Les très petites, petites et moyennes entreprises (TPME) représentent 95% du tissu entrepreneurial marocain et occupent plus de 50% du tissu salarial. Il est donc évident que ces entreprises jouent un rôle primordial aux niveaux du développement social et du développement économique. Jusqu'ici les chiffres sont encourageants. Pourtant, si les TPME constituent plus de 90 % du tissu industriel et qu'elles contribuent à environ 40 % de la production, elles ne produisent que 10 % de la valeur ajoutée, ce qui influe considérablement sur la croissance économique du Maroc. Et pour cause, les TPME et les entrepreneurs font face à de nombreuses contraintes, que ce soit à la création, ou pendant leur développement, notamment des procédures administratives lourdes et dépassées, l'insécurité juridique et judiciaire, l'accès aux marchés publics qui est difficile et risqué pour les PME, et surtout des difficultés de financement, puisque les taux et les conditions de crédits exigées par les banques sont si draconiennes qu'elles en deviennent dissuasives, entre autres. Depuis 2014, différentes mesures sont en chantier dans le cadre de la promotion des TPME et ce, conformément à une vision royale consciente de l'importance des TPME dans le tissu économique. Entre 2014 et 2018, Maroc PME a annoncé avoir mobilisé un budget global de 7,1 milliards de dhs pour l'accompagnement de près 8.900 TPME. Des chiffres qui témoignent d'une évolution certes, mais les problèmes sont structurels et beaucoup plus profonds. En effet, si la majorité des entreprises sont de petites tailles, 90% d'entre elles fonctionnent encore à moins de 10 emplois dont emplois à 65% est de la main-d'œuvre. La productivité est donc limitée, le chiffre d'affaires également, et ainsi les répercussions sur l'économie du pays se font infimes. L'une des premières mesures prises par le ministre des Finances, Mohamed Benchaâboun concernait de nouveaux mécanismes de financement dédiés aux PME et TPE. « Nos PME sont sous-capitalisées et ne disposent pas, dans leur majorité, d'outils de gouvernance leur permettant de gagner en compétitivité et en performance», estimait le ministre en début de mandat. Dans une feuille de route dédiée au projet de loi de Finances 2020 (PLF-2020), Saâdeddine El Othmani plaçait la dynamisation de l'investissement et du soutien de l'entreprise parmi les priorités du PLF 2020, suivant les directives parues dans les deux derniers discours royaux. Le Roi Mohammed VI avait présenté les TPME comme un véritable moteur croissance et de création d'emploi. Le PLF-2020 met place l'entreprise parmi ses priorités et stipule une série de mesures en sa faveur, notamment l'appui aux TPME via la poursuite des efforts visant à assainir la dette de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) cumulée durant ces dernières années, l'accélération des délais de récupération de cette taxe, la réduction des délais de paiement et l'amélioration de l'accès au financement. En effet, Benchaâboun a, depuis 2017, prévu le remboursement de cette TVA. L'Etat devra s'acquitter de 40 milliards de dhs, qu'il réinjectera dans l'économie du pays. Cette somme est infime pour les grands contribuables et entreprises publiques, mais elle représente une véritable ressource pour les TPME. La note d'orientation précise également que cette promotion se fera à travers plusieurs mécanismes d'appui de l'investissement public et la promotion de l'investissement privé national et étranger à travers la poursuite de la mise en œuvre des réformes institutionnelles visant à améliorer le climat des affaires, l'efficacité des administrations et établissements publics, la facilitation des procédures et l'adoption de la nouvelle charte de l'investissement. En avril 2019, la banque centrale, la CGEM et le Groupement professionnel des Banques du Maroc (GPBM) avait adopté plusieurs mesures d'encouragement aux TPME, en permettant notamment aux coopératives et auto-entrepreneurs de participer aux marchés publics et en réformant les Centres Régionaux d'Investissements (CRI). Dans son discours de la Fête du Trône en 2018, le Roi Mohammed VI avait tancé les responsables vu le blocage de cette réforme à cause de divergences gouvernementales. Il suffisait qu'un membre du conseil d'administration ne soit pas d'accord pour bloquer le processus de réforme. Le Roi avait alors annulé la règle d'unanimité et depuis, les décisions se font désormais à majorité. Cette réforme des CRI permettra aux entrepreneurs de bénéficier de procédures beaucoup plus simplifiées et décentralisées, les encourageant ainsi à créer leur entreprise plus facilement. Lors de son dernier discours du Trône, le Roi Mohammed VI a insisté sur l'importance de la formation professionnelle dans la promotion du tissu des TPME. En effet, les entrepreneurs équipés d'un savoir-faire seront beaucoup plus enclins à créer leur propre entreprise dans le secteur privé, aujourd'hui que le secteur public est dans l'incapacité d'employer tous les demandeurs d'emplois. Cet encouragement à la formation professionnelle démontre que l'avenir est à l'auto-entrepreneuriat. D'ailleurs, cette orientation est de mise dans plusieurs pays occidentaux à forte croissance économique, notamment la France, l'Espagne, les USA et plusieurs pays scandinaves. Question financement, on pense surtout au crédit Jeunes Promoteurs lancé dans les années 80. Si ce dernier s'est soldé par un fiasco, il semblerait que les banques n'aient pas appris de cette expérience. Bien que les banques proposent encore aujourd'hui des formules de crédits destinées aux jeunes entrepreneurs, leurs conditions ne sont guère encourageantes. Les dossiers refusés sont plus nombreux que les dossiers acceptés, les taux d'endettement ne sont pas encourageants ou préférentiels, et les pièces demandées de garantie sont rédhibitoires. L'entrepreneur se heurte à la réalité d'une situation draconienne d'obtention de financement, alors que les banques véhiculent un marketing alléchant. Pour l'instant, concernant les TPME, seul les actions de Maroc PME ont réellement porté leurs petits fruits. La plupart des chantiers de réformes sont encore des promesses qui traînent depuis plusieurs années, et qui font l'objet de blocages et de retards. Ces réformes sont donc à suivre, et il est encore tôt pour se prononcer sur leurs résultats.