Dès les premières phrases de cet ouvrage, la démarche originale de l'auteur évoque irrésistiblement la Divine Comédie de Dante Alighieri, ce chef d'œuvre de la littérature italienne du XIIIème siècle. En effet, Chouaïb Douib met en scène, à sa manière propre, deux âmes se rencontrant dans le jardin d'Eden, point de départ de l'intrigue. C'est ainsi que Jean Louis Morel préfaça « Balades dans l'Eden » de l'écrivain marocain Chouaïb Doub Ne cherchons pas ici un esprit cartésien mais laissons-nous plutôt emporter par le flot torrentueux des propos de notre auteur, très en verve dans cet ouvrage, et qui recherche dans les religions une issue aux problèmes humains. Pour Chouaîb Douib, comme pour André Malraux, « Le XXIème siècle sera religieux ou ne sera pas ». On ressent très fortement au fil des pages la complexité d'une âme partagée entre indignation et miséricorde, entre sainte colère et indulgence. L'auteur nous révèle ainsi, à la manière de Michel de Montaigne, un « esprit ondoyant et divers », richesse infinie de l'esprit humain au-delà des spécificités de chacun. Comme dans tout bon roman, une intrigue sentimentale se noue entre les personnages mais elle côtoie toujours le sacré. Mais, tout bien considéré, ne peut-on pas affirmer que tout véritable amour est d'essence divine ? Le lecteur pourra être surpris par la langue leste, par l'abondance des allusions aux ébats amoureux et à l'évocation des organes nécessaires à cette réjouissante activité mais c'est là le reflet de la pensée de l'auteur et il convient toujours de respecter la liberté absolue de tout créateur. Ainsi, à travers les âges et au-delà des frontières et des formes d'art, il est aisé de faire des rapprochements entre des œuvres différentes. Comment ne pas voir de similitudes entre le Plan de la Cité qui illustre ces Balades dans l'Eden et le célèbre tableau de Courbet intitulé L'origine du monde ? Puisque le sous-titre de cet ouvrage est Pensées, l'intérêt d'un tel livre est de permettre à chacun d'approfondir sa réflexion comme le fait Chouaïb Douib. L'auteur, en bon musulman, trouve dans le Coran la réponse à toutes ses interrogations. Il pense que, pour les trois religions monothéistes, chacune a complété et rectifié la précédente mais encore faudrait-il mettre à part la religion juive qui a été la première à « inventer » le Dieu unique. D'autre part, il semble naturel que chaque croyant, juif, chrétien ou musulman, juge que sa doctrine est un corpus complet qui ne nécessite aucun complément ni aucune retouche. Enfin, le lecteur simplement athée ou agnostique ne partagera évidemment pas le point de vue de l'auteur. Certains pensent, en effet, avec Karl Marx, que « La religion est l'opium du peuple » puisqu'elle contribue fortement au statu quo social en permettant aux dominés d'accepter leur triste sort contre la promesse non vérifiable d'un sort meilleur dans un autre monde dont nul n'est jamais revenu pour raconter les beautés de l'au-delà. Ceux-là pensent que toute religion permet simplement aux êtres humains, qui se savent mortels, d'accepter plus sereinement leur misère et leur fin inéluctable. Toutes les affirmations des religieux ne reposent que sur la foi qui est un domaine qui échappe à toute raison raisonnante. A en juger par ce qui se passe dans le monde d'aujourd'hui, on est en droit de se demander si l'humanité est en progrès vers plus de paix et d'amour. Prenons un seul exemple : il y a plus de deux mille ans, sur le mont des oliviers, des hommes firent avancer devant Jésusune femme et dirent : « Cette femme a été surprise en flagrant délit d'adultère. Moïse dans sa loi nous a prescrit de lapider ces femmes-là et toi, qu'en dis-tu ? » Jésus répondit : « Que celui qui est sans péché lui jette la première pierre. » A ces mots, ils se retirèrent un à un jusqu'au dernier à commencer par les plus âgés. Alors Jésus dit à la femme adultère : « Va et désormais ne pèche plus » (Saint Jean, 8,v.1-11).Ce message d'amour me parait un progrès puisqu'il a fait évoluer la loi mosaïque vers plus de compassion et d'indulgence pour les êtres imparfaits que nous sommes tous. Or, dans certains pays d'Islam comme l'Afghanistan ou le Pakistan, on lapide encore aujourd'hui les femmes adultères. Les vidéos qui en témoignent sont atroces. Est-ce un progrès ? Et pourtant, le mot Pakistan signifie, en langue ourdou, « Le pays des purs ». Ce genre de pureté peut-il paraître comme un modèle à admirer et à suivre ? Achevant sur un ton quasi-prophétique, Chouaïb Douib proclame : « Dieu ne cesse de répéter le même commandement ordonné à tous ses élus. « Sois musulman » avait-il dit à Abraham, comme à toute sa descendance. Donc, que vous soyez Hébreux, Juifs, Chrétiens, Arabes pour adorer Dieu vous êtes musulmans et devez vous conformer à ses commandements. » Il est curieux que Juifs et Chrétiens ne l'ai jamais entendu ainsi… Mais, après tout, qu'importe à notre auteur les esprits forts, les lecteurs athées qui seront de toutes façons imperméables à toute prédication comme à toute conversion, que lui importe les raisonneurs, les puritains à la pudibonderie excessive et les gens sans imagination, il en souhaite d'autres !