Fortement dépendante des revenus issus du reste du monde, l'épargne nationale, nécessaire pour financer l'investissement, se réduit comme peau de chagrin en 2020. Les chiffres publiés par le Haut Commissariat au Plan dans le cadre du budget exploratoire donnent froid dans le dos. Les indicateurs ont été quasiment tous frappés de plein fouet par la crise sanitaire liée au Covid-19. A cet effet, on note en ce qui concerne le financement de l'économie, pierre angulaire de la relance, une baisse de l'épargne intérieure de 19,1% (vs 23,3% en 2019). Déjà avec un taux oscillant autour de 22%, l'épargne nationale était pointée du doigt à cause de son niveau faible par rapport à l'investissement de l'ordre de 32%. A l'occasion de l'élaboration de chaque Loi de Finances, on s'attendait à des mesures incitatives en faveur de l'épargne. Que dalle. A l'instar des Loi de Finances précédentes, celles de 2020 était maigre en mesures dispositions fiscales. Il a d'ailleurs été décidé dans le cadre de la LF 2020 de porter le plafond à 2 MDH (vs 600.000 DH) dans le cadre des plans d'actions et entreprise conclus à partir du 1er janvier 2020. Les revenus et profits de capitaux mobiliers réalisés dans le cadre d'un plan d'épargne en actions ou d'un plan d'épargne entreprise au profit des salariés sont exonérés de l'impôt dans la limite du plafond. C'est pour dire que bien avant la crise sanitaire liée au Covid-19, l'épargne intérieure était faible. En 2020, la baisse risquerait, selon le HCP, de s'accentuer davantage à cause des revenus nets en provenance du reste du monde qui pourraient continuer de régresser affichant une baisse de 4,6% après -1,5% en 2019 et -16,9% en 2018. « Ces évolutions devraient se traduire par une diminution de l'épargne nationale pour atteindre 23,7% du PIB au lieu de 27,8% en 2019 », alertent les analystes. Compte tenu d'un niveau d'investissement de l'ordre de 30,6% du PIB attendu en 2020 en baisse par rapport à 32,2% enregistré en 2019, les besoins de financement de l'économie nationale se seraient accentués à 6,9% du PIB au lieu de 4,4% une année auparavant. Aussi bien les données précédentes relatives à l'épargne que celles prévisibles pour l'année 2020 montrent que le Maroc a du pain sur la planche. Il suffit de soustraire les transferts des Marocains résidents à l'étranger pour se rendre compte que l'épargne des ménages oscille autour de 14% de leur revenu disponible brut. Un niveau qui est beaucoup plus faible en comparaison internationale. Et pourtant l'émergence tant aspirée par le Maroc reste étroitement liée à un taux d'investissement de 35%. Or, vu l'état actuel de l'épargne, il serait difficile de financer un tel niveau d'investissement à moins de recourir à l'endettement. Ce qui pourrait se traduire par la vulnérabilité des équilibres macroéconomiques. Les années 80 sont fraîches dans nos mémoires pour nous rappeler que l'épargne constitue la variable déterminante dans la répartition intergénérationnelle de la richesse. Une période où le taux d'endettement oscillait autour de 130%, avec de lourdes conséquences sociales. Pour remédier un tant soit peu à la situation, les opérateurs financiers sont appelés à innover et concevoir des produits adaptés aux besoins de la population. Tout laisse à dire que l'heure de repenser le paradigme de l'épargne a sonné. Lire également : L'épargne nationale reprend du poil de la bête, mais...