Ce n'est pas un MRE comme les autres. Ingénieur de formation, il s'est reconverti dans l'enseignement. Depuis 2012, il assure la présidence de l'Université Cadi Ayyad qu'il ambitionne de placer au plus haut niveau. I l y a certaines fortes personnalités, que l'on n'hésite pas à considérer, à plus d'un titre, comme étant le reflet d'une époque. Une époque où l'ascenseur social fonctionnait, et où des hommes et des femmes issus du Maroc profond, parvenaient à surmonter toutes les entraves rencontrées, et connaissaient des parcours exemplaires. Il était alors possible de réussir par les études, et les études seulement. Voie royale pour atteindre des sommets dont les parents n'osaient même pas rêver. Abdellatif Miraoui est de cette trempe là. De ceux que les difficultés n'ont pas arrêté, que les obstacles ont aguerri, et pour qui le succès a été au rendez vous. Comme beaucoup d'autres d' ailleurs, à cette époque. Il est né en 1962, à Fkih Ben Saleh, dans une famille qui ne comptait pas moins de neuf enfants, dont il était le cinquième. Le père qui était en charge de cette fratrie nombreuse était un simple ferronnier. La famille vivait dans ce qu'était, à l'époque une simple bourgade dans la plaine des Beni Amir, entre le prolongement de la Chaouia et les confins de l'Atlas, à laquelle d'ailleurs, elle empruntait son appellation première. Depuis, le village prit de l'essor, et profita de la manne de ses expatriés, allés chercher fortune en Italie et en Espagne. La famille est modeste, et tout naturellement profite des quelques avantages de l'entraide familiale. Une valeur qui ne semble pas se perpétuer. Les grands parents maternels d'Abdellatif, agriculteurs, envoient chaque année à leur fille, des lots de céréales, principalement de l'orge, élément de base de la nourriture. "C'était peu de chose, mais dans cet environnement où personne n'avait rien, nous avions quand même un peu plus que les autres," explique Abdellatif. Les temps étaient difficiles, et nous sommes en pleines années de plomb. Mais la famille fuit la politique comme la peste. Les gens « du commun » ne s'intéressent guère aux discours révolutionnaires des citadins. C'est à peine s'ils ont le temps de se consacrer à réunir les moyens de subsistance des leurs et de sortir de la misère environnante. Abdellatif est un élève brillant. Il porte les espoirs de sa famille. "Pour mes parents, il fallait que quelqu'un réussisse, seule possibilité pour sauver la famille. Pour eux, j'étais le porte drapeau, et il fallait que j'assume" se remémore-t-il, avec une émotion, à peine dissimulée. Il était manifestement nostalgique de cette époque où, pour lui, tout était tellement plus simple et où il fallait encore si peu pour vivre décemment. Le portrait complet est disponible dans le Challenge #442, actuellement chez votre marchand de journaux.