Jeux, tombolas, grattages et des moutons. À l'occasion de l'Aïd, le mouton est devenu le cadeau de référence de tous les jeux commerciaux de la saison. Des jeux qui effleurent parfois l'illégalité. C'est incontestable. Le mouton est la vedette de toutes les affiches publicitaires de la saison. Les concepteurs marketing n'ont pas manqué d'imagination pour présenter ce «personnage» sous toutes les dispositions possibles. Sur ces publicités, le mouton exprime ses goûts et pourquoi pas ses aspirations ! Sur une affiche, le mouton menace même d'égorger son maître s'il ne lui achète pas sa marque de frigidaire préférée… Mais le plus intéressant, c'est que le mouton figure aussi comme le cadeau de référence de toutes les tombolas commerciales organisées à l'occasion de l'Aïd. Certains commerces sont allés jusqu'à proposer aux clients un jeu de grattage qui permet, si le grattage est bon, de gagner trois moutons à la fois ! Les plus intriguantes de ces offres restent celles de certains organismes de crédits. Capitalisant la charge émotionnelle de l'évènement de l'Aïd, ces organismes proposent actuellement des crédits sur mesure sous forme de petits prêts pour financer l'achat du mouton. Ces formules de crédit sont assorties, comme le veut l'usage, par des jeux-tombola. A titre d'exemple, une société de crédit propose, pour sa formule de crédit spécial Aïd pour les fonctionnaires, la possibilité de participer à une tombola. Le cadeau à gagner est un chèque de 2.000 DH, destiné à l'achat du mouton. Mieux, une autre société opérant dans le même créneau, commercialise une offre spéciale Aïd Al Adha qui comporte aussi une tombola. Deux gagnants par jour peuvent se voir rembourser le montant de leur crédit. Si l'intention est louable, ces cadeaux en argent liquide posent cependant un problème juridique. Selon la loi, l'attribution de gain en numéraire relève du monopole exclusif de l'Etat, représenté dans ce cadre par la Marocaine des Jeux. Depuis sa création en décembre 1971, un décret concède clairement à la Marocaine des Jeux le monopole de la gestion et l'exploitation des jeux de hasard. C'est pour cette raison que, en dehors de ces cas, la plupart des jeux et autres tombolas prévoient toujours des prix en nature, jamais en liquide. À la Marocaine des Jeux, on préfère relativiser le phénomène: «Ces prix ne posent pas un grand problème. Du moment où il n'y a pas de régularité, on ferme les yeux. Surtout que ça coïncide avec l'occasion de l'Aïd.» , indique un responsable. Sans parler directement d'illégalité, on admet qu'il y a tolérance... Une tolérance qui s'explique par des considérations sociales, dans la mesure où les offres en question s'articulent autour du mouton de l'Aïd. Mais cette tolérance ne constitue pas pour autant la règle. Quelques années auparavant, le même organisme avait mené une véritable croisade dans l'ombre contre une tombola organisée par un célèbre fabricant de fromage. La tombola en question était assortie d'un prix d'un montant de 10.000 DH par jour. Et c'est bien la nature du cadeau (argent liquide) qui avait provoqué la réaction musclée des responsables de la Marocaine des Jeux qui ont estimé à l'époque que le jeu en question empiètait sur le territoire de leur monopole. Force de la loi oblige, le fabriquant en question avait fini par suspendre sa tombola ainsi que ses alléchants prix.