L'économie marocaine devrait enregistrer un taux de croissance de 2,9% en 2019 contre 3% l'année précédente. Ce ralentissement de la croissance économique en 2019 devrait se traduire par de faibles créations nettes d'emploi. En passant en revue l'économie mondiale, Ahmed Lahlimi, lors d'une conférence de presse tenue le mercredi 16 janvier pour la présentation de la situation socio-économique nationale en 2018 et ses perspectives pour 2019, a rappelé le ralentissement de la croissance économique. Un ralentissement empreint d'une décélération de l'investissement, de la demande avec une instabilité des marchés de capitaux et une volatilité des prix des matières premières notamment du pétrole. Le prix du brent devrait connaitre une tendance à la baisse sous l'effet des hausses anticipées de la production aux USA et des incertitudes sur la capacité des membres de l'OPEP à s'entendre sur une réduction conséquente de leur production. Une croissance économique tirée par la demande intérieure En ce qui concerne l'économie nationale, l'année 2018 a été marquée par une bonne campagne agricole grâce à une pluviométrie bien répartie sur les plans temps et espace et a connu une progression ''assez modeste'' des productions non agricoles. Cependant, l'actuelle campagne a démarré dans des conditions atmosphériques particulières en raison d'un début de campagne très pluvieux. Cette pluviométrie généreuse a pourtant subi le contrecoup d'un déficit généralisé conjugué à une hausse sensible de l'amplitude thermique en décembre, a-t-il relevé, notant toutefois que, durant les 30 dernières années, les campagnes agricoles ayant démarré sous des conditions semblables s'élèvent à six avec ''une probabilité de 74% de converger vers une saison bonne à moyenne''. Dans un contexte pareil, le HCP retient dans le cadre du budget économique prévisionnel 2019 l'hypothèse du retour probable d'une pluviométrie hivernale conforme à la saison normale. Et tenant compte de la poursuite de la dynamique de croissance des cultures irriguées et du redressement de l'avicole, le repli de l'activité agricole se limiterait à -0,4% seulement en 2019. Les activités non agricoles vont continuer au même rythme ''assez modeste'' et l'inflation va se réduire à 1,2% contre 1,7% en 2018, a annoncé le Haut-commissaire au Plan. La croissance du PIB, qui sera de 2,9%, sera portée par la demande intérieure avec, cependant, un rythme en léger retrait par rapport à 2018. De ce fait, la croissance de la demande intérieure passerait à 3,4% en 2019 contre 3,9% l'exercice antérieur, sous l'effet d'une légère hausse de la formation de capital fixe (3,2% contre 2,9% en 2018) et d'une faible croissance de la consommation finale des ménages à 3,5% (3,4% en 2018). En revanche, la consommation publique afficherait un accroissement de 2,9% l'année en cours après 2,2% en 2018. En ce qui concerne la demande extérieure, sa contribution à la croissance du PIB resterait, négative passant d'un point en 2018 à -0,8% en 2019 en raison de la persistance de l'écart entre le rythme de croissance des importations, qui devraient croitre de 6,4% (6,1% en 2018), et celui des exportations, qui progresserait en volume de 5,9% au lieu de 4,9 %en 2018, a expliqué Lahlimi. Ce qui explique le déficit commercial structurel dont pâtit l'économie marocaine. En outre, l'effort d'investissement ralentirait passant de 32,4% du PIB en 2018 à 32% l'année en cours, alors que l'épargne nationale se situerait à 27,7% du PIB en 2019 contre 28% en 2018. Un niveau jugé faible (loin de 32%) pour booster l'investissement. Globalement, au cours des dernières années, l'investissement a maintenu pratiquement le même rythme de croissance avec des années de baisse. Mais, il rappelle que le stock du capital est faible en intensité capitalistique par rapport à d'autres pays en développement. Lire également : Conjoncture : Que nous réserve Ahmed Lahlimi Alami ? Accentuation des besoins de financement de l'économie Après l'effort de rééquilibrage allégeant le déficit budgétaire de 5,1% du PIB en 2013 à 3,6% en 2017, celui-ci aurait enregistré une légère hausse en 2018. Ce résultat s'explique par le recul du rythme d'accroissement des recettes ordinaires, conjugué à une progression plus marquée des dépenses courantes notamment celles de la compensation et de la masse salariale. Les recettes ordinaires auraient été limitées à 20,7% du PIB en 2018, au lieu d'une moyenne de 22% entre 2010 et 2017. Ceci aurait été le résultat essentiellement d'une légère hausse des recettes fiscales qui auraient atteint 18,8% du PIB. Quant aux recettes non fiscales, elles auraient continué d'évoluer sur une tendance baissière pour atteindre 1,6% du PIB en 2018 au lieu d'une moyenne de 2,7% du PIB durant la période 2010-2017. La baisse des recettes non fiscales aurait été attribuable, notamment, au recul des dons reçus des pays du