L'analyse de la dernière décennie met en exergue la faible corrélation entre la progression des crédits et celle du PIB non agricole. Cette faible relation résulte en grande partie de la nature des crédits distribués. A terme, on pourrait assister à un revirement de tendance, et ce grâce aux flux additionnels que pourraient générer les différents programmes initiés (Plans Emergence, Vert, Azur…). Nombreux sont ceux qui considèrent qu'une forte corrélation existe entre le rythme de la croissance économique et celui des crédits à l'économie. Comme deux vases communicants, l'augmentation des crédits se veut la contrepartie du financement des différentes composantes sectorielles du PIB et donc, par ricochet, d'une création de richesse. Pour le cas de l'économie marocaine, cette corrélation n'est pas toujours vérifiée. Les analystes d'Attijari Intermédiation se sont penchés sur l'analyse de la relation existant entre le financement de l'économie et la croissance du PIB non agricole au cours de la dernière décennie. Sur la période de 2001 à 2005, la croissance moyenne des crédits à l'économie a été de 6% pour une croissance non agricole moyenne de 4%. Sur les trois années qui suivirent (2006-2008), la croissance moyenne des crédits a été multipliée par quatre pour atteindre plus de 24%. Au même moment, celle du PIB non agricole n'a progressé que de 1,4 point, soit une moyenne de 5,4%. La barre des 7% annoncée par quelques organismes de prévisions semble irréalisable. Et pour cause, la croissance économique non agricole donnait l'impression d'atteindre ses limites. Le plafond a été de 6,5 % en 2007 et il faut revenir à 1990 pour retrouver un niveau similaire (6,4%). D'aucuns considèrent que cette situation résulte essentiellement de la catégorie de crédits qui furent accordés durant cette période au financement de l'économie. Ou plus précisément au fait que les crédits accordés contribuent de manière très peu efficace à la croissance globale. Les analystes d'Attijari Intermédiation réfutent cette hypothèse et la considèrent comme peu crédible. D'après eux, le système bancaire national a atteint un niveau de maturité qui est considéré comme étant l'un des plus élevés de la région MENA. C'est d'ailleurs grâce à cette maturité que le rythme de progression des crédits a pu atteindre des niveaux, voire des volumes conséquents. L'implication des banques dans le processus de croissance économique est devenue effective. Sur la période allant de 2005 à 2009, la croissance annuelle moyenne des crédits à l'économie a été de 18,2%, contre 7,9% pour celle du PIB national. Le rapport crédits sur PIB a sensiblement augmenté de 53% à 77%. Mais cela n'empêche pas de dire que la faible corrélation entre le PIB non agricole et la hausse des crédits suscite des interrogations. Quand peut-on qualifier le financement d'acte économique d'investissement ? A rappeler qu'au cours de la dernière décennie, le financement bancaire s'est davantage dirigé vers l'immobilier. D'après les analystes d'Attijari Intermédiation, d'un point de vue macroéconomique, l'achat d'un logement est catégorisé en tant qu'investissement. Or, cet investissement a la particularité de ne pas être productif, il a plutôt une dimension sociale qui est tout aussi importante. Cela fait pratiquement une dizaine d'années que les banques ont favorisé l'investissement non productif (achats de logements) au détriment de celui productif (achat de machines et d'équipements). Aussi, lorsque l'on additionne l'encours des crédits immobiliers à ceux destinés à l'équipement, on constate une certaine corrélation avec la formation brute du capital fixe (FBCF). C'est ce qui justifie un peu le fait que la croissance non agricole soit plafonnée à 6% ou à 7%. Ainsi, en 2009 et malgré une forte décélération, la croissance des crédits est à peine revenue en dessous de sa moyenne sur dix ans, grâce notamment aux crédits à l'équipement. En 2010, la croissance des crédits a continué de décélérer, mais devrait se maintenir au-dessus du seuil de 8%. Deux points fondamentaux ont marqué l'année écoulée. Le premier est le fait qu'hormis le secteur agricole, les autres devraient connaître une croissance meilleure que celle enregistrée en 2009. Le second élément est relatif aux prévisions de la Banque centrale qui restent conformes à l'objectif de stabilité des prix. Les crédits à la consommation ont bénéficié du soutien de la demande émanant des ménages ayant affiché une reprise en 2010. L'évolution des crédits à la consommation devrait ainsi être corrélée à celle de la consommation privée, et plus particulièrement à celle des ménages. L'encours additionnel des crédits à l'économie serait au moins égal à 47 Mds de DH, soit un niveau légèrement au-dessus de celui réalisé en 2009. Il correspondrait à une progression de 8%. Dans les prochaines années, la croissance des crédits devrait s'accélérer. Aujourd'hui, plus de 20% de la population ont un âge compris entre 14 et 25 ans. Cette population représente l'essentiel de la demande additionnelle en logement dans les dix prochaines années. Aussi, les investissements sont estimés à plusieurs centaines de milliards de DH (Plan Vert, Plan Azur, Emergence industrielle…). La croissance potentielle du PIB non agricole pourra passer à un pallier supérieur, au-delà des 7%. Cet objectif de croissance doit transiter par une nouvelle reconfiguration du PIB. C'est ce qui se fait actuellement. A titre d'exemple, le plan Emergence, dont l'esprit consiste à concentrer les efforts des pouvoirs publics sur les métiers mondiaux, contribuera certainement à développer cette corrélation. A terme, la réussite de ce programme devrait permettre la création de 220.000 emplois, d'apporter 50 Mds de DH additionnels au PIB industriel et de générer 95 Mds de DH d'exportations supplémentaires.