervenant peut blo-quer ces documents d'urba-nisme soit par son absence, par ses réserves ou par son rejet. Il est donc question que le projet reçoit l'aval de tous les membres de la commis-sion. C'est ce qui explique le retard pris en matière de pro-duction de ces lois urbaines. «Le domaine de l'urbanisme ne relève pas uniquement de la responsabilité du départe-ment de l'Habitat ou de l'Inté-rieur. Ce sont les commis-sions locales qui regroupent plusieurs administrations et d'autres acteurs publics ou privés pouvant atteindre une cinquantaine qui arrêtent ces documents d'urbanisme», explique Effina. Il y a eu beaucoup d'espoir et d'attente concernant le Schéma directeur d'aména-gement urbain (SDAU) pour bouleverser la physionomie des villes marocaines et leur permettre d'activer leur dyna-misme. Mais sa réalisation est conditionnée par la création des infrastructures néces-saires et le changement de la réglementation. Au niveau du foncier, sous la pression urbanistique les grandes villes comme Casablanca et Rabat ne dis-posent pas d'assez de marge de manoeuvre pour offrir davantage d'assiettes fon-cières, leur extension vers les périphéries est inévitable. «Le plan d'aménagement ne doit pas être une loi impo-sable à tout le monde elle doit être un document d'orienta-tion. Les autorités se sont inspirées du modèle français sans prendre en considération les spécificités marocaines. Une fois établi, le taux de réalisation des plans d'amé-nagement ne dépasse guère les 15%. Car personne n'a les moyens pour le mettre en oeuvre. Le secteur privé et la communauté seront pénalisés du fait que tout retard ne donne pas assez de visibi-lité aux investisseurs. Cela incite les propriétaires terriens à spéculer et faire flamber l'immobilier», ajoute Effina. Depuis les événements de 1981, l'Agence urbaine de Casablanca reste sous la tutelle de l'Intérieur alors que les autres agences dépendent du département de l'Habitat. Il était question de faire un cadrage sécuritaire de la ville même sur le plan de l'urba-nisme. «La dérogation qui devrait être une exception en matière des autorisations est devenue la règle», constate Effina. A Casablanca, sur 34 plans d'aménagement en projet 26 sont actuelle-ment opposables aux tiers. Le rythme des réalisations a été certes accéléré ces deux dernières années mais les années de retard ont perturbé le climat des affaires. Plusieurs grands projets sont inscrits dans le cadre du renouvellement urbain de la ville. Casablanca est une grande métropole qui connaît un essor démographique et économique notoire. Elle ambitionne de se doter d'infrastructures modernes capables de répondre aux besoins de sa population. Pour qu'elle devienne attrac-tive et agréable d'y vivre, elle doit être productive et durable. Pour réduire la pres-sion sur le foncier et offrir davantage de terres pour la construction de logements, de nouvelles zones ont intégré le périmètre urbain comme Nouaceur ou Zenata. 5000 ha sont dédiés aux nouveaux pôles d'activités. L'héritage du système français Les documents d'urbanisme est un système hérité du modèle français. Ils ont un intérêt en tant qu'outils de planification stratégique permettant de maîtriser et d'anticiper le développement des territoires et la promotion des investissements. Le développement durable est devenu incontournable dans leur élaboration. Pour ce faire, les projets insistent sur une utilisation économe et équilibrée des espaces naturels, urbains, périurbains et ruraux, la maîtrise des besoins de dépla-cement et de la circulation automobile, la préservation de l'environnement dans tous ses états. Il est aussi question d'assurer la sauvegarde des ensembles urbains remarquables et du patrimoine bâti, la prévention des risques naturels prévisibles, des risques technologiques, des pollutions et des nuisances de toute nature.