Dans ses dernières harangues, Abdel-ilah Benkiran, le secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD), a multiplié les saillies pro-iraniennes, dans le sillage des opérations militaires israéliennes à Gaza. Les déclarations du chef des islamistes surviennent alors que Rabat a rompu, depuis 2018, ses relations diplomatiques avec l'Iran, accusé d'avoir facilité des livraisons d'armes au Polisario à travers un «élément» à l'ambassade d'Iran à Alger et avec la compérage du Hezbollah, le groupe paramilitaire islamiste chiite libanais. D'après l'image sublimée que Benkiran dessine à ses fidèles, on croirait que l'Iran a fait décoller ses avions de chasse, déployer sa flotte et actionner ses missiles de croisière pour déclarer la guerre à Israël et venir au secours du peuple palestinien. Or tout ce que Téhéran a fait jusque-là, c'est de tirer des feux d'artifice, tout en communiquant l'heure et les coordonnées à ses amis occidentaux qui les ont, à leur tour, communiqués au pays censé être la cible des missiles de l'Achoura. «L'Iran a une aura, a pu frapper Israël et bafoué son honneur», a dit Benkiran lors d'une réunion du secrétariat général du PJD, tenue samedi 20 juillet. En plus clair, les pays arabes, y compris le Maroc, n'ont aucun poids et aucune considération, aux yeux de l'ancien chef de gouvernement, dont le parti était au pouvoir lorsque le Royaume a rompu ses relations avec l'Iran et signé l'accord tripartite avec les Etats-Unis et Israël. Peut-être, Abdel-ilah Benkiran, le sunnite, a oublié les atrocités innommables commises par les milices iraniennes en Irak, au Liban, en Syrie et au Yémen. Peut-être, il n'a pas vu les miliciens chiites forcer les sunnites à se mettre à genoux devant les portraits de Khamenei, Qassem Souleimani et Bachar Al-Assad. À l'exception de l'argent destiné au Hamas et au Jihad, quelle aide l'Iran a-t-il fourni aux Palestiniens ? L'Iran n'a jamais rien construit dans les territoires palestiniens occupés, ni école, ni hôpital, ni route, ni logements, ni quoi que ce soit. L'Iran n'a jamais acheminé de l'aide humanitaires aux populations meurtries, parce que ce n'est pas dans sa culture. Les Iraniens ne connaissent que le langage de la destruction des autres peuples, de préférence arabes. En revanche, beaucoup de pays arabes ont soutenu constamment les Palestiniens, pour la simple raison que c'est un devoir moral et religieux qui ne supporte aucune concession. Et pourtant, ils ne le crient pas sur le toit tous les jours, comme le fait l'Iran qui utilise la cause palestinienne comme une carte dans ses négociations avec les Occidentaux, ni plus ni moins. «Nous ne demandons pas à l'Egypte, au Maroc et à l'Arabie saoudite de faire comme l'Iran. N'ont-ils rien à offrir que des paroles et un peu de nourriture et de médicaments de temps à autre», s'est permis d'asséner l'ancien chef de gouvernement. Bizarrement, il avale toujours sa langue quand il s'agit du Qatar ou de la Turquie, par exemple. Apparemment, il a plus de considération pour ces derniers que pour son pays, le Maroc. L'Iran hostile au Maroc Il convient de rappeler à Benkiran que l'Egypte a sacrifié des centaines de milliers de ses enfants sur l'autel de la défense de la Palestine. L'Arabie saoudite, tout comme les Emirats, consacrent des milliards de dollars pour soutenir financièrement l'Autorité nationale palestinienne et les projets de développement dans les territoires occupés. Quant au Maroc, Benkiran sait mieux que quiconque ce que le Royaume déploie pour aider les Palestiniens. Les comptes et le bilan des actions du Comité Al-Qods, que préside le roi Mohammed VI, atterrissent normalement sur le bureau du chef de gouvernement. S'il n'a pas eu accès à ces documents, il doit s'en prendre à ses anciens collaborateurs. Laissant de côté le soutien à la Palestine, qui, faut-il le rappeler encore une fois, est un devoir et une obligation acceptés volontairement par l'ensemble des Marocains, Abdelilah Benkirane ne doit pas ignorer la position hostile de l'Iran sur la question du Sahara, l'autre cause sacrée des Marocains. On commence par le dernier acte belliqueux des ayatollahs contre le Royaume. Cela ne remonte pas loin dans le temps. Cela s'est passé seulement en juin dernier. Devant le Comité C24 de l'ONU, l'Iran a confirmé son implication directe dans le conflit autour du Sahara, en exprimant ouvertement son soutien à la thèse des séparatistes. Le représentant iranien a réitéré l'appui de son pays à l'option de l'autodétermination du «peuple du Sahara» et plaidé pour l'accélération de ce processus. Ce n'est pas un article de presse, l'analyse d'un politologue ou une rumeur sur Internet. Donc, Benkirane ne peut contester les faits et prétendre que c'est de la propagande «sioniste» pour diviser la Oumma. Les autorités marocaines ont longtemps accusé l'Iran de prendre cause et fait pour le Polisario. Mais, ce n'était que de la propagande officielle pour Benkirane et ses frères, qui voient des complots partout. Après les propos clairs du représentant iranien, les frères de Benkirane n'ont plus le droit de mettre en doute les affirmations des diplomates marocains, à leur tête Nasser Bourita et Omar Hilale, Partout où il passe, l'Iran ne laisse derrière lui que destruction et chaos. Les sympathisants de Benkirane et les affidés des ayatollahs au Maroc sont appelés à réviser leur alignement automatique sur les positions de Téhéran, sauf s'ils ne sont pas concernés par les intérêts du pays où ils vivent. Fin 2021, le PJD, humilié lors des législatives, s'est choisi Abdel-ilah Benkiran comme chef avec plus de 80 % des voix, à l'issue d'un congrès extraordinaire réuni à Rabat, Depuis sa débâcle électorale et la démission collective de l'ancienne direction du parti, le PJD traverse des luttes intestines chroniques qui ont poussé la moitié de ses forces vives vers la sortie.