Contrairement à l'automobile ou la santé, l'assurance habitat est peu développée au Maroc. Les causes sont multiples. Il y a un manque de promotion de la part des assureurs et aussi la lenteur et la complexité de la procédure d'indemnisation qui reste un facteur dissuasif pour les clients. Malgré ses potentialités, l'habitat reste peu couvert par l'assurance contrairement à d'autres secteurs comme la santé ou l'automobile qui représente plus de 30% de parts de marché, en raison du caractère obligatoire de la responsabilité civile. La RC ne dépasse pas la part de 1,83% dans les autres secteurs. Dans l'habitat, elle reste insignifiante. Alors que la multirisque habitation en France touche 95% des foyers. En effet, au Maroc, l'assurance logement touche essentiellement les biens acquis par crédit, car l'organisme de financement exige une garantie de risque. Par segment, elle est très concentrée dans le haut standing et peu présente dans le moyen standing ou l'économique. La prime moyenne est également faible. Elle est située essentiellement dans la fourchette de 500 à 1000 DH selon la valeur du bien immobilier. «La culture de l'assurance n'est pas encore ancrée au Maroc. A part des domaines où elle est obligatoire ou inévitable, elle est peu demandée. Ce qui est regrettable, c'est que même les professionnels s'intéressent très peu à ce sujet par manque d'information ou par ignorance. Il faut noter que les entreprises commencent à avoir des couvertures à tous les niveaux, notamment pour leur personnel, les locaux ou les outils de production. Alors que chez les particuliers, l'assurance est toujours considérée comme un sujet facultatif et des dépenses inutiles. Pour l'habitat, la plupart des clients optent pour la couverture contre l'incendie, alors qu'il y a d'autres risques aussi importants comme le vol, les dégâts des eaux, ou les accidents du personnel domestique», souligne un assureur à Casablanca. Plus de communication Parmi les recommandations du contrat-programme, figurent notamment la promotion et le développement de l'assurance habitat. Les compagnies sont appelées à faire un effort dans ce sens et lancer des campagnes de communication à l'instar de ce qui se fait dans l'assurance maladie ou l'automobile. Pour certains spécialistes de l'assurance, il y a également des limites au niveau de l'arsenal juridique dédié à ce créneau, ce qui diminue la capacité de l'offre des assureurs. Autre point relevé par les professionnels du secteur : il n'y a pas assez d'assiduité ou de fidélité chez les assurés. Il n'y a qu'une minorité qui renouvelle systématiquement le contrat ,surtout chez les personnes ayant déjà subi un sinistre. «La procédure d'indemnisation est très capricieuse et nécessite beaucoup d'effort et des agréments insurmontables», explique Rita, une MRE qui raconte son expérience. «Ma maison a été ravagée par un incendie. Les forces de police ont fait leur PV, l'origine du sinistre étant due à un court-circuit électrique. J'ai informé mon assureur qui a dépêché un expert qui m'a signifié de ne pas toucher à la maison et la laisser en l'état en cas de besoin d'une nouvelle expertise. Cette période a pris près d'un mois. J'ai dû retarder mon retour en France pour arranger la situation. Dans ma déclaration, j'ai évalué les dégâts subis à 150.000 DH; l'assureur m'a proposé un montant forfaitaire de 18.000 DH arguant la règle de la proportionnalité, sinon j'ai la possibilité de demander des indemnités via une action en justice. Cela devrait prendre beaucoup de temps et mobiliser des frais supplémentaires», a-t-elle raconté. Il est clair que l'assurance habitat reste au Maroc dans la logique de la vente du produit. Quand le client signe son contrat, l'assureur ne prend pas le soin de lui expliquer les clauses, ses droits et ses obligations. Du fait que c'est un langage spécifique, seuls les connaisseurs et les spécialistes peuvent en comprendre le contenu. Les assurés se trouvent en cas de sinistre coincés par ces clauses et cela augmente le discrédit pour ce genre d'offres. C. Jaidani Faut-il adapter l'offre-produit à la réalité marocaine ? La «multirisques habitation» couvre plusieurs risques, cette police présente l'avantage tant pour le particulier que pour l'assureur de contenir plusieurs garanties couvertes dans le cadre d'un seul contrat. Ce qui signifie moins de «documents» pour les deux parties. Dans cet ensemble de garanties, chaque compagnie impose un minimum de deux, trois, voire plusieurs risques. Les garanties de base sont généralement l'incendie, le vol, les dégâts des eaux, ou autre. La responsabilité civile garantit le chef de famille, son conjoint ainsi que tous les enfants mineurs vivant sous le toit de leurs parents pour tous les dommages causés aux tiers. La garantie défense et recours est également comprise. Les extensions possibles sont à la demande des clients comme l'accident de travail pour les employés de maison, les bijoux et biens précieux au-delà de certaines valeurs, ou encore l'assurance individuelle mondiale proposée. Malgré les avantages de cette offre, elle n'arrive pas à séduire. Elle nécessite un effort de promotion de la part des compagnies. Il faut également adapter le produit avec la réalité marocaine pour assurer sa pénétration, puisqu'il est calqué sur le système français où il y a un autre système socioéconomique et un pouvoir d'achat plus élevé. Il est question aussi de lancer des produits basiques à des coûts contenus pour encourager cette assurance. Les compagnies sont invitées à simplifier la procédure d'indemnisation à l'instar de ce qui se fait en automobile lorsque la valeur du dédommagement ne dépasse pas un certain seuil.