Les compagnies aériennes sont contraintes de marcher sur les plates-bandes de la concurrence pour trouver du business. Une question de survie. La crise chamboule l'ordre établi. Depuis quelques jours, des campagnes publicitaires sont lancées par les compagnies aériennes, qui font des promotions exceptionnelles sur des destinations diverses. C'est Air France qui marque les esprits. Jusqu'au 10 mars, la compagnie française a suggéré à ses clients des tarifs inhabituels, du jamais vu, comme le laisse entendre la publicité, pour des voyages limités dans la durée : du 5 mars au 1er avril et du 14 avril au 31 mai 2009. Ainsi, les plus chanceux ont eu droit à des billets d'une valeur de 205 DH pour aller vers le Caire, 354 DH vers Dubaï, 806 DH vers Johannesburg, 1.515 DH vers Pékin ou Shanghaï, 2.510 DH vers Kuala Lumpur ou 3.380 DH vers Buenos Aires. C'est ce que l'on peut appeler des prix superattractifs. Mais ne vous y méprenez pas. La concurrence est rude entre compagnies, la conjoncture est certes difficile pour elles, mais ces prix s'entendent à l'évidence hors taxe. Le prix toutes taxes comprises (TTC) dépend de la destination (selon le site d'Air France, il faut ajouter quelques 2.843 DH en moyenne) et des frais de services. C'est ainsi que le billet pour le Caire vaut en réalité 3210 DH TTC, celui pour Dubaï environ 3.640 DH. La compagnie française applique des tarifs d'appels qui ne concernent cependant pas un nombre fixe de places, comme c'est le cas des compagnies low cost par exemple. Chez elles, le nombre de sièges au prix promotionnel par vol est connu à l'avance. Ce n'est pas le cas ici. Sur le trajet Casablanca-Paris-Pékin par exemple, Air France va mettre en «compétition» plusieurs pays qui achèteront les places sur le deuxième tronçon. Le Paris-Pékin pourra être vendu au Maroc, en Egypte… Il n'existe pas de quotas par pays. Mais c'est le premier arrivé qui a le plus de chances d'être servi. Ce n'est donc qu'un nombre limité de places qui sera vendu à des prix réduits. «La compagnie doit faire ses calculs pour rester rentable. Parfois, il est possible que 5 à 6 sièges seulement soient commercialisés au prix de la promotion», confie un agent de voyage. Animation commerciale ? Au vu de ces promotions, l'on est alors en droit de se demander pour quelles raisons les compagnies aériennes, comme Air France (qui, disons-le, a l'habitude de proposer des promotions), commencent à aller sur les plate-bandes d'autres compagnies en soumettant des tarifs assez attractifs. Pour un professionnel, le choix de Johannesburg par exemple n'est qu'un coup de publicité pour la compagnie. Par contre, le choix de Pékin ou Dubaï n'est pas fortuit. «Il est clair que la compagnie cherche à prendre des parts de marché aux compagnies moyen orientales», confie-t-il. Les donnes sont donc en train de changer. Et quoiqu'on dise, la crise internationale qui affecte les grands groupes conduit certains d'entre eux à réviser le modèle de développement. C'est ce qui se produit aussi dans l'aérien. Chacun essaie de s'accaparer des marchés, quitte à aller dénicher du business sur les lignes de prédilection des autres. En témoigne l'exemple de Qatar Airways, qui est parti tenter sa chance sur la ligne d'Abu Dhabi, alors qu'elle est la destination phare d'Etihad Airways. C'est le cas également d'Emirates, partie sur la ligne de Doha alors qu'elle était principalement desservie par Qatar Airways. Et aujourd'hui, Air France entre aussi dans la «bataille». «On peut penser que les compagnies créent de l'animation commerciale. Mais elles sont obligées de le faire. Les promotions lancées dernièrement par Air France, pour ne prendre que ce cas en exemple, sont justifiées. Du fait de la crise, le hub régional de Charles de Gaulle doit drainer plus de trafic. Pour pouvoir améliorer sa profitabilité, une compagnie comme Air France est d'une certaine manière obligée de créer plus d'attractivité sur certaines destinations», développe le directeur d'une agence de voyages casablancaise. Les compagnies font alors leurs calculs. Pour survivre et être attractives, elles sont contraintes de se plier aux exigences du marché. En temps normal, sans crise, sans rude concurrence, et sans l'arrivée des low cost, elles n'auraient sûrement pas pensé faire des efforts pour ramener leurs prix à des niveaux si bas. Que le consommateur s'en réjouisse !