Un projet de loi de finances rectificative sera élaboré dans les prochains jours, a annoncé hier le Chef du gouvernement devant les deux Chambres du Parlement. Une Loi de Finances rectificative a déjà été revendiquée par de nombreux parlementaires et économistes pour la bonne raison que les hypothèses de la loi de Finances 2020 sont devenues caduques. Tout d'abord, la crise épidémique, engendrée par la prolifération du coronavirus, a eu des conséquences négatives sur l'économie mondiale, notamment nationale, au premier trimestre de 2020. Plusieurs entreprises sont à l'arrêt, les cours de la bourse plongent puis remontent timidement. La chaîne d'approvisionnement est aussi grippée. Ensuite, l'économie nationale n'aura droit qu'à un modeste rebond en 2020. Et seulement si elle parvient à éviter les nombreux pièges qui se dresseront sur son chemin. Les cieux n'ont pas été très généreux cette année et les conditions actuelles suggèrent que nous sommes en trajectoire pour la plus faible croissance en deux décennies. Par conséquent, le niveau de croissance économique ne peut qu'être revu à la baisse. Ainsi, la prévision de 3,7% retenue dans la loi de finances n'est plus d'actualité. Rappelons qu'il s'agit d'un objectif fondé sur l'hypothèse d'une récolte céréalière de 70 millions de quintaux, un cours moyen de pétrole à 67 dollars le baril et un prix moyen du gaz butane à 350 dollars la tonne. L'année 2020 sera ainsi très difficile sur le plan économique. De plus, le Maroc continue à capter moins d'investissements étrangers sur son territoire. En outre, les transferts des MRE continuent de baisser et les secteurs du tourisme et de l'export paieront un lourd tribut dans cette crise sanitaire du covid-19. Soulignons que lors de son intervention à la Chambre des Conseillers ce mardi, le ministre de l'Economie, Mohammed Benchaâboun, a indiqué que sur les quatre premiers mois de l'année 2020, les exportations ont baissé de 61,5%, les importations ont reculé de 37,6% et les recettes des MRE ont reculé de 11%. Le Maroc est aujourd'hui appelé à jouer le tout pour le tout pour faire repartir sa croissance qui est, à l'heure actuelle, au bord de l'asphyxie. Une loi de Finances rectificative serait ainsi le maître-mot et la condition sine qua non pour rectifier le tir au niveau des dépenses ordinaires et de dépenses d'investissement et de financement de l'économie nationale. En effet, le budget voté dans la Loi de Finances 2020 ne sera pas en mesure de répondre aux déséquilibres provoqués par l'impact économique du coronavirus. Il faudra, dans ce cadre, rééquilibrer les dépenses vers les grandes oubliées qu'ont toujours été, à savoir la Santé et l'Education. Il faut désormais abandonner l'orthodoxie budgétaire et monétaire, lâcher le déficit budgétaire et se défaire de la règle très contraignante des 3%, imposée par le FMI. Cette Loi de Finances rectificative doit définir les moyens à investir pour faire face aux exigences du moment. Il faut aussi réhabiliter les services de l'Etat. Une sortie de crise passe inéluctablement par l'Etat qui doit activer son outil de politique budgétaire. De plus, la réhabilitation des services de l'Etat passera par le déficit budgétaire. Un déficit qu'il faut programmer et non subir. Ce déficit budgétaire doit être utilisé dans des dépenses qui ont un fort impact d'entraînement dans l'économie : ces nouvelles dépenses doivent être orientées vers une nouvelle affectation, là où se trouvent les besoins du plus grand nombre, à savoir la santé, l'éducation, le monde rural et la protection sociale.