Révision de tarification, séparation du trafic passager et de marchandises, incitations au développement des services (plates-formes…), formation, cadre institutionnel… Bien des pistes à explorer ! Le coût du transport des produits marocains du textile-habillement (pour ne prendre que ce secteur en exemple) à destination des Etats-Unis est plus de deux fois supérieur à celui des produits en provenance de la Chine ou de la Thaïlande. Les coûts de la logistique sont encore énormes au Maroc. Selon certaines estimations, ils atteindraient les 20% du PIB, contre 15 à 17% dans des pays comme le Mexique, le Brésil ou la Chine. Ceci pousse à réfléchir. Comment améliorer la compétitivité avec des coûts pareils ? Ils doivent impérativement baisser. Quelques mesures ont été prises, mais il reste encore beaucoup à faire. En analysant le secteur de la logistique, la direction des études et des prévisions financières (DEPF) du ministère des Finances a élaboré un certain nombre de recommandations (malheureusement, non chiffrées) pour mieux développer la logistique. On y retrouve une synthèse des pistes déjà explorées dans des études élaborées par d'autres organismes comme la Banque Mondiale, Drewry ou le ministère de l'Aménagement du Territoire. Le cabinet Mc Kinsey travaillerait aussi sur ce secteur. Les résultats de son étude ne devraient pas tarder. C'est dire que beaucoup de gens sont maintenant quasi unanimes sur les changements à opérer. Il est question, entre autres, de faire baisser les coûts et les délais de la traversée du Détroit de Gibraltar. Pour les exportateurs marocains, c'est déjà un grand obstacle. Le coût de la traversée correspond à près de la moitié de la traversée de l'Espagne, soit 600 à 700 kilomètres. « La traversée du détroit revient à environ 560 euros par traversée, soit deux à trois fois la norme pour des distances de traversée comparables (comme le tunnel sous la Manche) », indique-t-on auprès de la DEPF. Une comparaison qui laisse sans voix. Pour parvenir à réduire ces deux composantes qui handicapent les transactions commerciales, il faudrait alors réviser le système de tarification, séparer le trafic passager de celui des marchandises et développer le trafic roulier à partir de Tanger-Med. Autre handicap de taille : celui des coûts et des délais de passage encore importants dans le port de Casablanca. La DEPF suggère, entre autres, que la Commission Nationale de Simplification des Procédures du Commerce International et de l'enceinte portuaire de Casablanca soit réactivée pour qu'elle puisse déterminer de nouvelles actions (gestion des flux documentaires, déploiement de l'échange de données informatiques…) qui permettraient d'arriver à cette fin. Parmi les autres recommandations formulées, notons les incitations au développement de services logistiques (plates-formes…) à proximité des ports comme celui de Casablanca, Tanger, Nador ou Agadir. « Ceci permettrait de rendre plus efficace la distribution destinée au commerce extérieur et de favoriser le développement économique et social de certaines régions qui souffrent d'un déficit en logistique », précise-t-on à la DEPF. L'externalisation, une mission cruciale L'externalisation des services logistiques n'est pas en reste. Et il s'agit là d'un nombre non négligeable de tâches dont les entreprises se «débarrasseront» pour mieux se concentrer sur leur métier de base. Plusieurs maillons caractérisent la logistique. Ils vont de l'achat des matières premières, des passages par les frontières, de la gestion documentaire au transport national et international, à la gestion des stocks de produits finis, au traitement des commandes par les entreprises étrangères en passant par le dédouanement, les expéditions… « Au Maroc, la demande d'externalisation des prestations logistiques par les entreprises marocaines demeure faible. A l'exception de certaines grandes entreprises mieux structurées, les sociétés industrielles ou de négoce continuent à traiter elle-même les fonctions logistiques. Les plates-formes logistiques installées actuellement restent insuffisantes pour insuffler une forte dynamique au secteur. En externalisant la logistique, les opérateurs économiques peuvent générer plus de valeur ajoutée». Des pistes, il en existe encore d'autres pour rendre les entreprises plus compétitives. Mustapha Al Khayat, président de l'Association Marocaine pour la Logistique (AMLOG), qui a participé à l'élaboration de plusieurs études en la matière, ajoute que le secteur a aussi besoin de cadres institutionnels et organisationnels nouveaux, de formation innovante en logistique, de maîtrise de la chaîne logistique avec création d'entreprises innovantes en prestation de services logistiques avec la mise en place d'un réseau de plates-formes logistiques et de moyens de transport et d'information technologiquement développés… « Ainsi, le développement de la logistique est à appréhender à trois niveaux: macro-logistique par une politique logistique (ce que fait le Ministère de l'Equipement et des Transports), méso-logistique au niveau des Supply Chain (par filière) et micro-logistique par des entrepreneurs innovants et flexibles face à des demandes volatiles », conclut-il. Les différents accords que le Maroc a ratifié, soit de manière bilatérale, soit multilatérale, doivent le pousser alors à aller plus vite dans ces réformes. ◆