Les membres de la filière des fabricants de tubes et de profilés en acier du Maroc dénoncent les mesures de sauvegarde anti-dumping mises en place par le gouvernement. L'Afatube demande le remboursement de 90 millions de DH consignés en douane sur la base de 10 et 12 DH/Kg. Depuis novembre 2013, et durant 6 mois, les droits anti-dumping sont calculés sur la base du prix d'alerte et non sur la valeur d'achat. Indignés par les conséquences des mesures transitoires mises en place par le ministère de l'Industrie, du Commerce et des Nouvelles technologies, les membres de l'Association des fabricants de tubes et de profilés en acier (Afatube) sont montés au créneau pour dénoncer leur situation dramatique. «La situation financière des trésoreries de nos entreprises est critique à cause des mesures de consignation prises depuis début 2013 ainsi que des mesures de sauvegarde instaurées depuis novembre de la même année», affirme Abdelkader Boumah, président de l'Association lors d'un point presse organisé dernièrement à Casablanca. Les membres de la filière demandent le remboursement de près de 90 millions de DH qui ont été consignés en douane sur la base de 10 et 12 DH/Kg relatif au tarif de référence fixé à 7.000 DH/tonne. Rappelons que cette taxe, levée en novembre 2013, a été instaurée en février 2013 juste après l'initiation de l'enquête anti-dumping ouverte par l'Etat en réponse à la réclamation de Maghreb Steel, seul fabricant national du produit. Ce dernier avait tiré la sonnette d'alarme pour dénoncer la concurrence déloyale des importations massives de la tôle laminée à chaud. Les premiers résultats de l'enquête avaient révélé qu'effectivement il y avait dumping, ce qui a donné lieu à la mise en place de mesures de sauvegarde en novembre dernier pour une durée de 6 mois. De ce constat, les producteurs de tubes et profilés sont soumis à une double taxation: le prix d'alerte qui demeure majoré par rapport au prix d'achat et les droits anti-dumping qui sont calculés sur la base de ce prix d'alerte et non sur la valeur d'achat. La circulaire N°5415/211 de l'Administration des douanes et impôts indirects (ADII) fixe les droits anti-dumping provisoires à appliquer par exportateur aux importations de tôles d'acier laminées à chaud originaires de l'Union européenne et de la Turquie. Ladite circulaire stipule que les importations en provenance de deux exportateurs turcs, à savoir Erdemir et Colakoglu ne sont pas soumises aux droits anti-dumping, mais si leur marchandise transite par un trader, elle est taxée selon les droits lui afférents, à savoir 29,12% ou 22,11%. En d'autres termes, ce n'est pas l'origine de la marchandise qui est taxée, mais plutôt l'origine du fournisseur final. «Nous faisons appel à des traders car il nous est impossible d'importer directement des fournisseurs turcs pour deux raisons. D'une part, ces derniers exigent une avance à la commande, ce qui n'est pas à notre portée par manque de liquidités. D'autre part, le tonnage doit être important alors que nos commandes sont de petites quantités par rapport au volume exigé», précise le président d'Afatube. Un choix pénalisant qui se greffe à d'autres freins auxquels fait face le secteur, à savoir une conjoncture internationale morose, une baisse des ventes, un assèchement des liquidités ainsi que le durcissement d'octroi des crédits bancaires. Cette nouvelle taxe ne sera pas sans conséquence sur le prix de revient du produit fini, mettant ainsi en péril la compétitivité de ces entreprises et du tissu industriel national. Autre point de discorde, la suspension de l'accord du ministère de l'Agriculture et de la Pêche maritime sur les dossiers en instance concernant des fabricants ayant déjà importé et livré les agriculteurs. Toujours selon les membres de la filière, les conséquences de la situation actuelle pourraient être lourdes sachant que l'activité réalise un chiffre d'affaires de 3,2 Mds de DH, emploie plus de 2.100 personnes et a investi 900 MDH, dont 650 MDH par crédit bancaire. Mais l'avenir pourrait être plus difficile pour Maghreb Steel qui, rappelons-le, a réalisé l'un des plus gros investissements privés du Maroc, avec 5,7 Mds de DH financés par 6 banques marocaines. Ces mesures poussent-elles à s'approvisionner localement et par conséquent à booster la production nationale ? Cherche-t-on à sauver Maghreb Steel au détriment des autres entreprises ? En tous cas, l'aboutissement de l'enquête, prévue durant le premier semestre 2014, devra mettre un terme à cette polémique et permettre certainement aux opérateurs de voir le bout du tunnel.