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Journée mondiale du donneur de sang : quatre questions au directeur du Centre national de transfusion sanguine et d'hématologie
Publié dans Barlamane le 14 - 06 - 2020

Dans un entretien accordé par l'agence publique, le médecin hématologiste et directeur du CNTSH, Mohamed Benajiba, revient sur l'état des lieux de la transfusion sanguine au Maroc dans le contexte marqué par la pandémie de Covid19, en insistant sur l'enjeu de sensibiliser les citoyens à la question du don de sang.
Présentez-nous le Centre national de transfusion sanguine et d'hématologie ?
Le CNTSH est une institution nationale rattachée au ministère de la Santé et chargée de la mise en œuvre de la politique nationale en matière de transfusion sanguine et d'hémovigilance. Avec pour première mission l'organisation de la politique transfusionnelle du Royaume et la promotion du don de sang, le CNTSH se charge également de former le personnel médical et paramédical en transfusion sanguine, d'améliorer, de mettre au point et de diffuser les techniques transfusionnelles, ainsi que d'assurer la qualité et la sécurité transfusionnelle. D'autre part, nous assurons au niveau du CNTSH l'inspection et l'audit de ces centres de transfusion à travers le Royaume.
Quid de la situation du don de sang au Maroc ?
Aujourd'hui nous sommes relativement satisfaits d'un certain nombre d'objectifs que nous avons réussi à atteindre. Je cite à juste titre l'augmentation croissante du nombre de donneurs depuis pratiquement une dizaine d'années. Cette augmentation je pourrai la qualifier de spectaculaire avec une moyenne annuelle de 7%.
Néanmoins les besoins en cette matière vitale augmente plus vite que le don. Je pourrai donner une explication à ce phénomène par le développement immense des prestations de santé au niveau national. Pour vous donner un exemple, il y a une dizaine d'années, le cancéreux qui reste le premier consommateur de sang n'avait pas accès au traitement, alors qu'actuellement près de 85% des malades en ont accès. Les greffes de cellules souches se sont également développées au Maroc induisant ainsi un besoin en sang important. De façon générale, sans citer tous les exemples, un certain nombre de traitements médicaux sont développées ces dernières années.
Actuellement nous sommes à 0,99% en termes de pourcentage de dons par rapport à la population totale, un chiffre en apparence faible mais que nous avons fixé comme objectif il y a près d'une dizaine d'années lorsque nous étions à 0,65%, pour répondre à l'objectif de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) qui recommande un pourcentage de 1%. Ce qui est très important c'est que parmi 0,99% de la population donneuse , 93% sont des donneurs volontaires et 7% sont des donneurs de compensation (don effectué par l'entourage d'un receveur).
En termes de qualification, nous utilisons des moyens sophistiqués pour qualifier le sang grâce à des automates mis en place partout dans les centres de transfusion ainsi qu'une une application numérique qui s'occupe de la gestion du sang disponible au niveau national, ce qui représente une avancée révolutionnaire en la matière. Dorénavant ce n'est plus l'Homme qui gère le sang dans les centres de transfusion mais bien l'automate, car c'est lui qui fait le groupage, la sérologie, lit le résultat et livre les poches de sang.
Nous pouvons dire à cet effet que nous avons atteint un haut niveau de sécurité transfusionnelle au Maroc, pratiquement identique à celle des pays développés, surtout que le Centre régional de transfusion sanguine de Rabat a été certifié ISO 9001, en tant que premier service de santé certifié ISO. D'ici 2021 nous avons pour objectif de décrocher cette certification pour tous nos centres de transfusion à l'échelle nationale.
Quel est l'impact de la crise du Coronavirus sur le don de sang au Maroc ?
La crise du Coronavirus (Covid-19) a impacté le monde entier de par son imprévisibilité, et il faut dire que le monde d'avant crise ne sera pas le même que celui d'après, et cela s'appliquera pour le système de santé dans son intégralité y compris pour ce qui est de la transfusion. Lorsque le premier cas a été déclaré au Maroc, nous avions le souci de la pénurie de sang.
A la date du 18 mars, nous n'avions enregistré que 200 donneurs contre quelque 1.000 bienfaiteurs quotidiens en temps normal, c'est la raison pour laquelle nous avons lancé un appel à travers les médias aux institutions nationales et aux citoyens. Un appel qui a été favorablement accueilli notamment par la société civile qui s'est mobilisée pour renflouer les stocks au niveau de toutes les villes du Royaume.
Bien que la crise de la Covid-19 ne devrait pas empêcher les citoyens de continuer à faire des dons, les mesures restrictives liées au confinement ont impacté de moitié le don du sang au Maroc. Fort heureusement que la consommation en sang a également diminué du fait qu'il y a eu moins de blessés graves dans les urgences et que les interventions chirurgicales non urgentes ont été reportées. Heureusement encore qu'un certain nombre d'institutions se sont mobilisés pour compenser le déficit, ce qui nous a permis de satisfaire pratiquement tous les demandeurs pendant cette période de pandémie.
Quel est votre message aux donneurs à l'occasion du 14 juin ?
Tout d'abord je souhaite rendre un vibrant hommage à cette population de citoyens qui ont le souci de penser aux malades qui attendent leur poche de sang pour survivre.
Mon message de sensibilisation est éternel, nous ne pouvons réaliser l'enjeu de satisfaire tous les demandeurs de sang, dont le nombre ne cesse de croître, qu'à travers une fidélisation du donneur de sang. Notre principal défi reste de convaincre le donneur de revenir. La donation ne devrait pas être un acte temporaire et occasionnel, mais devrait s'inscrire dans la durée, d'autant plus qu'un homme peut faire jusqu'à 4 à 5 dons par an et la femme jusqu'à 3 dons.
Sur le plan de la sécurité, nous sommes bien logés, mais je souhaiterai à attirer l'attention des donneurs sur la nécessité de diversifier leurs dons. Il ne faut pas se contenter de promouvoir uniquement le don de sang total, il y a d'autres types de dons qui représentent un défi chez nous à l'instar du don de plaquettes et du don de plasma entre autres. Il faudrait également promouvoir et développer ceux-ci pour répondre à tous les besoins de tous les malades. C'est à travers cette vision que nous réussirons à satisfaire tous les demandeurs de sang et sauver davantage de vies.


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