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Lahlimi (HCP) : «Beaucoup de crispations autour de notre institution»
Publié dans Finances news le 31 - 07 - 2017

La statistique qui permet de mesurer ce qui existe, tout en facilitant le suivi et l'évaluation, constitue une donnée fondamentale pour les politiques de développement. Ahmed Lahlimi Alami, haut-commissaire au Plan, revient sur les prérequis conditionnant l'élaboration de données fiables.


Finances News Hebdo : Comment les données statistiques peuvent-elles contribuer au développement d'un pays comme le Maroc ?

Ahmed Lahlimi Alami : De façon générale, la statistique est indispensable pour la simple raison que pour opérer un changement quelconque ou mettre en place un projet, il est nécessaire d'avoir une idée précise de ce qui existe. Or, cette réalité ne peut être mesurée que par la statistique.
Il ne peut y avoir de progrès sans mesure. Les données facilitent de surcroît le suivi et l'évaluation des projets afin de les mener à bien. A cela, faudrait-il ajouter que les statistiques permettent de mieux prévoir l'avenir par le biais de la détention de données les plus exhaustives possibles.
Il est utile de rappeler que les modèles mathématiques à même de faciliter cela sont tout à fait disponibles. Généralement, les auteurs des modèles de prévisions économiques font partie des scientifiques les plus généreux. Leurs recherches sont mises à la disposition du public au bout de quelques années.
Au demeurant, la difficulté réside souvent au niveau de la formation des cadres opérant dans le domaine de la statistique. La formation à elle seule ne suffit pas, car ceux-ci doivent être bien payés et motivés par des conditions de vie et professionnelles favorables. Le cas échéant, bien évidemment, ils iront ailleurs, car le marché national et international est de plus en plus ouvert.
Au-delà cet aspect crucial, la statistique doit s'insérer dans un cadre institutionnel qui reconnait sa valeur et qui accepte de se mettre à sa disposition.
En d'autres termes, l'autorité en charge de la statistique ne doit pas avoir des difficultés pour disposer de données qu'elle estime utiles afin de mener à bien sa mission. Cela suppose un système de gestion qui érige la transparence, la compétence et l'humilité en principes cardinaux.
Il ne faut pas fournir les données telles que nous savons le faire, mais telles que la statistique et la comptabilité nationale le suggèrent. Le respect du rôle de la statistique, l'impératif de son indépendance et la mise en place d'une comptabilité nationale qui se base sur les normes internationales, sont tout aussi nécessaires pour la gestion économique crédible d'un pays.

F.N.H. : Les données statistiques sont éparpillées entre les différentes institutions du pays. Selon vous, comment optimiser la gestion afin de produire des données de qualité ?

A. L. H. : A mon sens, il faut un rapprochement institutionnel permanent entre les détenteurs d'informations et les entités en charge de la production de statistiques.
L'exemple de la collaboration existante entre le haut-commissariat au Plan et le
Fonds monétaire international (FMI) est édifiant. Nous fournissons au FMI des indicateurs à des échéances précises, selon des normes spécifiques. Aujourd'hui, ce genre de partenariat est plus que nécessaire à l'échelle nationale, car il permettrait une meilleure fluidité dans la production de données fiables, au grand bénéfice du peuple et des décideurs.

F.N.H. : La statistique et les prévisions économique, sociale, environnementale ont-elles la place qu'elles méritent au Maroc ?

A. L. H. : C'est uniquement grâce à la volonté royale que la statistique a sa relative indépendance vis-à-vis du gouvernement au Maroc, et ce non sans difficultés parfois. Nous tenons le coup grâce à ce fort dessein royal.
Il existe beaucoup de crispations autour de notre institution et de ses prévisions. On nous reproche de dire ou de ne pas évoquer telle chose. Il arrive même que certains cherchent à interpréter ce que l'institution aurait dû dire. Les attaques infondées à mon encontre ou celles portées contre l'institution que je dirige, ne m'atteignent pas, car j'assume de façon honnête mes responsabilités, tout en restant fidèle à mes engagements.

F.N.H. : Vous avez évoqué un Plan Marshall pour le développement de la statistique en Afrique. En quoi consiste-t-il ?

A. L. H. : Aujourd'hui, il existe beaucoup de fonds internationaux destinés à plusieurs causes. A mon sens, aider les pays africains à réaliser les Objectifs de développement durable (ODD) à l'horizon 2030 et ses différents programmes de développement suppose en partie la disponibilité de statistiques fiables à l'échelle continentale.
D'où l'intérêt de ma proposition, d'autant plus que la statistique africaine a beaucoup de défis à relever au regard des transformations majeures qui s'opèrent à travers le monde.■


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