Emmanuel Macron est l'homme de toutes les contradictions. S'il affirme «ne pas croire» que «la guerre soit une réalité qui va survenir», entre le Maroc et l'Algérie, il reconnaît que la tension entre les deux pays est «réelle», laquelle devient «structurante du fait national et de la vie politique de part et d'autre.» Quelques jours après ces mots, le chef d'état-major algérien Saïd Chengriha a effectué une visite officielle en France, la première en dix-sept ans d'un patron de l'armée algérienne, à l'invitation de son homologue français Thierry Burkhard. Cette visite (que l'Elysée a voulue loin des médias) était destinée à en préparer une autre, celle du président algérien Abdelmadjid Tebboune prévue en mai. Le déplacement d'Emmanuel Macron à Rabat, annoncé pour «le premier trimestre» sans plus de précision, est plus compromis que jamais. Les industries françaises de défense jouent avec le feu L'Algérie a alloué pour 2023 plus de 22 milliards de dollars à la défense, un budget qui a plus que doublé par rapport à 2022, selon le projet de loi de finances adopté fin 2022 par l'Assemblée nationale. Cette hausse des fonds militaires survient dans un contexte de tensions persistantes avec le Maroc et la France le sait, et ne fait rien pour l'atténuer! D'après nos sources, Paris, affecté par la chute des prises de commandes algériennes ces dernières années, veut relancer ses exportations d'armement vers l'Algérie, «sachant, qu'en toute logique, ces investissements militaires seront destinés à être utilisés contre le Maroc, par une junte militaire belliciste», a-t-on dénoncé. L'éditocratie française, habituée à scruter les grandes signatures des contrats de vente dans le domaine militaire, continue de cibler le Maroc et ses intérêts stratégiques au lieu de s'attarder sur le danger de surarmer un régime de plus en plus autoritaire. Le «basculement structurel» de la France, sous Macron, qui privilégie l'Algérie (pour des raisons court-termistes) au détriment du Maroc survient alors que la présence française en Afrique connaît de sérieux revers. Emmanuel Macron, qui souhaite relancer plusieurs dossiers avec Alger, notamment le chantier mémoriel relatif à la guerre d'Algérie, les fournitures de gaz ou la coopération sécuritaire au Sahel, sait qu'il peut tout perdre face à un régime tentaculaire, imprévisible et qui carbure à la haine de la France. La France victime de ses illusions «Le rapprochement avec l'Algérie est une illusion totale d'Emmanuel Macron et de la diplomatie française. Nous sommes en train d'abîmer notre relation avec un partenaire fiable, le Maroc, au profit d'une planche pourrie, d'un régime algérien qui hait la France. C'est hallucinant de bêtise!» cingle le géopoliticien Aymeric Chauprade. Paris, qui navigue à vue, et qui déclare s'assurer toujours que les ventes militaires sont soumises à des contrôles stricts et que les matériels français sont purement défensifs, devra relire les rapports de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) sur l'Algérie et ceux des experts du Conseil des droits de l'homme des Nations unies. L'ONU a appelé la France à s'abstenir de fournir des armes susceptibles d'être utilisées dans des conflits majeurs, avertissant que la légalité des transferts d'armes par la France dans certaines régions du monde «reste discutable.» Troisième pays exportateur d'armes dans le monde après les Etats-Unis et la Russie, la France est régulièrement mise en cause, notamment par des ONG, pour ses ventes d'armement «peu éthiques.»