La nouvelle est tombée comme une massue sur les têtes. Certes, il souffrait d'une maladie incurable. Mais tous ceux qui l'avaient connu et le connaissent priaient pour lui. Priaient le bon Dieu même si son cas était désespéré. Personne ne voulait que cette légende des dirigeants sportifs disparaisse. Il était le seul dirigeant d'un club de foot- ball national des années 60 jusqu'aux années 90 resté en vie. Une véritable encyclopédie et une mémoire infaillible. Dommage qu'elle n'a pas été enregistrée. Après les Benhachem (MCO), Lyazid Chergui (DHJ), Azmi (RSS), Doumou (KAC), Mekouar (WAC), Smlali et Bouâbid (RCA), voilà qu'un autre dirigeant d'une grande valeur nous quitte. Driss Chakiri, personnalité emblématique du foot- ball et de l'omni- sport, vient de nous quitter, avec dans le cœur l'amertume élimination du DHJ de la coupe de la CAF face à Al Ahly Al Mysri. Un match qu'il avait suivi, malgré les souffrances physiques qu'i ressentait, dans son lit de malade. Sollicité par notre confrère Abou Sahl en direct dans son émission radiophonique sportive du week- end, il avait oublié sa terribles et ses douleurs intenses pour prier que le DHJ passe le cap de son adversaire. C'est dire que le DHJ, comme son ex- président des années 60 feu Lyazid Chergui, était dans ses veines. Si Driss, comme on l'appelle ici et ailleurs, est un visage de proue dans le sport Doukkali, en général, et le jdidi en particulier. Personne ne peut parler du foot- ball dans la région sans que ne lui vienne l'image de Si Driss dans la tête. Même au niveau national, il a marqué le foot- ball marocain puiqu'il a été l'un des fondateurs du GNF à l'époque du général corps de division, Housni Benslimane, qui lui voue estime et respect pour les services rendus à ce sport populaire. Hadj Driss Chakiri est un grand Dirigeant avec un grand "D". Grand par l'envie et le dévouement au Sport Doukkali. Son image restera à jamais gravée dans les mémoires des anciens footballeurs du DHJ qui eurent l'honneur de le côtoyer comme président et surtout comme ami Si Driss, comme tout le monde l'appelle à El Jadida, fut très longtemps dirigeant au DHJ comme secrétaire général du temps des présidents feu Lyazid Chergui, le père spirituel du porte- fanion des Doukkala, de Taoufik Brahim et d'Abbdelkrim Benslimane, le frère du général, avec qu'il ne remplisse cette fonction après le départ de Haj Feggane. Sous son ère, le DHJ avait retrouvé la nationale I une année après sa relégation. Sous son ère, beaucoup de jeunes joueurs talentueux, formés au club, ont éclos. Réda Er- riyahi en tête, Fadli, abderrahim Boukri, Lotfi Hicham, Dalal, Nejmy, Serrhate, Laâbad et beaucoup d'autres jeunes de l'équipe Espoirs. Outre cette responsabilité, il a été président du DHJ Omnisport, président de l'Association Provinciale pour la Promotion des Sports dans les Doukkala et président de la commission omni- sport de l'Association des Doukkala. Volontaire, persévérant et généreux par son coeur, il n'a jamais hésité à donner le meilleur de lui-même à la vie du Sport Doukkali. Hadj Driss Chakiri s'est investi totalement pour la gloire du Football Jdidi en particulier et du Sport Doukkali en général. Il l'avait fait avec passion et amour parce qu`en sport, comme il se plaisait à répéter « on vient pour servir et non se servir ». Il a consacré beaucoup de temps au ballon rond. Son action a valeur d'exemple pour tous. C'était quelqu'un qui avait une réelle vision de ce que devait être le DHJ. Il était là au bon moment et a su saisir les opportunités qui se présentaient pour le club. Il a doté aussi le club d'un nouveau siège, le club house. Ainsi, grâce à son abnégation, les clubs jdidis, dont les effectifs grimpaient en flèche, vivaient une période faste. Le boom du football Jdidi ne tardait pas à venir puisqu'il a pu participer dans les Eliminatoires de la Coupe d'Afrique. Le DHJ Omnisport Hadj Driss Chakiri était un président dynamique du DHJ Omnisport qui a tant œuvré pour que le Sport Doukkali progresse. Le DHJ Omnisport, créé en 1989 à la suite de la proposition du sympathique Hadj Driss Chakiri, favorisait, développait et animait au sein de la ville d'El Jadida différentes disciplines sportives par l'intermédiaire de 10 sections spécialisées. Il avait pour objectif de mettre en commun des moyens d'action, permettant ainsi la création et le développement de clubs sportifs et par là-même la diversité d'activités