Donald Trump a demandé lundi aux sénateurs chargés de le juger pour «incitation à l'insurrection», de refermer immédiatement son procès qui, s'il a peu de chances de se conclure sur une condamnation, pourrait lui coûter cher en matière d'image. Les élus démocrates qui portent l'accusation ont immédiatement balayé une requête «futile», qui selon eux traduit les «efforts» de l'ex-président pour échapper à «sa responsabilité» dans l'assaut sur le Capitole le 6 janvier. À la veille d'un procès historique, les deux camps ont ferraillé par écrit, dans des argumentaires transmis au Sénat qui donne le ton des échanges à venir. Les avocats de Donald Trump semblent déterminés à s'en tenir à des débats juridiques. Pour eux, il ne peut pas être jugé dans le cadre de la procédure de destitution puisqu'il n'est plus au pouvoir. Plaider le contraire est «totalement ridicule», ont-ils argué. Me David Schoen et Bruce Castor ont donc demandé que les poursuites contre leur client soient immédiatement déclarées «nulles et non avenues». «Laisser libre cours à cette mise en scène politique serait un danger pour notre démocratie», ont-ils justifié. «La pire violation de la Constitution jamais commise par un président» Les procureurs démocrates, menés par l'élu de la Chambre des représentants Jamie Raskin, ont rapidement écarté une requête qui, selon eux, reflète l'absence «d'excuse ou de défense valable» de l'ancien président. Montrant qu'ils ne comptent pas se laisser enfermer dans ce débat, ils sont revenus au cœur de l'accusation : Donald Trump s'est livré «à la pire violation de la Constitution jamais commise par un président américain» et les preuves contre lui sont «accablantes», ont-ils assené. Les deux parties se retrouveront face à face mardi pour un procès dont l'issue fait peu de doutes. La Constitution impose une majorité des deux tiers pour un verdict de culpabilité. Or, le Sénat compte cent élus et 45 sénateurs républicains ont déjà fait savoir qu'ils ne se considéraient pas compétents pour juger «un simple citoyen». Il y a un an, le Sénat avait déjà acquitté Donald Trump jugé pour «abus de pouvoir» parce qu'il avait demandé à l'Ukraine d'enquêter sur son rival Joe Biden. Cette fois, il est accusé d'avoir «incité» ses partisans à envahir le siège du Congrès, au moment où les élus certifiaient la victoire du démocrate à la présidentielle. Juste avant l'assaut, il les avait appelés à «montrer de la force». Une semaine plus tard, et alors qu'il lui restait seulement six jours à la Maison-Blanche, il était mis en accusation une seconde fois par la Chambre des représentants à majorité démocrate, ce qui n'était arrivé à aucun président avant lui. «C'est une mascarade», «il y n'a aucune chance qu'il soit condamné», a critiqué le sénateur républicain Rand Paul. «La seule question, c'est : vont-ils convoquer des témoins ? Combien de temps ça va durer ?», a renchéri son confrère Lindsey Graham. Ces questions logistiques seront réglées mardi. Le procès doit débuter à 13 h et la première mission des sénateurs sera de se mettre d'accord sur le déroulement des audiences. Normalement les débats doivent avoir lieu tous les après-midi de lundi à samedi, mais David Schoen, un juif pratiquant, a demandé de pouvoir respecter le shabbat. «Laisser le Sénat gérer» Républicains et démocrates semblent d'accord pour avancer au pas de charge, les premiers parce qu'ils ne veulent pas s'attarder sur une séquence embarrassante, qui divise leurs rangs ; les seconds parce qu'ils veulent se concentrer sur leur priorité : approuver les candidats et les lois de Joe Biden. Le nouveau président, qui a promis de travailler pour réconcilier l'Amérique, s'est depuis le début gardé d'intervenir dans ce procès. Lundi encore, il s'est contenté de noter que son prédécesseur avait «été invité à témoigner et avait refusé». «On va laisser le Sénat gérer tout ça», a ajouté Joe Biden lors d'un bref échange avec la presse. «Il ne passera pas beaucoup de temps à regarder les audiences, voire pas du tout», a ajouté la porte-parole de la Maison-Blanche Jen Psaki. Les débats seront retransmis en direct dans tous les États-Unis. Les procureurs démocrates devraient en profiter pour tenter de marquer les esprits en utilisant notamment de nombreuses vidéos pour rappeler la violence de l'attaque. Cette stratégie pourrait être dommageable pour Donald Trump qui, à 74 ans, caresse l'idée d'une nouvelle candidature en 2024. Même s'il garde une base de fervents partisans, l'attaque sur le Capitole a érodé sa popularité. Selon un sondage Ipsos/ABC News publié dimanche, 56 % des Américains pensent qu'il faut condamner l'ex-président et lui interdire de se représenter. Mais plus de 80 % des républicains s'y opposent.