L'appel au boycott des législatives n'a finalement pas été pris en compte. La réussite des conservateurs et la participation d'au moins 50 % des électeurs achève l'espoir des réformateurs. Les Iraniens ne sont pas au bout de leur peine. Balancés entre les réformateurs et les conservateurs, ils sont tantôt sollicités de boycotter les législatifs, tantôt assommés de respecter les règles du jeu. En tout cas, si le nombre de la participation restait flou au début, donnant un ainsi un mince espoir aux réformateurs qui ont appelé au boycott, il n'a pas tardé à se préciser. En effet, au fur et à mesure que le dépouillement s'achevait, on s'approchait des 50 % de participation, sachant qu'avec un corps électoral de 46,35 millions d'électeurs, il faut plus de 23 millions de votants pour atteindre ce pourcentage. Le nombre est certes inférieur à celui enregistré en 2000 et qui touchait 67,35 % mais il reste plus important que ne le souhaitent les réformateurs. Ces derniers s'indignaient quant à l'écartement de leurs principales personnalités de la compétition, les organes de contrôle conservateurs les ayant accusé de manquements à l'Islam et à la Constitution. «Lors d'élections parfaitement libres, saines et justes, le peuple iranien a déjoué le complot de ceux qui voulaient faire croire que le fossé se creuse entre le peuple et le régime islamique», a rappelé samedi le Guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei dans un message lu à la télévision. Ces élections ont dépassé le cadre national pour représenter, selon les conservateurs, «une balle tirée dans le cœur du président américain George W. Bush»; un porte-parole du département américain a déclaré que ce qui a précédé la consultation ne préparait pas «des élections libres et honnêtes», ni «compatibles avec les normes internationales». Le message du Guide suprême les confirmant dans cette croyance : «C'est le peuple iranien qui sort vainqueur de ces élections, et les Américains, les Sionistes et les ennemis de l'Iran perdants», a-t-il dit. De ces élections, les Iraniens ne retiendront pas seulement les débats et le remous politique où l'Iran a pataugé lors des préparatif mais aussi l'avènement d'une nouvelle génération de conservateurs. Il s'agit des « indépendants». En effet, de nombreux conservateurs se sont présentés sous une nouvelle étiquette. Ils veulent ainsi entretenir une nouvelle image qui les présentera dorénavant comme des pragmatiques dévoués à l'islam, s'élevant ainsi au dessus des querelles politiciennes. Or, cette nouvelle naissance complique les prévisions concernant la configuration de la nouvelle assemblée. Aussi le Majlis (Parlement), qui devrait, selon le Conseil des gardiens, ultra-conservateurs du régime, «défendre la religion sacrée de l'Islam, résoudre les problèmes de la population, encourager la spiritualité et la moralité dans la vie publique, combattre toutes les formes de corruption et de malfaisance et promouvoir le progrès», sera, selon le quotidien conservateur “Jam-e Jam” constitué de 157 députés élus, 108 sont des conservateurs, 25 des réformateurs et 24 des indépendants. Alors que les journaux conservateurs crient victoire, deux principaux quotidiens réformateurs restent absents des kiosques, après leur interdiction à la veille du scrutin.