◆ Pleinement exposé à la crise de la Covid19 et à ses conséquences économiques, le secteur bancaire continue d'avoir la faveur des analystes. ◆ Certaines banques, cotées à leurs niveaux de cours actuels, sont même considérées comme des opportunités d'investissement.
Par A. Hlimi
Montée attendue des impayés , baisse substantielle des activités de marché et des revenus des filiales spécialisées, le secteur bancaire est en première ligne face aux risques que l'épidémie de la Covid-19 fait peser sur l'économie. Pourtant, les stratégistes considèrent certains dossiers du secteur comme défensifs, essentiellement grâce à des matelas de provisions confortables qui permettent de faire face à des chocs comme celui que nous traversons. C'est le cas des stratégistes de BMCE Capital Research (BKR), qui intervenaient vendredi dans un séminaire en ligne organisé par la Bourse de Casablanca et l'Association professionnelle des sociétés de Bourse (APSB) concernant la stratégie à adopter sur le marché actions. L'équipe BKR y est revenue sur son portefeuille de résilience diffusé récemment auprès de sa clientèle. Une occasion de répondre à certaines interrogations comme le choix de renforcer les financières dans ce portefeuille, et particulièrement les valeurs bancaires. «Les valeurs bancaires de notre portefeuille disposent d'un matelas de provisions important qui permet de faire face à la crise immédiate», explique Ghita Benider, responsable Bourse chez BKR. L'analyste estime que ce même stock de provisions permettra de piloter par la suite le retour rapide à une capacité bénéficiaire normative, car «qui dit provisions dit gisement de reprises», résume-t-elle.
Trio de valeurs bancaires Attijariwafa bank, BCP et CDM font partie du portefeuille de résilience de BKR et sont considérées comme défensives. La première affiche un matelas de provisions très confortable, intégrant une provision pour risques généraux de 2,3 Mds de DH en social et des provisions pour risques et charges de 2,8 Mds de DH en consolidé, devant lui permettre de faire face à la crise. De plus, elle affiche un taux du coût du risque de 0,51% en 2019, largement inférieur à la moyenne du secteur coté (0,79%), lui offrant une marge de manœuvre importante. Sur le plan commercial, le contexte de marché est actuellement favorable à Attijariwafa bank : son engagement et savoir-faire avérés en termes de financements des TPME lui permettront d'être une banque dynamique en cette phase où le secteur doit financer la relance en adressant une offre importante à ce tissu d'entreprises. Le Groupe BCP est, lui, un champion de la prudence. Son important stock de provisions que les analystes lui ont d'ailleurs reproché par le passé, devient un avantage en cette période. La banque au cheval dispose d'un bouclier anticrise de plus de 8 Mds de dirhams. Il est composé d'une provision pour risques généraux de 4,7 Mds de dirhams en 2019 (dont l'affectation est libre à hauteur de 50%) et un fonds de soutien (la BCP est la seule banque à disposer d'un mécanisme pareil) de 3,4 Mds de dirhams. Le ratio de solvabilité du Groupe, très confortable, se situant autour de 13,3% à fin 2019, lui permet de poursuivre sa distribution de crédits. CDM affiche, pour sa part, un taux du coût du risque de 0,75% en 2019, inférieur à la moyenne du secteur coté (0,79%), lui offrant une marge de manœuvre importante dans un contexte devant être marqué par la dégradation de la qualité du portefeuille des banques. De plus, la banque a des niveaux de ratios réglementaires très confortables, avec un ratio de solvabilité de 14,97%, un LCR de 167% et un ratio core tier 1 de 11,87% à fin mars 2020 sans lissage des impacts IFRS 9, dénotant de sa capacité importante à faire face à ses engagements futurs via les fonds propres. Ghita Benider alerte toutefois sur l'exposition internationale de ATW et BCP en raison de la pandémie. Mais l'inverse est également signalé pour CDM, dont l'activité est limitée au marché marocain. De manière générale, BKR estime que le secteur bancaire devrait connaître une dynamique commerciale positive malgré la crise. En témoigne un encours de crédits bancaires en hausse de 6,7% à fin avril 2020 en glissement annuel. Ceci s'explique notamment par la dynamique attendue des crédits de fonctionnement dans le cadre du produit Damane Oxygène garanti à hauteur de 95% par la Caisse centrale de garantie (17.600 entreprises bénéficiaires pour un montant de 9,5 Mds de DH à date) et des deux nouveaux produits de garantie lancés par l'Etat, à savoir «Relance TPE» et «Damane Realnce». Le discours de Bank Al-Maghrib, qui a rassuré dès le début de la crise sur son soutien inconditionnel au financement de l'économie, et qui s'est traduit par le renforcement de la capacité de refinancement des banques, rassure à son tour les analystes. BKR annonce un cours cible de 444 DH pour ATW, 250 pour BCP et 611 DH pour CDM. ◆