Des marches ont été organisées, dimanche matin, dans plusieurs villes du Royaume, pour exprimer des revendications politiques, économiques et sociales. Tour d'horizon dans les principales villes du pays. Dimanche 20 mars, des milliers de citoyens ont manifesté pacifiquement pour revendiquer des réformes. Encadrées par les jeunes du Mouvement du 20 février dans certaines villes, et par une majorité de militants islamistes, dans d'autres, les manifestations ont connu la participation de plusieurs courants idéologiques qui vont de l'extrême droite à l'extrême gauche. A Casablanca, les manifestants ont défilé durant plus de deux heures tout en scandant des slogans exprimant leurs revendications politiques, sociales et économiques. A l'image de la marche du 20 février dernier dans la capitale économique, aucun incident n'a été enregistré lors de cette marche qui a démarré à 10h à la Place «Annasr» (La victoire) et a pris fin vers 13 h à la Place Nevada. Les citoyens ont fait entendre leurs voix dans le calme et la sérénité, avant de se disperser. D'autant plus que la présence des forces de l'ordre s'est faite discrète tout le long de l'itinéraire de la marche. Selon les organisateurs, plus de 10.000 personnes ont pris part à cette marche alors que les autorités locales ont fait état de 5000 à 6000 participants. «Le peuple veut la chute du despotisme», «Lydec dégage», «Non au despotisme, nous voulons une Constitution démocratique», «Dignité, liberté et justice sociale», «Abbas dégage», «Sajid dégage» et «Pour une Constitution qui incarne la volonté populaire». Pouvait-on lire dans les banderoles et entendre scander tout en choeur les manifestants. Des jeunes à bord d'une voiture munie d'amplificateurs sonores orchestraient les slogans prononcés par les manifestants. Les membres d'Al Adl Wal Ihssane, des jeunes barbus et des femmes voilées, visiblement très présents lors de cette marche, scandaient les mêmes slogans que les jeunes du 20 février et les socialistes du PSU et d'Annahj, ainsi que les militants associatifs. «Les jeunes considèrent que leurs revendications n'ont pas encore été réalisées. Il y a des promesses mais jusqu'à ce jour, elles restent vagues. La manière dont la révision de la Constitution sera opérée par une commission nommée est encore une autre Constitution octroyée et imposée au peuple. Nous voulons une commission indépendante constituée de juristes éminents et intègres», a indiqué à ALM, Mezzi Youssef, membre d'Attac Maroc et membre du Mouvement du 20 février. Et d'ajouter : «Nous avions privilégié lors du 20 février l'organisation d'un sit-in pour éviter tout dépassement sécuritaire ou actes de vandalisme préjudiciable au mouvement et au peuple, ses propriétés publiques ou privées. Aujourd'hui, le 20 mars, nous avons atteint un niveau de maturité qui nous permet d'organiser une marche d'une manière pacifique, civilisée, sans qu'il y ait des dérapages». A 10 h 45, les manifestants étaient arrivés à la Place 20 Août ,où ils ont tenu un bref sit-in tout en scandant les mêmes slogans. «Nous sommes descendus dans la rue pour revendiquer plus de justice sociale et économique entre toutes les composantes de la société marocaine. Nous voulons que la voix du peuple soit entendue au sein du gouvernement et du Parlement. Nous sommes pour une monarchie parlementaire démocratique. Nous ne voulons absolument pas qu'une IER soit mise en place une fois tous les dix ans. Nous voulons également mettre fin à toutes les manifestations de l'économie de rente comme nous voulons faire cesser tous les privilèges économiques dont profitent certains au détriment du peuple», précise Zakaria, un jeune barbu, membre du Mouvement Baraka. Bien que les leaders politiques des mouvements prenant part à cette marche, notamment Al Adl Wal Ihssane et les partis de gauche ont été absents lors de cette manifestation, des personnalités du monde de l'art et de la culture ont répondu présent. «Comme toutes les franges de la société marocaine, les artistes participent à cette marche que nous considérons exemplaire. Elle est pacifique et réunit, sous une même bannière, toutes les composantes de la société marocaine qui aspire au changement et à une accélération de la dynamique de réformes et de démocratisation pour que le Maroc soit un modèle dans les pays arabes», a souligné, pour sa part, Hassan Naffali, président du Syndicat national des professionnels de théâtre et président de la Coalition marocaine pour la culture et les arts. A 11h 05, les manifestants étaient devant le siège de la Confédération démocratique du travail (CDT), à l'heure où la marche prenait