sportives au service du plus grand nombre de sportifs. Chaque Section était indépendante pour l'organisation de ses activités sportives. Très vite, le DHJ Omnisport devenait un acteur incontournable du sport régional. « Il y avait à cette époque un mouvement créatif grâce au savoir-faire de M. Farid El Ouarrak, qui était gouverneur de la Province d'El Jadida à cette époque. Après la création de l'Association des Doukkala en 1994, le club DHJ Omnisport a pris son véritable élan. Et grâce au soutien moral et financier de Si Abdelkrim Bencherki, président de L'Association des Doukkala, la DIAC, la SOFAC, la SNI et LOTO, le club s'était tourné vers un avenir radieux, vers la jeunesse et s'activait tout au long de l'année dans les différentes sections du club ainsi que lors des grands rendez-vous. Le club comptait une administration à la hauteur sur décision ministérielle (Ministère de la Jeunesse et Sports), une comptabilité très rigoureuse et des salariés à temps plein. Le club comptait, également, dans ses rangs la section football et les sports traditionnels qui sont venus se greffer comme le Basket-ball, le judo, le tennis, le volley-ball, l'athlétisme, le sport nautique, le hand-ball… « Il s'agissait de créer des conditions pour que les clubs et leurs joueurs vivent mieux », notait Hadj Driss Chakiri. Le DHJ Omnisport était un club dont l'objet était de favoriser le développement et la pratique de toutes les disciplines sportives à El Jadida. Selon Hadj Driss Chakiri, « on peut résumer les objectifs de la création du DHJ Omnisport dans les points suivants: maîtriser le développement d'activités sportives, éviter d'éventuels débordements financiers, regrouper les forces sportives pour obtenir de meilleurs résultats, être un interlocuteur privilégié et reconnu pour sa compétence sportive, obtenir les moyens d'un fonctionnement stable et normal. Cependant, la politique et les objectifs du DHJ Omnisport se résumaient en ce qui suit: -La politique sportive était spécifique de chaque discipline. Elle était laissée à l'initiative de chaque section, avec l'approbation du Bureau Directeur qui s'assurait de leur cohérence avec les objectifs généraux de l'Omnisport. -Dans le domaine de la compétition un objectif global, compatible avec les moyens, financiers de l'Omnisport notamment, était d'être présent au niveau national dans une, voire, deux disciplines et de bien figurer au niveau régional suivant les activités. Le DHJ Omnisport déclinait sa politique suivant les thèmes : - offrir à toutes et à tous des activités multiples adaptées à leurs choix et à leurs aptitudes. Cette volonté sous-entendait des activités de loisir, de compétition, pour les jeunes. Surtout dans des disciplines multiples collectives ou individuelles. - former localement des champions. C'était à la fois une volonté délibérée et une nécessité compte tenu des capacités et des compétences innées des jeunes doukkalis. Cette option impliquait une politique de formation dans des écoles de sport animée par un encadrement compétent, des dirigeants dévoués et motivés. - organiser des manifestations sportives de qualité dans le but de participer largement à la notoriété du DHJ Omnisport mais aussi à celle de la Ville. - participer à l'animation de la Ville. Ainsi, le DHJ Omnisport faisait partie intégrante de la vie de la ville, tant par les rencontres sportives et les manifestations qu'il organisait, que par sa participation aux animations à l'initiative de la Ville. -équilibrer le budget. C'était la base d'une saine gestion. Le dispositif de budget prévisionnel et de vérification annuelle des comptes permettait d'en maîtriser l'équilibre. Quant à l'administration, elle était assurée par un Comité Directeur. Il était composé de membres qui représentaient les sections affiliées. Mais il y avait un responsable administratif, cadre de la Jeunesse et Sports, qui assurait la cohérence de la conduite opérationnelle. Evidemment, le Président du Comité Directeur était responsable de la gestion et de la conduite des relations avec les différents partenaires de l'Omnisport, et inspirait aussi les orientations sportives et financières approuvées par les membres du Comité Directeur. ». Très vite, le DHJ Omnisport était devenu un modèle à suivre et bon nombre d'équipes demandaient à Hadj Driss Chakiri un dossier complet sur ce nouveau-né qui avait insufflé un sang nouveau dans les veines du Sport Jdidi.
