Hassan Sentissi, Président de l'Association marocaine des exportateurs (ASMEX), nous livre les vecteurs phares pour la promotion des exportations nationales. Il suggère aussi des pistes novatrices, à l'instar du créneau de la filière halal qui concerne plus de 1,5 milliard de consommateurs. Finances News Hebdo : Dans un contexte macroéconomique particulièrement ardu marqué par un déficit de la balance commerciale de près de 200 Mds de DH en 2012, selon vous, quelle est l'importance de la promotion des exportations nationales et leurs implications? Hassan Sentissi: Le déficit de la balance commerciale est de plus en plus pesant sous la pression de la conjoncture internationale et la structure de l'économie nationale, mais des efforts sont déployés pour apporter des solutions concrètes notamment à travers le soutien et le développement des exportations. Aujourd'hui, la balance commerciale est soutenue par un flux de plus en plus important de services, mouvement qu'il faut absolument soutenir. Il est essentiel d'agir sur le déficit commercial à deux niveaux : à travers la rationalisation des importations et l'encouragement du «consommer national» mais aussi par la promotion systématique des exportations. A ce titre, il est important d'agir en matière de promotion et de développement de l'offre exportable et d'harmonisation de la gouvernance dans les divers plans sectoriels. F. N. H. : En tant qu'entité oeuvrant pour la promotion des exportations marocaines, de quels moyens disposez-vous pour assurer cette mission ? Et quelle est l'ampleur de cette tâche ? H. S. : La tâche est immense et l'enjeu majeur. Heureusement qu'il y a une prise de conscience généralisée, reste à constituer le puzzle et à agir de manière harmonieuse. La dernière lettre royale adressée aux diplomates la semaine dernière, donne l'exemple. Elle signifie à tous, ministères, gouvernement, diplomates et opérateurs économiques, de faire l'effort nécessaire pour professionnaliser l'action internationale du Maroc. A l'Asmex, nous avons été heureux de constater que la lettre royale nous conforte dans notre démarche. Les grands chapitres des orientations royales sont intégrés dans notre plan d'action, puisque ce dernier désigne comme priorités l'organisation des exportateurs, leur formation, la professionnalisation de leur démarche promotionnelle et l'action en profondeur sur la compétitivité et le développement de l'offre exportable. Il faut, par ailleurs, accélérer le processus pour résoudre les problèmes de la logistique. A ce titre, l'Asmex continue à œuvrer avec ses partenaires publics et privés pour la mise en place de solutions concrètes, telles que la ligne maritime qui va être ouverte incessamment sur le Maghreb et la ligne qui fonctionne déjà sur l'Afrique Subsaharienne. Les chantiers sont ouverts, les actions priorisées et la collaboration «public-privé» est renforcée. Il faut donc accélérer la cadence. F. N. H. : Quels sont les secteurs au Maroc qui nécessitent un véritable coup de pouce en ce qui concerne les exportations? Et comment les rendre performants sur les marchés internationaux ? H. S. : Le Maroc a déjà une stratégie avec neuf secteurs prioritaires. Ils sont connus et bénéficient de plans sectoriels clairement établis. Il faudrait juste, comme souligné précédemment, faire en sorte que le rythme de l'action soit accéléré et que la gouvernance globale et verticale soit efficiente. Aussi faudrait-il faire en sorte que les entreprises puissent améliorer leur compétitivité et leur mode opératoire à l'international. Nous ne nous lasserons jamais de dire que «l'équipe Maroc de l'international» doit être constituée sur des bases professionnelles. En revanche, il y a un créneau très intéressant sur lequel l'Asmex est en train de travailler pour encadrer, accompagner et former les exportateurs pour en faire un produit phare, c'est la filière Halal. Il s'agit d'un marché de 1,5 milliard de consommateurs et le produit marocain a toutes les chances de percer sur ce marché. F. N. H. : Enfin, quels sont les marchés sur lesquels la promotion des exportations doit s'intensifier? Et quels sont les véritables enjeux de cela? H. S. : Au risque de vous surprendre, je citerai en premier lieu l'Europe. Ce marché est et restera notre premier partenaire commercial. Il faudrait que l'on puisse continuer nos efforts pour le développer et ouvrir de nouvelles niches car nous n'avons, en réalité, qu'une infime partie de ce marché. D'autant que sur plusieurs pays, nous ne travaillons pas directement, ce sont des intermédiaires qui portent le produit et les services marocains. N'oublions pas que l'Europe de l'Est est une zone qui recèle un potentiel important. J'en citerai pour preuve, la Russie où des montants faramineux de capitaux cherchent aujourd'hui refuge. Il faut bien sûr s'assurer qu'ils s'accompagnent de technologie et de savoir-faire. En outre, nos efforts sont également concentrés sur le développement du Moyen-Orient, du Maghreb et de l'Afrique en général qu'elle soit lusophone ou anglophone, notamment sur les marchés peu connus par le Maroc tels que la Tanzanie par exemple. Ce sont des marchés spécifiques qui nécessitent une approche particulière. Ce sont des marchés d'avenir, et cela est incontestable. Par ailleurs, l'accord de libre-échange qui nous lie à l'Amérique présente un grand potentiel, mais notre offre doit être mieux organisée. Il faudra qu'on trouve les partenariats utiles sur ce marché. Pour ce qui est de l'Asie, il y a beaucoup à faire. Avec l'Inde il y a un marché qui se développe déjà grâce aux phosphates et dérivés. Ce marché commence à s'ouvrir sur de nouveaux produits et services. Malheureusement nous ne pouvons pas en dire autant pour la Chine. Nous sommes face à un véritable scandale de la balance commerciale. La Chine exporte vers le Maroc une trentaine de milliards de dirhams par an et en contrepartie, elle n'achète presque rien, sans parler de la qualité des produits chinois qui arrivent sur notre marché.