Conseil de Coopération du Golfe. Au niveau des dépenses courantes, le renchérissement en 2018 des cours des matières premières au niveau mondial, et notamment le gaz butane, aurait induit une hausse des dépenses de compensation à près de 17,8 MMDH à fin 2018, en accroissement de près de 16% par rapport à leur niveau enregistré en 2017. Les dépenses de fonctionnement, quoiqu'elles représentent près de 79,4% des dépenses courantes, auraient continué d'emprunter une tendance haussière, pour se situer à près de 15,2% du PIB en 2018. En prenant en considération les dépenses budgétaires d'investissement qui auraient représenté 5,7% du PIB, le déficit budgétaire aurait connu en 2018 un creusement pour atteindre 3,9% du PIB en 2018, après 3,6% en 2017. Le recours de l'Etat aux emprunts, pour couvrir son besoin de financement, aurait induit une hausse de la dette du trésor à 65,8% du PIB au lieu de 65,1% en 2017 et d'une moyenne de 59,1% du PIB entre 2010 et 2016. La dette intérieure du trésor aurait atteint 52,6% du PIB contre 50,7% en 2017, alors que la dette extérieure aurait reculé pour se situer à 13,1% du PIB au lieu de 14,4% en 2017. Par ailleurs, la dette extérieure des établissements et entreprises publiques garantie par l'Etat aurait atteint près de 16,4% du PIB en 2018 au lieu de 13,6% entre 2010 et 2017, dépassant largement, depuis l'année 2015, la dette extérieure du trésor. Dans ces conditions, le taux d'endettement public global aurait atteint 82,2% du PIB en 2018 au lieu de 82% en 2017. Au plan des finances extérieures, la balance commerciale en 2018 aurait continué de dégager un déficit en accentuation structurelle pour atteindre 18,3% du PIB au lieu de 17,8% en 2017. Ce résultat s'explique par l'effet conjugué de la hausse importante des prix des matières premières au niveau international et de l'augmentation du volume des importations, suite aux besoins permanents du pays en produits importés. La balance des services qui aurait continué d'être excédentaire pour représenter 7% du PIB, n'aurait pas pu atténuer le déficit en ressources qui se serait inscrit en hausse pour atteindre 11,4% du PIB au lieu de 10,9% en 2017. Dans l'ensemble, l'économie nationale aurait connu une baisse du taux d'épargne intérieure de 23,1% du PIB en 2017 à 22,5% en 2018, en raison d'un rythme de croissance aux prix courants de 5,5% de la consommation finale nationale, plus élevé que celui de 4,6% du PIB nominal. Tenant compte de la baisse de la part des revenus nets en provenance du reste du monde par rapport au PIB de 5,8% en 2017 à 5,5% en 2018, l'épargne nationale se serait située à 27,9% du PIB en 2018, en baisse par rapport à 28,9% enregistré en 2017. Perspectives économiques en 2019 Les perspectives économiques nationales pour l'année 2019 prennent en considération, en plus des nouvelles dispositions de la loi de finances 2019, en matière de dépenses d'investissement, de fonctionnement et de compensation, les hypothèses afférentes aux nouvelles tendances de l'environnement national et international. Ces prévisions se basent également sur la réalisation d'une production céréalière moyenne durant la campagne agricole 2018-2019 et une consolidation des activités des autres cultures et celles de l'élevage. Elles supposent une hausse de 3,6% en 2019 de la demande mondiale adressée au Maroc, d'un redressement de près de 3% des transferts des MRE, de la progression de 4% des recettes touristiques et de la consolidation du rythme d'accroissement des investissements directs étrangers de 10%. Dans ces conditions, la valeur ajoutée du secteur primaire devrait ralentir à 0,1% après 3,8% en 2018. Les activités non agricoles, en l'absence d'impulsions permettant l'enclenchement d'une reprise soutenue de la demande qui concernerait davantage la production locale et non pas les importations, devraient poursuivre leur amélioration à petits pas en 2019. Elles s'accroitraient ainsi de 3,1% au lieu de 2,9% estimé pour 2018 attribuable à l'amélioration prévue de 3,1% du secteur secondaire et de 3,2% des activités tertiaires. Compte tenu de ces évolutions et d'une augmentation prévue de 4,5% des impôts et taxes sur produits nets de subventions, le produit intérieur brut devrait s'accroitre de 2,9% en 2019 au lieu de 3% en 2018 avec un niveau d'inflation, en baisse situé à 1,2% en 2019 au lieu de 1,6% en 2018. Le ralentissement de la croissance économique en 2019 devrait se traduire par de faibles créations nettes d'emploi. Néanmoins, avec une légère baisse du taux d'activité, le taux de chômage atteindrait 10,1% au lieu de 10% en 2018 et 10,2% enregistré en 2017. La demande intérieure, quoiqu'en léger ralentissement, continuerait de tirer la croissance économique nationale, au moment où la contribution de la demande extérieure resterait négative. Lire également : La demande interne continue à soutenir la croissance économique