Alors que le Front de Salut national (FSN), une coalition de partis d'opposition en Tunisie dont fait partie la formation Ennahdha, a annoncé qu'il boycotterait les législatives prévues le 17 décembre pour remplacer le parlement dissous, les internautes tunisiens dénoncent de plus en plus un président dépassé par les événements. Les propos du président tunisien Kaïs Saïed tenus le 26 septembre 2022, lors de sa réunion avec la chef du gouvernement Najla Bouden, réclamant «la nécessité de réduire l'importation des produits dits de luxe», a donné lieu à une levée de bouclier par les internautes tunisiens dénonçant en force les décisions prises par le président tunisien. La toile tunisienne critique «l'aberration des recommandations présidentielles», désignant Kaïs Saïed comme «principal et unique responsable de la dégradation de la situation socioéconomique en Tunisie», étant donné que, selon la majorité écrasante, «la priorité devrait être donnée aux produits de première nécessité, lesquels, bien que subventionnés par l'Etat, demeurent inaccessibles et même introuvables.» Cela survient après que le maire d'une localité tunisienne a été placé en garde à vue le 26 septembre après le suicide d'un vendeur ambulant dont la balance a été saisie par les services municipaux. Selon les médias locaux, Mohamed Amine Dridi, 25 ans, s'est pendu samedi dans la localité de Mornag, à une quinzaine de km au sud de Tunis, 48 heures après la confiscation par des agents municipaux de la balance électronique dont il se servait pour peser les fruits et légumes qu'il vendait sur un étal. Par ailleurs, une partie non négligeable du web tunisien a qualifié ouvertement l'Etat de «défaillant» et d'«incompétent en matière de gestion des ressources vitales, en pleine crise». Elle ne cesse de dénoncer la politique «farfelue» de Kaïs Saïed, ce dernier feignant d'oublier que «les produits de luxe sont importés par des sociétés privées alors que les produits de première nécessité qui sont importés et subventionnés par un Etat, d'où le manque de devises.» Cette mobilisation accuse la tête du pouvoir tunisien de «corruption» et de «scandales» après des révélations portant sur la hausse des factures du palais présidentiel, au moment où le pays est frappé par de multiples pénuries depuis plusieurs semaines. Dimanche soir, des affrontements ont opposé des manifestants aux forces de l'ordre à Mornag, selon des médias locaux et des images diffusées sur les réseaux sociaux. Selon nos informations, des manifestants ont protesté contre la dégradation du font social, scandant des slogans dénonçant le chômage et la cherté de vie dans plusieurs localités, avant de brûler des pneus. Les policiers ont tiré du gaz lacrymogène pour les disperser. Bon nombre d'internautes tunisiens, illustrant leurs propos avec des images de pénurie alimentaire, ont fait implicitement le «parallèle avec la situation prévalant en Algérie», avant d'intensifié les appels au départ du président Kaïs Saïed «dépassé par la situation» qui serait «incompatible avec la Tunisie actuelle aspirant à la prospérité et à la modernité, bien loin des conflits régionaux», référence au rapprochement douteux avec Alger ainsi qu'à la réception de Brahim Ghali, le génocidaire symbole d'impunité. Ces dénonciations ayant également gagné les rues tunisiennes le 25 septembre, et dont les images inondent la toile, sous plusieurs hashtags anti- Kaïs Saïed témoignent clairement du « ras le bol » de la population tunisienne, exprimant ouvertement son aspiration à plus de droits, notamment les plus primaires, ainsi que sa volonté d'évincer Kaïs Saïed, ce dernier ayant «conduit la Tunisie vers une impasse, compte tenu de sa dérive autoritaire et de l'ingérence des pays étrangers dans la politique interne tunisienne à l'exemple de l'Algérie». Il est à noter que bon nombre d'usagers ont saisi l'occasion pour republier d'anciennes sorties médiatiques du président tunisien et soutenir que, «preuve à l'appui, Kaïs Saïed semble ne plus être apte à conduire le pays», d'où des appels à la chute du régime, voire au boycott des prochaines élections législatives prévues en décembre 2022, «expression démocratique du rejet du système en place.» Des ONG et l'opposition accusent les services de sécurité de recourir à des méthodes mettant à jour celles de l'Etat policier sous l'ancienne dictature, depuis que le président s'est arrogé les pleins pouvoirs en juillet 2021. Une autre manifestation contre la dégradation des conditions de vie, lors de laquelle des pneus ont été incendiés, a eu lieu dans la nuit de dimanche à lundi, dans le quartier populaire de Douar Hicher dans le nord de Tunis, ont rapporté des médias locaux.