L'Algérie traverse une période de turbulence dans le secteur de l'éducation marquée par une série de mouvements sociaux lancés par les syndicats indépendants pour protester contre le nouveau statut général de l'éducation et le régime indemnitaire récemment adopté par le gouvernement. Le conflit a atteint son paroxysme les 17 et 18 février lors d'une grève nationale suivie par plusieurs syndicats, accompagnée de rassemblements devant les directions de l'éducation dans des villes majeures telles que Constantine, Oran, Tizi Ouzou et Laghouat. Ces manifestations, jugées pacifiques par leurs organisateurs, ont toutefois donné lieu à des interpellations, provoquant la colère des syndicats, qui y voient une atteinte aux droits constitutionnels. Un dialogue entravé par la question de la représentativité Au cœur des revendications figure le rejet du nouveau statut, perçu par les syndicats comme un texte décevant en contradiction avec les engagements officiels en faveur de l'amélioration des conditions professionnelles des enseignants. Ils dénoncent notamment l'absence de mesures structurelles concrètes et la mise en place de sanctions jugées «répressives». Par ailleurs, le gouvernement reste intransigeant sur l'application de la loi 23-02, qui conditionne le droit de grève à la représentativité syndicale, définie par un seuil de 25 % des effectifs concernés. Sur cette base, quatre syndicats, dont le Conseil national autonome du personnel enseignant du secondaire et du technique (Cnapeste), le Syndicat national des enseignants libres (Snapest), la Confédération nationale des travailleurs de l'éducation (CNTE) et la Coordination des lycées d'Algérie (CLA), ont été informés de leur non-représentativité. Cette décision a été perçue comme une tentative d'exclusion des voix dissidentes, alimentant la colère des syndicats, qui dénoncent un «détournement des critères de représentativité pour museler la contestation.» Revendications salariales et appel à la mobilisation Les syndicats exigent une révision en profondeur des compensations financières avec une augmentation des primes, la création de nouvelles grilles des indemnités et la prise en compte de l'effet rétroactif des revalorisations depuis janvier 2024. Ils réclament également la fin des sanctions jugées arbitraires et la reconnaissance pleine et entière des syndicats indépendants. Face à l'impasse, les organisations syndicales ont annoncé la poursuite des grèves hebdomadaires les mardis et mercredis jusqu'à satisfaction de leurs revendications. Un horizon incertain pour l'année scolaire Le bras de fer en cours laisse planer une incertitude sur l'issue de l'année scolaire. Le régime a, notamment, averti que toute grève menée par des syndicats non reconnus comme représentatifs constituerait une infraction passible de sanctions. Sur le plan politique, plusieurs formations, dont le Parti des travailleurs, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) et le Mouvement de la société pour la paix (MSP), ont exprimé leur soutien aux syndicats, appelant le gouvernement à une prise en charge sérieuse des doléances du corps enseignant. Avec plus d'un million de travailleurs, le secteur de l'éducation reste l'un des plus grands pourvoyeurs d'emplois en Algérie aux côtés des ministères de la défense et de l'intérieur, figurant parmi les postes budgétaires les plus importants du pays. Tandis que les négociations semblent piétiner, les regards se tournent vers le gouvernement dont la capacité à trouver une issue consensuelle sera déterminante pour éviter une paralysie prolongée du système éducatif et les répercussions sur l'avenir scolaire de millions d'élèves.