Maroc Télécom, Méditel et Wana lancent la MATI, l'association dans laquelle ils devront défendre leurs intérêts communs. Sur le plan commercial, la guéguerre ne s'arrêtera pas pour autant. Qui des trois patrons de Maroc Télécom, Méditel ou Wana a eu la délicate idée de contacter ses confrères pour leur proposer la création d'une association des professionnels des télécoms ? Selon Abdeslam Ahizoune, président-directeur général de Maroc Télécom, la question n'a même pas lieu d'être posée. «Un jour, alors que nous étions réunis, nous avons abordé les problèmes et nous avons ensemble décidé de lancer une association». Cette rencontre date d'il y a quelques mois déjà. L'idée a donc mûri. Pour sa part, Mohamed El Mandjra, directeur général de Méditélécom, aurait apporté sa touche pour accélérer le processus. «C'était donc moi qui retardais le projet», ironise-t-il lorsqu'une question relative au timing du projet est posée aux trois dirigeants venus présenter cette semaine leur nouvelle alliance. En fait, c'est une première au Maroc que de voir regroupés ces trois opérateurs télécoms autour d'une même table, eux qui se mènent des batailles sans merci sur le plan commercial. Sous d'autres cieux, une pareille annonce n'aurait pas fait «tilter». Depuis longtemps, les opérateurs télécoms, pour ne citer qu'eux en exemple, sont réunis dans des associations pour le développement de services à valeur ajoutée…. «Il n'était pas normal que nous ne disposions pas de pareille association », réplique Abddeslam Ahizoune, qui assure la présidence –tournante- de l'association pour une durée de 3 années. Les trois décident alors d'adopter une position commune dans le cadre de Mati, l'Association Marocaine des professionnels des Télécoms. Mais attention, n'allez pas imaginer qu'ils font complètement la paix. La guéguerre aura toujours lieu sur le terrain. Et lorsque l'un se sentira lésé par rapport à l'autre, il aura toujours la même attitude. Il ira se plaindre auprès de l'ANRT, l'agence de régulation ou de la HACA, lorsqu'il s'agira de publicité comparative par exemple. Mais lorsqu'il sera question de défendre leurs intérêts communs (équité fiscale, neutralité technologique…), au Maroc comme à l'étranger, les trois seront sur la même longueur d'ondes. «En matière de représentation nationale ou internationale, nous n'avions pas de véritable porte drapeau. L'association pourra être ce porte-parole de notre secteur», confie Karim Zaz, président de Wana. En d'autres termes, les objectifs de l'association comptent la promotion du secteur auprès des autorités, l'analyse des problématiques non concurrentielles pour une réponse collective et l'établissement d'une interface des institutionnels dans le domaine législatif et réglementaire. Faut-il craindre des ententes sur les prix ? A travers la constitution de cette association, doit-on craindre alors des ententes sur les prix, des ententes commerciales entre les trois opérateurs qui léseraient le consommateur? Les trois patrons n'ont eu de cesse de le répéter. Il ne s'agit en aucun cas d'aboutir à ce genre d'entente. S'ils le voulaient vraiment, ils n'auraient pas eu besoin de communiquer sur leur association. Ils auraient pu sceller des alliances en catimini. «Nous ne sommes pas une association sectaire. Nous ne sommes pas une association qui couvre une entente commerciale. Nous ne sommes pas un groupe de pression. Nous ne sommes pas une machine de guerre. Nous voulons construire et non détruire dans le respect des principes de la concurrence saine et loyale », résume Ahizoune. Aujourd'hui, les trois membres, qui ouvrent la porte de leur association à d'autres opérateurs (fournisseurs de services, détenteurs de licences….), se sont seulement prononcés sur la création de cette association, sans pour autant dresser une liste d'actions. Et pourtant, les chantiers pointent leur nez. L'ANRT prépare une nouvelle note d'orientation du secteur pour la période 2009/2013. Quel rôle jouera l'association ? Pour l'instant, les opérateurs ne se sont pas encore exprimés officiellement sur leur perception de l'évolution du marché à cet horizon. Pourtant, cet horizon-là pourrait être chamboulé si un quatrième opérateur pénétrait le marché. Explication. L'ANRT vient de lancer un appel à concurrence pour l'octroi d'une troisième licence de 2ème génération GSM. Que deviendra le marché si un nouvel opérateur répond au cahier des charges et décroche cette licence ? L'on se retrouverait avec 3 opérateurs GSM, mais 4 opérateurs mobiles (Wana étant un opérateur mobile de 3ème génération). Les trois opérateurs ont discuté de cette éventualité. Mais ils manquent encore de visibilité sur certains sujets. Lorsque la première note d'orientation de la libéralisation des télécoms 2004/2008 a été élaborée, il n'était question que de 3 opérateurs. Aujourd'hui, l'éventualité d'un quatrième opérateur plane sur le marché. Aussi, les opérateurs se demandent si l'ANRT devra attribuer à chaque technologie une licence. Bref, les trois opérateurs attendent des réponses. Aujourd'hui, ils ont franchi un pas. Mais sur la forme seulement. Sur le fond, il faudra attendre encore un peu pour connaître les actions que l'association va mener. ◆