Abir Moussi, chantre de l'ancien régime du dictateur déchu Zine el Abidine Ben Ali, qui prône l'exclusion des islamistes dont ceux d'Ennahdha au pouvoir, est l'une des deux seules femmes candidates à la présidentielle anticipée en Tunisie. Sous Ben Ali, Abir Moussi était Secrétaire générale adjointe chargée de la Femme au sein du parti présidentiel RCD (Rassemblement constitutionnel démocratique), dissous en mars 2011. Elle fut l'avocate qui assura, sous les quolibets, la défense du RCD lors du procès de sa dissolution mené dans la foulée de la révolution qui chassa le dictateur. Ces cinq dernières années, elle a continué à plaider avec pugnacité pour l'ancien régime dans nombre de débats politiques télévisés. Certains voient en elle une femme de conviction courageuse, qui défend sans revirement ses opinions. D'autres lui reprochent un discours de haine et d'exclusion divisant les Tunisiens, dont plusieurs centaines de milliers ont voté pour Ennahdha aux dernières élections. Lors de ses visites dans l'intérieur du pays, elle a été à plusieurs reprises la cible d'insultes et de jets de pierres. A 45 ans, elle préside le Parti destourien libre (PDL), qui se présente comme « pragmatique » et « opposé à l'islam politique ». Son programme propose une nouvelle Constitution, donnant notamment au président le pouvoir de désigner le Premier ministre, actuellement choisi par le Parlement. « Nous voulons un Etat fort », a-t-elle expliqué à des journalistes récemment. « La liberté d'expression cache un échec économique », a-t-elle déploré. Le soulèvement ayant chassé Ben Ali n'était pas « une révolution mais un mouvement social instrumentalisé à des fins politiques », a affirmé la candidate, en évoquant l'ingérence de pays étrangers. Son parti réclame que la justice dissolve Ennahdha dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, estimant que le parti d'inspiration islamiste est responsable de l'essor du jihadisme qui a suivi la révolution, ou encore d'assassinats politiques. Rejetant l'étiquette de populiste, elle déclare avoir pour référence le père de l'indépendance, Habib Bourguiba, qui se prévalait notamment d'avoir promu les droits des femmes. Elle se dit « favorable à titre personnel » à l'égalité entre hommes et femmes en matière d'héritage, mais elle estime qu' »en tant que femme d'Etat, (elle) doit écouter le peuple tunisien », très divisé sur le sujet car cela remet en cause des principes issus du Coran. En 2018, une association de soutien aux personnes homosexuelles, ADHEOS, l'avait qualifiée d' »extrémiste » en raison de propos proférés sur une chaine de télévision locale. Selon cette ONG, Abir Moussi avait appelé à emprisonner systématiquement les homosexuels en Tunisie. L'autre candidate à la présidentielle est une femme d'affaires de 63 ans, Salma Elloumi, qui fut ministre du Tourisme de 2015 à 2018. Issue d'une grande famille tunisienne, elle avait soutenu le président Béji Caïd Essebsi, dont elle avait été nommée directrice de cabinet fin 2018, six mois avant son décès.