ALM : On vous entend souvent dire que le Conseil est à l'orée d'une deuxième vie et que l'autonomie, qu'elle soit administrative ou financière, pourrait en doper l'action et l'élargir. Comment ? Abdelali Benamour : Depuis l'audience et les orientations royales dont j'ai été honoré en 2011, la réforme du Conseil de la concurrence est devenue nécessaire. Ce jour-là, SM Mohammed VI a clairement ordonné la révision du cadre juridique régissant notre instance dans le sens de son autonomie. Je vous rappelle simplement que la mission du Conseil est le renforcement de l'Etat de droit dans les affaires, la mise à niveau de l'économie nationale, sa modernisation et le renforcement de sa compétitivité, l'attraction de l'IDE générateur de revenus et d'emplois, celui des jeunes en particulier… Tous objectifs qui imposent une certaine marge de manœuvre que l'ancien Conseil consultatif n'avait pas. Considérant donc le nouveau pouvoir exécutif du Conseil et l'élargissement de ses compétences décisionnaires, il est tout à fait indiqué de le doter des moyens nécessaires à l'accomplissement de son action. Et cela d'autant plus qu'il a été entre-temps constitutionnalisé. C'est dans cette perspective que nous avons déposé au Secrétariat général du gouvernement un projet de réforme conduisant à l'autonomie administrative et financière. Nous croyons savoir que presque toutes nos propositions ont été retenues. Et bien que l'agenda parlementaire soit particulièrement chargé, nous avons bon espoir de le voir aboutir durant le premier trimestre de l'année prochaine. L'élargissement des compétences dont vous parlez, il s'est fait dans quelle direction ? Il me semble que le fait que le Conseil ait reçu mission pour tout ce qui touche aux questions de concurrence est un pas décisif. Il peut en particulier mettre fin aux conflits de compétences toujours possibles du fait de l'éclatement du contrôle de la concurrence. En plus de cela, il y a la procédure de l'autosaisine qui ne nous permet pas d'intervenir nous-mêmes quand le besoin s'en fait sentir, et bien sûr, il ne faut pas oublier l'«avocaty» qui est bien plus qu'un plaidoyer, puisqu'il débouche sur une véritable dénonciation des pratiques contraires aux règles, dussent-elles être le fait du gouvernement lui-même. Fort de votre connaissance du marché de l'insuline, objet d'une étude du Conseil, pensez-vous que les ruptures de stocks auxquelles on assiste aujourd'hui soient dues à des transgressions des règles de la concurrence ? L'étude dont vous parlez est toujours en cours. Je ne puis par conséquent répondre à la question. Alors parlons des sanctions, si vous le voulez bien. Le niveau de répression qu'elles sous-tendent vous semble-t-il de nature à éviter la récidive ? Je l'espère. Ce qui est important de dire à ce sujet, c'est que nous avons toujours privilégié la sanction financière à la pénale. Nous sommes un arbitre, voyez-vous, et le rôle de l'arbitre n'est pas de fausser le jeu ou d'éliminer le joueur, mais de le réguler. C'est pourquoi nous n'envisageons la judiciarisation qu'en dernier des derniers recours. Nous préférons les amendes dont, du reste, nous avons fixé le seuil maximum à 10% du chiffre d'affaires.