Amina Bouayach affirme que les instances internationales relevant de l'ONU doivent intervenir pour stopper les violations flagrantes des droits de l'Homme dans les camps de Tindouf. ALM : Vous comptez effectuer une visite dans les camps de Tindouf pour rencontrer les détenus politiques du groupe Balouh Ahmed Hamou. Qu'est-ce qui justifie votre démarche ? Amina Bouayach : Il s'agit d'une initiative humanitaire pour venir en aide à des citoyens en danger. En réalité, c'est la famille du détenu politique au secret Balouh Ahmed Hamou qui nous a contacté pour solliciter l'intervention de notre organisation. C'est ainsi que nous avons décidé d'adresser une lettre à l'ambassade d'Alger à Rabat, lui demandant l'autorisation pour se rendre aux camps de Tindouf pour s'enquérir des conditions de détention des détenus politiques. Selon la famille du détenu Ahmed Hamou, leur fils a été interpellé par le Polisario pour avoir exprimé une opinion politique. En fait, il a affiché publiquement son opposition aux dirigeants du Polisario. Il aurait également évoqué le problème du détournement des aides humanitaires. Plusieurs rapports ne cessent de mettre l'accent sur ce problème. Aujourd'hui, M. Ahmed Hamou poursuit, selon sa famille, sa grève de la faim et son état de santé s'est gravement détérioré. Il souffre énormément, d'après la même source, de troubles digestifs inquiétants. En plus, le détenu politique sera traduit devant le tribunal militaire. Ainsi, étant une association de défense des droits de l'Homme, le cas de Balouh nous interpelle. Pensez-vous que l'Algérie va accepter votre demande ? Franchement, nous ne savons pas quel est le traitement qui sera réservé à notre demande par les autorités algériennes. Certes, l'Algérie, étant un Etat qui exerce pleinement sa souveraineté sur son territoire, se réserve le droit d'accepter ou non notre demande. Mais espérons qu'elle l'acceptera. Car nous sommes une organisation de défense des droits de l'Homme connue pour sa crédibilité et sa neutralité et qui a son mot à dire auprès de la communauté internationale. En plus, notre initiative humanitaire ne traduit pas une position politique. Nous comptons juste nous enquérir de l'état de santé d'un citoyen et lui apporter par la même l'aide nécessaire. L'OMDH en tant qu'organe national qui milite pour les droits de l'Homme a-t-elle la possibilité d'étendre sa compétence territoriale à d'autres Etats ? Bien évidemment. D'ailleurs, il y a des organisations de défense des droits de l'Homme qui se rendent parfois aux camps de Tindouf pour s'enquérir des conditions de vie de la population dans les camps. Ainsi, tant que nous sommes habilités à exercer notre mission dans le cadre du territoire national, nous avons le droit de visiter d'autres endroits. Nous allons, en plus, adresser une lettre au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour solliciter son intervention, étant un organisme international qui contrôle le respect des droits de l'Homme partout dans le monde et qui est ainsi obligé d'accomplir son devoir d'assistance. En dehors du cas du détenu politique Ahmed Hamou, avez-vous pris connaissance d'autres cas de détenus politiques dans les camps de Tindouf ? Il y a plusieurs cas de détenus politiques dans les camps de Tindouf. Toutefois, nous n'avons pas des données suffisantes sur ces cas en raison notamment du siège imposé par le Polisario sur les informations. Dans le cas de Balouh Ahmed Hamou, nous avons décidé d'intervenir parce que nous avons tous les éléments nécessaires sur cette affaire. C'est ce qui prouve d'ailleurs notre crédibilité. L'OMDH n'a pas la possibilité de traiter tous les cas. Ce sont les instances internationales relevant de l'Organisation des Nations Unies qui doivent intervenir pour mettre la lumière sur tous les cas et stopper les violations flagrantes des droits de l'Homme dans les camps de Tindouf. Quel commentaire faites-vous de la situation des droits de l'Homme dans les camps de Tindouf ? D'après les informations qui nous parviennent, des violations flagrantes des droits de l'Homme persistent dans les camps de Tindouf. Ainsi si au Maroc nous avons la possibilité de traiter toutes les violations qui peuvent avoir lieu à travers des rapports périodiques et des poursuites des responsables, dans les camps de Tindouf il n'y a nullement cette possibilité. Les médias sont contrôlés, la liberté d'expression est interdite et il y a une ségrégation entre les populations des camps selon l'appartenance tribale. Il y a également le problème de l'esclavagisme et une multiplicité de cas de mères célibataires. Ce sont là des pratiques inconcevables au 21ème siècle.