Ecrit par Lamiae Boumahrou | Parmi les entreprises publiques qui donnent du fil à retorde aux opérateurs du secteur du BTP, Al Omrane figure en bonne place. Cette dernière aurait des centaines de millions de dettes envers les entreprises ayant exécuté des commandes publiques. Depuis la réforme de 2018, l'Etat mène une guerre contre les retards des délais de paiement. Ainsi, les délais de paiement de l'Etat et des Collectivités Territoriales ont connu une amélioration remarquable au cours des dernières années. Les délais moyens de paiement de la commande publique sont aujourd'hui largement en deçà du délai légal de 60 jours. Ainsi, à fin septembre 2022, la moyenne des délais de paiement déclarés par l'ensemble des établissements et entreprises publics a atteint 36,6 jours contre 39,4 jours à fin septembre 2021. Malheureusement, tous les EEP ne sont pas au même niveau d'assiduité. C'est le cas d'Al Omrane qui ne suit pas l'exemplarité de l'Etat en matière de respect des délais de paiement. Et ce n'est pas nous qui le disons. Les entreprises du BTP ont récemment dénoncé le retard qu'accuse Al Omrane dans l'exécution des paiements des marchés publics. Il s'agit tout de même de l'un des plus grands ordonnateurs de la commande publique du secteur. Les dettes d'Al Omrane envers les entreprises du BTP se chiffrent en centaines de millions de DH selon nos sources. « Certes nous souffrons de retards de paiement avec bon nombre de donneurs d'ordre. Mais c'est surtout avec Al Omrane que nous souffrons le plus. L'entreprises est à l'origine de la faillite de plusieurs entreprises », a déploré un opérateur du BTP lors d'une rencontre organisée par la FNBTP. Al Omrane, qui s'accapare une part importante des marchés publics dans le cadre des conventions avec les différents ministères, ne respecterait pas les délais fixés par les appels d'offre. « Au moment du paiement, le maître d'ouvrage n'honore pas ses engagements et prétend que ce sont les ministères qui ne débloquent pas les fonds des chantiers réalisés dans les délais. Le retard peut aller de 8 mois à une année ce qui pénalise l'entreprise déjà fragilisée par la conjoncture», déplore l'opérateur. Al Omrane : juge et partie ? Les opérateurs du BTP reprochent également à El Omrane la non application de la circulaire du Chef du gouvernement adressée en avril 2022 aux maîtres d'ouvrages publics les appelant à prendre en compte la conjoncture difficile qui prévaut actuellement dans la gestion de leurs relations avec les entreprises du BTP notamment celles qui réalisent les ouvrages et qui n'ont pas seulement dû faire face à la hausse des coûts des intrants et des frais de fret et de transport, mais également, à la désorganisation des chaines d'approvisionnement, des impacts des restrictions de déplacement. Une circulaire dont l'objectif est de soulager les trésoreries des entreprises du secteur du BTP et de leur permettre de sauvegarder les emplois, de poursuivre leurs activités et de préserver leur compétitivité. Et pourtant, Al Omrane est membre de la commission nationale mise en place par la ministre de l'Aménagement du Territoire National, de l'Urbanisme, de l'Habitat et de la Politique de la Ville le 19 avril 2022. Une Commission dont la mission était d'assurer un suivi régulier de l'exécution de la circulaire et de dresser des rapports consolidés à cet effet. Comme quoi on ne peut pas être juge et partie. Il faut dire aussi que la gestion de la holding a souvent été critiquée. En novembre 2021, le ministre du Budget, Fouzi Lekjaa, avait même fait allusion, devant la Commission des Finances, à une éventuelle privatisation d'Al Omrane qui permettra de secouer la holding d'une part et d'autre part de mieux contrôler la gestion du top management. A ce jour, on n'en sait pas plus sur les intentions de l'Etat d'ouvrir le capital d'Al Omrane.