Le projet de loi sur la protection du consommateur est au cœur des débats depuis presque une décennie. Ces dernières semaines devraient être décisives. Il est souligné de toute part le défaut de protection du consommateur. D'autres mesures seront-elles prises? Challenge Hebdo : le projet de loi s'est fait dans la douleur, après près de huit ans d'élaboration. Quels sont les obstacles à sa mise exécution ? Mounia Boucetta : au début, il y a lieu de noter que le projet de loi 31-08 édictant des mesures de protection des consommateurs, comme tous les projets de loi, a suivi, sans douleur, son cheminement normal d'élaboration et de concertation avec les différents acteurs qui interviennent dans le domaine de la protection du consommateur. Ainsi, et parce que ce projet est un texte transversal qui touche plusieurs secteurs d'activités, il a fait l'objet de plusieurs réunions, avec l'ensemble des départements ministériels, des associations de protection des consommateurs, des organisations et chambres professionnelles ainsi que du monde universitaire. Aujourd'hui, il n'y a aucun obstacle à sa mise en exécution, qui ne peut avoir lieu qu'une fois le projet promulgué. C. H. : que s'est-il passé depuis la mouture du texte de 2001 (n°27-00), sachant que les départements de la santé et de l'agriculture avaient rejeté le projet de loi. Quelles ont été les concessions faites par le ministère pour contourner le refus ? M. B. : il est à souligner que le projet de loi n'a fait l'objet d'aucun rejet des départements ministériels. Les ministères cités ont contribué efficacement à la réalisation de ce nouveau cadre juridique lors des travaux de la commission ministérielle créée à cet effet. De même, il n'y a pas eu lieu de faire de concessions sur ce projet, qui vise l'intérêt de toutes les parties qu'elles soient privées ou publiques et celui de la protection du consommateur. C. H. : qui est-ce qui justifie que les associations de consommateurs n'aient toujours pas la possibilité d'ester en justice ? N'est-ce pas un rouage déterminant dans l'application de ce texte ? M. B. : le rôle du mouvement consumériste national est prépondérant en matière de renforcement et de protection des droits des consommateurs et ce, à travers l'information, la sensibilisation et l'éducation du consommateur, ainsi que la défense de ses intérêts auprès de la justice. Pour défendre les intérêts collectifs des consommateurs, le projet de loi a prévu que l'association dispose du statut d'utilité publique et ce, en conformité avec la loi du 15 Novembre 1958 réglementant le droit d'association et les amendements apportés par la loi n° 75-00 du 23 Juillet 2002 et le décret n° 2-04-969 du 10 Janvier 2005, qui ont introduit de nouvelles dispositions quant à la reconnaissance du statut de l'utilité publique à une association. Pour l'obtenir, ce département les accompagne dans ce processus à travers des actions de formation et d'expertise technique. Ainsi, deux associations ont déposé officiellement leurs dossiers pour l'obtention de ce statut. C. H. : on reproche au texte d'être particulièrement focalisé sur les transactions commerciales et non pas sur la protection du consommateur en elle-même. Qu'en pensez-vous ? M. B. : à travers ses dix titres et ses 203 articles, le projet de loi n°31-08 se propose de renforcer et de compléter le dispositif en vigueur de manière significative par des mesures appropriées. Le projet de loi a pour objectif majeur de protéger le consommateur dans le cadre de la relation qui s'établit entre lui et le fournisseur ou prestataire, qu'elle soit à titre onéreux ou gratuit. Pour cette raison, la nuance est importante : ce texte ne se focalise pas sur les transactions commerciales, il renforce la protection du consommateur dans le cadre des transactions commerciales. C. H. : en matière de procédure juridictionnelle, quelles mesures ont été prises ? Nombreux sont les citoyens rebutés par la procédure. M. B. : le projet de loi définit la procédure d'enquête. Il accorde aux associations le droit d'ester en justice à travers l'exercice des droits reconnus à la partie civile par le biais des actions au profit de l'intérêt collectif ou pour la suppression des clauses abusives ou illicites. De même, elles peuvent intervenir devant la justice pour ordonner toute mesure destinée à faire cesser des agissements illicites ou à supprimer dans le contrat ou le type de contrat proposé aux consommateurs une clause illicite. En outre, elles peuvent exercer des actions en représentation conjointe, si elles ont été mandatées. Par ailleurs, les guichets conseils mis au niveau de certaines associations, avec l'appui de ce Département et la coopération allemande, assurent le règlement des litiges par des procédures extrajudiciaires. Le nombre de requêtes traitées par les 4 guichets opérationnels actuellement dépasse les 4000. Aussi, le centre Marocain de la Consommation, qui sera mis en place par ce département, en 2010, compte parmi ses missions la médiation dans les affaires de consommation. Ce service sera opérationnel en collaboration avec des associations professionnelles et des consommateurs.