Le contrat de transit qui lie le Maroc et l'Algérie est arrivé à expiration le 31 octobre. Et si l'Algérie contourne désormais le royaume chérifien pour acheminer son gaz vers le Vieux Continent, cette décision, qui aura des conséquences inestimables sur l'Europe, est le fruit de contradictions inouïes. Interrogé lors de la conférence de presse qui a suivi l'annonce de la rupture des relations diplomatiques avec le Maroc, fin août, sur le gazoduc GME, le ministre algérien des affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a répondu qu'«il y a des considérations qui sont soumises aux traités internationaux» et que la décision «relève de la responsabilité de la société nationale Sonatrach et de ses partenaires». En marge de cela, un ancien haut responsable algérien a affirmé que «le ministre algérien des affaires étrangères a dit qu'il s'agissait d'un problème commercial. Il n'a pas voulu, à son niveau, politiser la vente du gaz naturel algérien que ce soit aux Espagnols, aux Marocains ou autres». Puis, coup de théâtre, fin octobre. Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a «ordonné» dimanche au groupe public Sonatrach de ne pas reconduire le contrat du gazoduc passant par le Maroc et alimentant l'Espagne en gaz, «au vu des pratiques à caractère hostile du royaume» voisin. Les livraisons de gaz algérien à l'Espagne se feront désormais exclusivement via le gazoduc sous-marin Medgaz lancé en 2011. Aucune cohérence avec le régime liberticide, qui sacrifie une rroute à bas coûts pour environ la moitié de ses exportations vers Espagne et Portugal. Un régime otage de ses contradictions et de ses antilogies, remonté depuis la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté marocaine sur le Sahara et l'éclatante opération de Guerguerat. Zéro homogénéité décisionnelle «Le président Abdelamadjid Tebboune a ordonné la cessation des relations commerciales entre Sonatrach et l'Office marocain de l'électricité et de l'eau potable (ONEE) et le non renouvellement de l'accord qui expire dimanche à minuit», selon un communiqué de la présidence diffusé par la télévision publique. Problème : le contrat a été signé entre l'ONEE marocain et l'Office marocain des hydrocarbures et des mines d'une part, et la Sonatrach d'autre part. Le patron de l'entreprise Toufik Hakkar aurait été mis devant le fait accompli ? La semaine dernière, la ministre espagnole de la Transition écologique chargée de l'Energie Teresa Ribera et le ministre algérien de l'Energie et des Mines Mohamed Arkab avaient annoncé que les livraisons de gaz algérien vers l'Espagne allaient être assurées via le gazoduc Medgaz et les complexes de conversion en gaz naturel liquéfié. Problème : contraintes techniques sur les livraisons, risque de hausse des prix, hiver dur : l'Espagne «se trouve dans une situation compliquée» souligne Gonzalo Escribano, expert en énergie à l'institut Elcano de Madrid. Le transport par méthaniers. «Ça peut être compliqué de trouver ce genre de bateau, surtout en ce moment, avec la forte demande de gaz en Asie», qui pousse les armateurs à choisir des «destinations plus rentables», ajoute cet expert. Ces derniers mois, les prix de l'énergie ont flambé, suivant le rythme des cours mondiaux. Le 1er novembre, plusieurs sources internationales ont fustigé l'Algérie, accusée d'utiliser le gaz comme arme économique, appelant l'Espagne à réduire sa dépendance à l'Algérie et à diversifier ses sources.