Lors d'un émouvant concert en ligne, des artistes algériens, la plupart issus de la diaspora, ont manifesté samedi leur soutien aux prisonniers du « Hirak », le mouvement populaire antirégime, et dénoncé les atteintes à la liberté d'expression en Algérie. « Je chante pour les détenus, pour (Karim) Tabbou, (Khaled) Drareni et tous les autres. J'espère qu'on vous reverra libres très bientôt », a lancé le rockeur gnawi Cheikh Sidi Bémol, en hommage à deux figures emblématiques de la contestation, debout devant son micro, guitare électrique en main. Sous le nom de « Songs of Freedom » (Chants de liberté), était organisé par Free Algeria, une coordination de collectifs de la diaspora disséminés en France, aux Etats-Unis, en Suisse, en Belgique, en Italie ou en Autriche. La compilation de vidéos amateurs a été diffusée « live » dans la soirée sur YouTube et plusieurs pages Facebook, à quelques heures de l'Aïd El-Fitr, la fête qui marque la fin du mois de jeûne musulman du ramadan. Pendant près de deux heures, plus d'une vingtaine d'artistes se sont succédé en ligne, adressant des messages de solidarité aux militants, activistes, journalistes et internautes emprisonnés. Selon le dernier comptage du Comité national pour la libération des détenus (CNLD), une association de soutien aux prisonniers, « près de 50 détenus d'opinion et politiques sont toujours dans les geôles du pouvoir ». Les organisateurs de cettte initiative ont recueilli, outre le soutien des artistes, celui de plusieurs médias comme Radio Corona Internationale, Wesh Derna, Berbère TV et L'Avant-Garde, « site d'information des luttes progressistes » récemment censuré en Algérie. En dépit de l'arrêt forcé des manifestations du « Hirak » depuis la mi-mars, à cause de l'épidémie de Covid-19, la répression continue de s'abattre sur des opposants politiques, des journalistes, des médias indépendants et des internautes. Quinze militants ont été condamnés cette semaine à des peines de prison ferme, dont trois pour leurs publications sur les réseaux sociaux. Né en février 2019 d'un immense ras-le-bol des Algériens, le « Hirak » réclame un changement du « système » en place depuis l'indépendance du pays en 1962. En vain, jusqu'à présent, même s'il a obtenu en avril 2019 le départ du président Abdelaziz Bouteflika après 20 ans de règne.