La scène qui signe la grande entrée de Nora Berra dans le débat sur l'identité nationale se passe en deux actes : une action et une réaction. Nora qui ? La question se posait jadis comme une évidence. Tant la secrétaire d'Etat aux Ainés, celle que Nicolas Sarkozy voyait prendre la place fort symbolique de Rachida Dati, tombée en disgrâce, pataugeait dans un obscur anonymat. Elle n'arrivait ni à s'imposer ni à se distinguer par un caractère fulgurant. Ce n'est plus le cas désormais aujourd'hui depuis que Nora Berra avait claqué la porte d'une réunion du groupe UMP à l'Assemblée nationale sur la nécessité ou non de légiférer pour interdire la burqa. La scène qui signe la grande entrée de Nora Berra dans le débat sur l'identité nationale se passe en deux actes : une action et une réaction. L'action c'est la déclaration prêtée à Pascal Clément, un ancien ministre de la Justice : «le jour où il y aura autant de minarets que de cathédrales en France, ça ne sera plus la France». La réaction, c'est Nora Berra qui se lève indignée, va au clash et quitte de manière spectaculaire cette réunion : «Qu'un ancien garde des Sceaux tienne ces propos anti-laïcs dans une enceinte symbole de la République comme l'Assemblée nationale, c'est insupportable ! C'est ça la démocratie ?» Et depuis, Nora Berra, presque reléguée au quota froid et arithmétique de la diversité, que peu de personnes étaient capables de reconnaître sur une photo ou de dire ses occupations au sein du casting gouvernemental, est en train de se fabriquer une jolie notoriété. S'était-elle livrée à un coup de publicité pour se frayer son propre chemin et se faire une petite place au soleil entre la compulsive Rama Yade et l'insubmersible Fadela Amara ? La question ne fait pas que frôler les esprits. De nombreux collègues au gouvernement de Nora Berra ont exprimé leur surprise de la voir quitter la réunion et de rompre le dialogue, là où dans le pire des cas elle aurait pu opposer une argumentation, bref discuter et débattre. La réponse de Nora Berra à ce reproche est qu'elle «voulait donner un signal fort». Il n'est pas étonnant d'y voir une forme de malice opportuniste de la part de Nora Berra. Voilà un débat sur l'identité nationale qui se télescope avec une recherche effrénée de la part des pouvoirs publics de la manière la plus efficace d'interdire le voile intégral. Elle, Nora Berra, ministre de la diversité, femme musulmane, dispose de tous les ingrédients pour être au cœur de ce maelstrom. Quoi de plus adéquat que de provoquer un clash au centre de ce débat et de s'attirer vers sa personne toutes les interrogations. D'un autre côté, il n'est pas certain qu'un couac supplémentaire qui secoue sa majorité, incarné par la prise de position marquée de Nora Berra, puisse être bénéfique pour Nicolas Sarkozy. Le président de la République est soumis à une forte pression de revoir sa copie sur l'ensemble de la stratégie proposée aux Français pour débattre de leur identité. Avec Nora Berra qui met en émoi tout le groupe UMP à l'Assemblée nationale et qui divise le gouvernement sur l'attitude à prendre pour traiter ce genre de débat, la majorité présidentielle montre des tensions et des divergences sur un sujet sensible qui, pour être rentable électoralement, a besoin de consensus et de cohérence.