Abdelaziz Nouaydi, président de l'Association Adala, estime que la réforme annoncée par le Souverain traduit une écoute de la société. Cette réforme appelle le ministère de la Justice à une démarche participative et valorise l'action de la société civile. ALM: SM le Roi Mohammed VI a défini, dans son récent discours adressé à la nation, les bases d'une nouvelle approche en matière de réforme de la Justice. Quelle analyse faites-vous de cette initiative? Abdelaziz Nouaydi : Il s'agit d'une nouvelle méthodologie de travail. Le discours royal est une vision complète de la réforme de la justice. C'est un discours qui a détaillé six chapitres et qui mentionne certaines mesures qui touchent à la réforme de la justice, notamment la réforme du Conseil supérieur de la magistrature. Le discours du Souverain mentionne également la mise en place d'une instance consultative. SM le Roi a mis la réforme de la justice en tête des priorités éventuellement pour la rentrée politique de l'année prochaine. C'est une réforme qui est à l'écoute de la société marocaine à partir du moment qu'elle mentionne l'approche participative du ministère de la Justice et apprécie l'approche de la société civile. Le Souverain a indiqué en outre que la feuille de route de la réforme se base sur une démarche participative. Qu'en pensez-vous? Tout d'abord, il y a les institutions constitutionnelles, le Parlement et le gouvernement notamment le ministère de la Justice qui joue un rôle moteur dans la réforme. Il y a ensuite les composantes de la société civile. Il est, désormais, clair que l'on veut que la société civile accompagne la réforme, notamment les dix associations qui ont mis en place le 6 avril 2009 un mémorandum de la réforme, envoyé au ministère de la Justice, au Palais royal,au Premier ministre, au CCDH, aux partis politiques et aux autres acteurs de la société civile. S'agissant du volet institutionnel, SM le Roi a annoncé la mise en place d'une instance consultative et un observatoire de la criminalité. Quel est le rôle que ces institutions seront appelées à jouer? Le discours mentionne que la méthode respecte les compétences de chaque institution. Il mentionne, par exemple, la réforme du Conseil supérieur de la magistrature, notamment ses moyens de travail mais aussi sa représentativité. Nous souhaitons que le conseil soit plus ouvert à d'autres composantes, notamment les avocats et les professeurs universitaires. Cette institution ne doit pas être corporatiste, fermée et peu transparente, car la réforme de la justice concerne toute la société. SM le Roi a traité par ailleurs dans son discours d'un chapitre se rapportant à l'efficience de la justice. Il y a aussi l'objectif de la moralisation à travers l'éradication de la corruption. Un objectif qui vient accompagner des efforts précédents qui ont abouti, par exemple, à la mise en place de l'Instance centrale pour la prévention contre la corruption, instance qui a besoin d'un appui politique et de moyens pour constituer un plus dans le dispositif institutionnel. Il faut aussi relever un chapitre concernant la formation et la qualification des ressources humaines. SM le Roi a annoncé, en outre, la mise en place d'un observatoire de la criminalité qui permettra de réformer la politique pénale. J'espère que cet observatoire rattachera la politique pénale à la politique sociale, car la criminalité est d'abord un phénomène social qui est la conséquence directe des changements qui secouent le monde et la société et qui ont aussi un rapport avec la pauvreté et l'exclusion. Quelle est la mission du ministère de la Justice dans cette vaste entreprise annoncée par le Souverain? Le ministère de la Justice va essayer de combiner les différentes recommandations tout en prêtant attention aux demandes de la société civile, aux demandes des investisseurs, aux demandes des instances internationales (l'ONU , bailleurs de fonds…) Ce département va essayer de mettre en place un projet qui tient compte de toutes ces demandes. On comprend parfaitement que la mise en œuvre du projet va s'étaler sur une période, mais il y a des urgences, notamment la résolution de certains problèmes se rapportant à l'indépendance de la magistrature, à l'accès à la justice, à l'exécution des jugements et à la lutte contre la corruption.. Quelle est la place de la société civile, notamment votre association, dans cette réforme? Nous avons, avec nos associations sœurs, joué le rôle de catalyseur. Mais notre rôle ne se limite pas là. Notre mission doit continuer en accompagnant la réforme par la mobilisation de la société civile et politique.