davantage d'ampleur. «Le gouvernement ne cesse de nous mentir et nous donner des promesses sans jamais agir. Que Dieu assiste notre Roi, il est le seul à œuvrer pour notre pays. Mais comme le dit le proverbe : Une seule main ne peut applaudir», a déclaré à ALM Mustapha, manifestant affilié à la CDT. «Je vis, depuis plusieurs années, dans des conditions précaires dans un bidonville à Ain Sbaâ. Le jour où j'ai tenté de dénoncer publiquement cette situation on m'a jeté en prison durant plus d'un mois. Je participe à cette marche pour dénoncer cela. Aussi, je scande des slogans contre le ministre Ghellab. Ce dernier figure parmi les personnes qui doivent partir. Le Code de la route qu'il a mis en place n'est nullement compatible avec la réalité marocaine», ajoute Nouri Massâoud, membre de l'AMDH. C'est à la Place Nevada que la marche a pris fin. Vers 12h 25, les organisateurs ont annoncé la fin de la manifestation tout en demandant aux participants de se disperser dans le calme. À Rabat, près de 1.500 marcheurs ont défilé, aux environs de 11h00, à partir de la Place Bab El Had, selon les autorités locales. Dans la ville de Fès, la marche a rassemblé, à la même heure, entre 300 et 400 personnes. A Oujda, un sit-in anniversaire à celui du 20 février devait être organisé à la Place du 16 Août 1953, à partir de 16h. Il est initié par le mouvement des jeunes du 20 février, section Oujda. Ce sit-in fait suite à plusieurs manifestations tenues à la même place depuis le 20 février et qui se sont déroulées dans un ordre parfait, grâce à la responsabilité des organisateurs et au professionnalisme des services de sécurité. Les protestataires exprimaient leur mécontentement à l'égard de la cherté de la vie et le chômage qui enregistre un des taux les plus élevés; mais aussi contre la mauvaise gestion municipale ou celle de plusieurs délégations ministérielles. Pour rappel, les jeunes du 20 février organisent ce sit-in en collaboration avec des représentants de la gauche unifiée, l'association des diplômés chômeurs, l'association de lutte contre la cherté de la vie. Il est à signaler par ailleurs que les sympathisants d'Al Adl Wal Ihssane devont participer aussi à cette manifestation. Précisons que cette manifestation n'est pas autorisée et elle n'est pas la première puisque samedi 19 mars, un autre sit-in organisé, cette fois ci, par l'association « Jeunesse pour la paix» n'a pas été autorisé à la Place «Ziri Ben Atiya». Mais malgré l'interdiction, le sit-in a eu lieu et s'est déroulé dans un ordre exemplaire. Ladite association avait animé, le même jour, un débat pour expliciter et débattre le discours royal du 9 mars. «Un discours qui constitue une révolution pour la consolidation de la démocratie locale et la consolidation de l'apport de notre pays sur la scène régionale et internationale», avait expliqué l'animateur du débat, le professeur Abdelhaq Janati. A Agadir, la journée du 20 mars a été marquée par un grand calme. Aucune manifestation n'a eu lieu. Par ailleurs, quelque 2000 personnes se sont regroupées à Inzegane,vers 10 h du matin avant de se rassembler sur la Place «Bir Anzarane» à Dcheira. Les manifestations étaient pacifiques et aucune intervention policière n'a été enregistrée. A Tanger, la wilaya a accordé son autorisation pour une manifestation suite à une réunion ayant eu lieu entre le secrétaire général Mustapha El Ghannouchi et des représentants de la coordination locale du soutien au mouvement des jeunes du 20 février dont Abdelmounaïm Rifaï, Ayman El Merzouki et Jamal El Asri. Cette marche a démarré vers 14 h du quartier Béni Makada (en face du cinéma Tarik) pour sillonner plusieurs avenues dont Mly Soulaymane, rue de Fès et la place Sidi Mohamed Ben Abdellah. Cette marche est autorisée à prendre fin à 16 h 30 à la Place Oued à Aïn Ktiouet. Il est à rappeler que la réunion entre M. El Ghannouchi et des représentants de la coordination locale vient après la rencontre, qui avait eu lieu entre le wali de la région Tanger- Tétouan, Mohamed Hassad et la presse. Ladite rencontre s'assignait pour objectif principal d'informer l'opinion publique sur les raisons pour lesquelles les autorités locales avaient refusé «les rassemblements du 6 mars et l'interdiction de la manifestation éventuelle du 20 mars». Et de faire remarquer que les initiateurs ne prennent pas la précaution de faire une demande ou même d'informer les autorités sur la programmation et les modalités pratiques de ces manifestations, «le choix des lieux de manifestations dénote d'un état d'esprit, qui vise à porter atteinte délibérément à la quiétude et aux biens des citoyens».