La monstruosité des ingrats
Malheureusement, Hadj Driss Chakiri s'était retiré de la scène sportive car il ne pouvait composer avec des gens qui aimaient " barboter" dans des eaux troubles. S'il avait pris, malgré lui, cette décision, ce n'était pas parce qu'il était incapable de faire face à la situation, mais à cause de l'insolence des magouilleurs et la monstruosité des ingrats qui avaient investi la scène footballistique. En seigneur, il n'avait jamais oublié les présidents qui avaient servi de leurs cœurs et de leurs tripes fidèlement le Difaâ Hassani Jadidi. « Je me souviens d'un Président ''père de famille'', passionné et proche de ses joueurs. C'est M. Benslimane. Il voulait faire du DHJ un club familial. C'était un séducteur et un gentleman. J'ai beaucoup appris aux côtés de lui . Je n'oublie pas aussi de citer un grand monsieur qui a tant donné au DHJ et à tout le Sport Jdidi. C'est M. El Ouarrak. Le DHJ lui doit tout et il ne faut pas l'oublier. C'était un Monsieur amoureux du DHJ, passionné par ses joueurs. Il aimait le football, il donnait toute sa passion. C'était un homme remarquable et formidable. Si Brahim Tawfiq était, lui aussi, un grand Président du DHJ. Il m'a marqué par sa gentillesse et sa générosité. C'était un personnage atypique du football, enthousiaste, amoureux du DHJ et de ses joueurs. J'ai une grande estime pour tout ce qu'il a fait pour la gloire du football Jdidi. Je n'ai que rarement rencontré de personnes aussi exceptionnelles. D'autres grands dirigeants se sont investis moralement et financièrement pour le bien-être du DHJ tel M. Znibi. Tous ces ténors sont tombés dans les oubliettes. C'est vrai qu'ils se sont retirés de leur plein gré. Mais je crois qu'ils se sont retirés pour diverses raisons… Il est à mon avis ingrat de les faire tomber dans les oubliettes. À mon avis, il y a un patrimoine à gérer, il faut se battre pour le préserver. Nous n'avons pas le droit de renoncer vis a vis de nos anciens. Il faut, en effet, composer avec les orientations sociales. Nous devons apporter au moins un soutien moral à nos anciens sportifs doukkalis qui s'étaient sacrifiés corps et âme pour la gloire du Sport Doukkali. Nous devons aussi ne pas oublier les grands sacrifices de nos valeureux mécènes doukkalis qui s'imposaient comme un acteur essentiel du mouvement sportif régional. Ces doukkalis ont su mettre le DHJ sur le devant de la scène nationale comme un club leader! D'autre part, j'attire l'attention de tout le monde que le Sport Jdidi en particulier et Doukkali en général ne peut supporter à végéter au jour le jour tant qu'il n'a pas de ressources stables et des dirigeants estimés et compétents et tant qu'on ne le considère pas en tant qu'investissement rentable. El Jadida en particulier et Doukkala en général est un grenier inépuisable de sportifs. Alors pourquoi aller chercher ailleurs? Quand on faisait confiance à nos jeunes dans les années 30, 40, 50, 60,70 et 80, le plus célèbre haras au Maroc était le nôtre, le plus brillant club nautique marocain et qui avait remporté une médaille de bronze au nom du Maroc dans les Jeux Olympiques de Rome était celui d'El Jadida, et j'en passe… Qu'a-t-on formé aujourd'hui? Qu'a-t-on réalisé? Voilà où le bât blesse! ». Voilà où allaient ses pensées. Servir les jeunes. Servir les clubs sportifs disciplines toutes confondues. Ses semblables se font rares partout au Maroc. Il nous a quittés en laissant derrière lui un vide. Mais que de sacrifices resteront inoubliables ! Repose en paix si Driss. Que le bon Dieu t'accueille en sa Sainte Miséricorde. Nous ne t'oublierons jamais !