■ La modernisation du système financier passe nécessairement par la création d'un marché à terme. ■ Il pourrait attirer davantage d'investisseurs étrangers et contribuerait fortement à l'augmentation de la liquidité. La création d'un marché à terme au Maroc tarde à venir. Il est déjà positionné sur les bons rails, mais la locomotive n'avance toujours pas. Les différents évènements survenus dans les pays étrangers et qui ont affecté le marché financier marocain, du moins psychologiquement, empêchent le lancement de ce marché. La modernisation du système financier marocain devrait passer nécessairement par la création des produits dérivés sous-jacents aux titres de capital, de créances, devises, matières premières… Comportant certainement moult avantages relatifs à la dynamisation du marché financier, les instruments à terme pourraient satisfaire les besoins des investisseurs institutionnels, des entreprises et aussi des particuliers. Avides de variété en termes d'options d'investissements et de diversification des risques, ces derniers auraient le libre choix de leurs placements financiers. Un marché à terme nécessite la réalisation de transactions satisfaisantes et donc d'une liquidité correcte du marché boursier dans son ensemble. Un trader produits dérivés de la place ne partage pas le même avis. Selon lui, «le manque de liquidité est, certes, une grande contrainte pour la commercialisation de ces produits. Ceci dit, un investisseur voulant acheter une valeur pourrait ne pas trouver de vendeur en face qui a la même quantité à la vente. En s'adressant à une entité qui vend des options, cet investisseur pourra avoir la même exposition tout en évitant cette contrainte de liquidité, car la banque ne va pas devoir trouver un vendeur sur 100% de la quantité demandée, mais sur un pourcentage réduit de cette quantité dépendant des caractéristiques du produit dérivé. Cela contourne donc le problème de liquidité». Une autre condition est également nécessaire à la mise en place du marché à terme : la taille du marché boursier conjuguée au nombre de sociétés cotées. Le marché boursier, marocain est encore faible en matière de capitalisation. Se situant en moyenne à 530 Mds de DH, celle-ci ne correspond qu'à 75 sociétés cotées, ce qui est loin d'être suffisant pour mettre en place un marché à terme. S'opposant à cela, notre source argumente : «Cela permettra d'enrichir la panoplie de types de produits qu'on peut traiter sur la place marocaine et constituera une bonne alternative pour les investisseurs qui ne sont pas intéressés par un échange physique d'argent contre action; ils achètent le «future» par exemple et le vendent avant la maturité». Sur le volet de la couverture contre les fluctuations des cours, notre source assure que «le marché à terme constituera un bon mécanisme pour les besoins de couverture des sociétés de gestion notamment». Il est incontestable que «ce marché pourrait attirer davantage d'investisseurs étrangers et contribuerait fortement à l'augmentation de la liquidité»… Encore faut-il qu'il y ait cette culture boursière, que la spéculation laisse place à l'investissement boursier en bonne et due forme et que le contexte soit évidemment plus favorable ! Difficultés Etant prévu en 2006 dans le cadre du projet «Future 2006», le marché à terme sera difficilement mis en place parce qu'il requiert un certain nombre de préalables d'ordre organisationnel, juridique et conjoncturel. En effet, la vente à découvert n'est pas encore autorisée au Maroc. «Seules les stratégies produits dérivés à la hausse sont commercialisées. Il y a donc absence d'intérêt de la part des investisseurs pendant les phases baissières du marché», explique notre trader. Aussi, l'absence de véritables market makers (autres que BMCE Capital) est un véritable frein au développement de ce marché. D'un ordre plus conjoncturel, la baisse continue du marché action, conjuguée à la frilosité des investisseurs à l'égard d'un investissement dans ce marché, ne favorise pas ce genre de produits. Les contraintes étant mises à nu, notre professionnel trouve imminent de fournir un effort de vulgarisation de ce type de produits. Il propose aux autorités de tutelle de montrer une réelle volonté quant à la création dudit marché en «assouplissant et fluidifiant la réglementation en vigueur d'une part, et en impliquant et formant tous les intervenants de marchés, d'autre part». Il s'agit également d'organiser des séminaires et des campagnes de communication et de mettre en action les moyens nécessaires afin non seulement d'attirer les investisseurs à placer leur épargne en Bourse et augmenter ainsi la liquidité, mais aussi d'encourager les sociétés à s'introduire en Bourse. Il existe, certes, un intérêt de la part des sociétés de gestion et des assurances notamment, mais il reste timide. Ceci dit, «le marché marocain est à très grand potentiel. Les institutions financières doivent impérativement commencer à se positionner dessus», conclut notre source d'une manière optimiste. ■