Paris a annoncé en septembre 2021 la réduction du nombre de visas accordés à ces trois pays du Maghreb, dont le Maroc en raison de leur «refus» de délivrer les laissez-passer consulaires (LPC) nécessaires au retour des immigrés refoulés de France. Une vengeance immotivée devenue du chantage en règle. En matière de visa, le pouvoir d'appréciation des autorités consulaires françaises est devenu une épée de Damoclès. Les critères de refus n'étant pas fixés par la législation, les demandeurs de visa sont devenus très peu protégés contre les décisions arbitraires des consulats qui motivent leur refus avec des prétextes fallacieux. La demande de visa représente, pour les postulants, un investissement onéreux et risqué mais une manne financière pour les pouvoirs publics français. Les frais sont donc versés, que le visa soit accordé ou pas, et ils ne sont pas remboursés en cas de rejet de la demande. Et malgré les avertissements et les réserves des observateurs indépendants concernant les atteintes aux libertés individuelles qui peuvent découler de cette logique actuelle en matière de visa, les agissements actuels ne semblent pas prêt de s'arrêter. Visas délivrés au compte-gouttes ? Interrogé par Le Monde sur sa politique incompréhensible de quotas, le consulat général de France à Rabat a refusé de justifier pourquoi ses services rejettent une demande sur deux. «Les arbitrages se font de manière assez opaque, observe un conseiller des Français de l'étranger de la zone cité par Le Monde. Ce qui est certain, c'est qu'une fois les visas accordés aux catégories préservées, comme les étudiants et les chauffeurs routiers, qui ont besoin de visas de circulation, la portion restante est très réduite», a-t-il révélé. Selon une autre source, les autorités consulaires, obligées de motiver leurs refus, n'auraient d'autre choix que de «mettre en attente les "bons" dossiers jusqu'à ce qu'ils en trouvent à refuser». «Pour faire le chiffre, il n'y a plus de tolérance dans l'examen des demandes : au moindre justificatif manquant, c'est le refus», dit au journal M'jid El Guerrab, député de la neuvième circonscription des Français de l'étranger : «Par exemple, il est désormais exigé une facture acquittée de l'hôtel, quand auparavant une simple confirmation de réservation suffisait.» L'instruction des demandes de visa est devenue très lente. Surtout, il est très difficile pour les demandeurs d'accéder à une information fiable sur la procédure ou la liste des pièces à fournir, surtout après les nouvelles restrictions françaises qui restent très opaques. «Depuis le début de l'année, un obstacle supplémentaire est venu se greffer en amont de la procédure : non seulement les chances d'obtenir un visa sont réduites, mais il est même devenu difficile – sinon impossible – de prendre un rendez-vous pour déposer une demande. La plate-forme TLScontact (du nom du prestataire à qui le consulat sous-traite le dépôt des dossiers) est saturée», précise Le Monde. Les Français du Maroc, eux, dénoncent un système «inadmissible, à l'encontre des valeurs d'égalité et de transparence». Le système actuel de TLS «renvoie une image désastreuse des services français», estime un conseiller consulaire : «En gros, les gens comprennent qu'il faut payer une sorte de bakchich pour y avoir accès !».