Les projets d'investissement pour un montant dépassant 300 millions de dollars dans le secteur du textile réjouissent les pouvoirs publics. Les opérateurs voient dans cette décision lun des premiers fruits de l'accord de libre-échange avec les États-Unis. Lindustrie marocaine du textile-habillement continue dêtre au cur des débats. Aujourd'hui, et à lencontre de la conjoncture internationale actuelle, les pouvoirs publics marocains reprennent de lespoir. En effet, au moment où lon parlait de délocalisation du Maroc vers d'autres pays plus attractifs, cest linverse qui est en train de se produire : une délocalisation vers le Maroc de certains groupes de renommée internationale. Le Royaume vient de conclure trois des plus importants projets en amont de la filière avec trois groupes internationaux. Il s'agit de l'Espagnol Tavex, de l'Italien Legler et de l'Américain Fruit Of the Loom. Les raisons invoquées tiennent essentiellement à la proximité dont jouit le Maroc vis-à-vis du marché européen, la stabilité politique et sociale, la politique du gouvernement, le dynamisme de l'administration et les perspectives d'accord de libre-échange avec les États-Unis. Des mesures incitatives Cette crise que traverse le secteur suite à l'abolition des quotas conjuguée à la déferlante chinoise a exhorté les pouvoirs publics, en concertation avec les professionnels du secteur, à mettre en place des mesures incitatives dans l'objectif de mieux répondre aux attentes des différents entrepreneurs aussi bien nationaux qu'étrangers. Ces mesures consistent essentiellement en des participations au coût d'investissement à hauteur de 20% répartis entre le foncier, les bâtiments, les équipements et l'infrastructure hors site à travers le Fonds Hassan II et le Fonds de promotion de l'investissement. Par ailleurs, il est important de noter que le secteur du textile se taille la part du lion dans les fonds accordés par le Fonds Hassan II. Il sagit de 60 projets sur un total de 108, soit un montant de plus dun milliard de dirhams pour la création de 16.000 emplois. Pour le groupe américain, Redal a mis en place des tarifs préférentiels, soit 6,50 DH/m3. «Sans la mise en place d'un tel régime, ce projet n'aurait pas pu voir le jour», affirme Hassan Berboussi, directeur général de la Direction des Investissements Extérieurs. L'extension de leurs investissements au Maroc témoigne de leur confiance envers le Royaume. La déferlante chinoise ne les inquiète pas outre-mesure parce qu'ils considèrent qu'ils se positionnement sur un créneau différencié de celui des Chinois. Qualité et séries courtes assureraient l'avenir du textile marocain. 300 millions de dollars dinvestissement Pris globalement, les trois projets totalisent un montant d'investissement dépassant les 300 millions de dollars avec la création d'environ 2.500 emplois directs. Les deux premiers projets se spécialiseront dans la production du tissu denim, matière première du jeans et feront du Maroc un des principaux sites mondiaux de production de jeans. L'Américain Fruit Of The Loom consacrera sa production de tissus à la confection de tee-shirts, sweat-shirts et joggings et contribuera à renforcer les atouts de notre pays en tant que plate-forme d'exportation vers l'Europe et les États-Unis. Filiale du groupe espagnol Tavex, Settavex a été créée en 1990. Avec un investissement initial de 500 MDH, cette unité totalement intégrée a démarré sa production en mars 1991. Installée sur une superficie totale de 19 ha, avec 35.000 m2 couverts, Settavex était spécialisée dans la fabrication de denim, avec une production annuelle de 12 millions de mètres linéaires et un effectif de 250 personnes. En 1998, le groupe a décidé de réaliser un nouvel investissement de diversification d'un montant de 350 MDH, en installant une unité de teinture et de finissage permettant la fabrication du tissu drill, gabardine, tissu professionnel et militaire, velours, tissu élastique et denim surteint. Hautement technologique, et entièrement automatisée, cette usine a une capacité de 9 millions de mètres linéaires par an. Ce nouvel investissement intégré à la première unité du denim, sur une superficie de 15.000 m2, emploie une centaine de personnes. La moitié des ventes de Settavex est transformée au Maroc et est exportée vers l'Europe et l'Afrique. Selon Badr Kanouni, directeur général de Settavex Maroc, «Settavex adopte le système japonais et fonctionne en mini-compagnie». Chacune des mini-compagnies a sa propre stratégie et ses propres objectifs. Le but de ce système est d'être autonome tout en étant à l'écoute du client. A l'instar de Settavex, le groupe italien Legler produit le denim, la toile et le velours. Le projet du groupe Legler consiste en la mise en place d'un complexe industriel intégré composé d'une unité de tissage d'une capacité de 24 millions de mètres par an et d'une unité de filature d'une capacité de 9.000 tonnes par an. Le montant de l'investissement est de 750 MDH et le nombre de postes est de 800 emplois directs. Le groupe américain Fruit of the Loom investira 162 millions de dollars. Une part de cet investissement consiste en la délocalisation d'un segment de la production de la Chine vers le Maroc pour la mise en place d'une unité de filature, de tissage et de teinture à Skhirat, ainsi que l'extension de son activité de confection existante à Bouknadel. Les emplois qui seront créés seront au nombre de 1.150. Les opérateurs marocains du secteur du textile sont aujourd'hui unanimes pour dire que les cartes dont ils disposent sont la flexibilité, l'adaptabilité et la réactivité. Ils ont la certitude que la situation qui prévaut actuellement ne va pas durer. L'État chinois ne pourra continuer à accorder des subventions aux entreprises. Le plus important est de tirer des enseignements : la Chine n'est pas une fatalité pour le Maroc. Le cas de Fruit of the Loom qui a adopté le chemin inverse en délocalisant de la Chine vers le Royaume est la preuve tangible que le Maroc est capable de jouer à jeu égal.