Entretien. Miloud Labied s'exprime avec sincérité sur sa peintre et son attachement au présent. Aujourd'hui le Maroc :En vous renouvelant, vous avez signé un contrat avec le public ? Miloud Labied : Oui, mais le public marocain oublie beaucoup. Il ne voit que le travail d'aujourd'hui et s'aveugle sur celui du passé. Or le travail d'aujourd'hui n'est que l'aboutissement de celui d'hier. C'est très difficile de suivre le travail d'un peintre. Sur le plan philosophique, moi, je m'en fous d'hier, mais le public doit s'y intéresser. Ce qui m'intéresse, c'est aujourd'hui. Et demain, c'est un doute. Je ne sais pas ce que je vais faire demain, mais je sais ce que je fais aujourd'hui. Vous avez été proche au début du groupe de Casablanca… Non, Chabaâ, Belkahia et Melihi ne me connaissaient pas vraiment. Et comme j'étais proche de Jacqueline Brodskis à qui l'on reprochait de n'aimer que les peintres naïfs, cela n'a pas facilité les choses. Je dois dire au passage que cette accusation à l'égard de Mme Brodskis est infondée. Moi, je ne suis pas naïf. Ma peinture n'est pas naïve, du tout ! Certes, Mme Brodskis a aidé certains peintres naïfs, mais elle l'a fait avec sincérité et surtout en dehors de toute considération politique. Et de toute façon, la naïveté, on en a besoin de temps à autre. L'art a besoin d'un peu de naïveté pour rompre avec les calculs et les schémas préétablis. J'entends par naïveté l'enfance de l'art. Vous avez commencé par peindre des tableaux figuratifs. Oui, mais très peu de temps après, j'ai compris que ça ne mène à rien. J'ai cherché autre chose. Quand un peintre visite des musées européens, ils l'ouvrent sur autre chose. Il ne s'agit pas de copier ces peintres-là, mais ils vous poussent à trouver votre voie. Où je suis par rapport à ces hommes? Et moi la-dedans ? Et vous avez trouvé votre voie ? Je ne l'ai pas trouvée encore. Le jour où je trouverai ma voie, je m'arrêterais. Les gens ne suivent pas les étapes d'un artiste. Pendant toute ma vie, je ne me suis jamais complu dans un type de travail, j'ai toujours changé. Les personnes qui ignorent tout de la cohérence de mon travail disent: « il travaille à droite et à gauche. Tous les trois ans, il est quelque part ». Mais moi, je suis un chercheur, je cherche ! Le jour où je ne chercherai plus, je serai fini.