Amina Lotfi, présidente de l'Association Démocratique des Femmes du Maroc (ADFM) Grâce au combat et à la ténacité des ONG féministes et celles des droits humains, le Maroc a enregistré ces dernières années des avancées notables en matière de droits des femmes. Ces avancées se sont traduites par la révision des lois discriminatoires envers les femmes, par le lancement de mesures institutionnelles pour promouvoir l'égalité entre les sexes et l'autonomisation des femmes. On peut citer la réforme du code de la famille en 2004, qui a instauré le principe de l'égalité des époux en droits et devoirs, la création des sections de justice de la famille, l'institution d'un juge chargé des mariages et de la reconnaissance du ministère public comme partie prenante dans la mise en œuvre de ce code; la réforme du code pénal qui criminalise les violences conjugales, le harcèlement sexuel; la réforme partielle du code de la nationalité qui permet à la femme marocaine mariée à un étranger de transmettre sa nationalité à ses enfants; la réforme du code du travail qui a intégré le principe de non discrimination dans le travail (embauche, salaires, etc); la possibilité pour les femmes de participer, au même titre que les hommes, à toutes les activités syndicales, d'exercer un commerce sans l'autorisation maritale… etc. Par ailleurs, le principe de l'équité et de l'égalité entre les sexes a commencé à être intégré dans les politiques publiques. On peut citer à ce titre l'adoption, en mars 2011, de l'agenda de l'égalité qui est le plan d'opérationnalisation de stratégie nationale pour l'Egalité et l'Equité entre les sexes par l'intégration de la dimension genre dans l'ensemble des politiques publiques sectorielles; le processus de «gendérisation» du budget de l'Etat entamé par le ministère des Finances dans le cadre du processus de réforme des dépenses publiques, et la publication depuis 2006 de «Rapports genre» accompagnant la Loi de Finances… etc. La principale avancée reste toutefois la Constitution dont les nouvelles dispositions illustrent un pas qualitatif important dans la consolidation des acquis et la concrétisation de l'égalité effective entre les hommes et les femmes et la lutte contre toutes les formes de discriminations fondées sur le genre. Toutefois, malgré les nombreux acquis, il reste encore beaucoup à faire pour promouvoir et protéger les droits des femmes. En effet, beaucoup de femmes sont toujours analphabètes, la mortalité maternelle reste très élevée et nous classe parmi les pays les moins développés de la planète ; les femmes sont toujours victimes de violences de toute sorte aussi bien dans l'espace privé que dans l'espace public et les dernières statistiques du HCP sont alarmantes. On continue toujours à autoriser le mariage des petites filles, la participation politique des femmes reste très faible et leur accès aux potes de décisions très limité, les lois sont mal appliquées etc…Aussi, le gouvernement doit s'atteler sans plus tarder à mettre en œuvre les dispositions constitutionnelles et accélérer la mise en place de mécanismes clairs garantissant le respect des droits individuels et la jouissance par les femmes marocaines de tous leurs droits, afin de concrétiser, d'une manière effective, la pleine citoyenneté et l'égalité de tous les citoyens et citoyennes dans un Maroc démocratique et de progrès. Les femmes marocaines sont présentes dans tous les secteurs d'activité et leur contribution à l'essor du Maroc est indéniable. Toutefois, les femmes sont confrontées à plusieurs obstacles qui freinent leur pleine participation au développement de notre pays. En effet, le Maroc connaît une régression de l'activité féminine principalement parmi les femmes diplômées qui sont de plus en plus exposées au chômage. Le secteur agricole n'est pas à la laisse, puisque le travail féminin dans le secteur agricole n'est pas reconnu et les femmes représentent la main-d'œuvre la plus sous-payée. Dans la majorité des cas l'activité et les tâches confiées à ces femmes sont les plus pénibles et les femmes restent soumises à des statuts précaires dans un secteur informel qui ne leur offre aucune protection. Par ailleurs, de larges catégories de femmes sont de plus en plus lésées en matière de couverture sociale, que ce soit dans le monde rural, parmi les ouvrières saisonnières ou chez le personnel domestique, etc. Cette fragilisation dont les femmes sont les premières victimes, accentue de plus en plus leur exclusion sociale. D'un autre côté, les femmes connaissent de grandes difficultés à accéder aux postes de responsabilité : la persistance pesante de l'ordre patriarcal, la pauvreté de plus en plus féminine, la faiblesse de scolarisation des filles (particulièrement dans le monde rural), la perception de plus en plus conservatrice de l'émancipation féminine, et l'absence de culture et de valeurs de l'égalité confortant le pouvoir de décision des hommes. Enfin, les femmes marocaines demeurent victimes d'un manque de mesures institutionnelles pour leur permettre de concilier entre leur vie privée et leur vie professionnelle.