L'Agence de presse Reuters, citant un haut responsable gouvernemental qui a préféré garder l'anonymat, a révélé que le déficit budgétaire pour l'année 2003 s'établirait à 5,3%. Il pourrait même atteindre les 5,9%. Dans la même dépêche, l'on s'étonne que cette hausse n'ait pas suscité de réactions dans les milieux financiers. Même si la communauté d'analystes était au fait de ce revirement de situation, bien avant que cette «rumeur» ne se confirme. L'Agence d'information Reuters, citant un haut responsable gouvernemental qui a préféré garder l'anonymat, a révélé que le déficit budgétaire pour l'année 2003 dépasserait largement le taux prévisionnel. Au lieu des 3 % initialement annoncés, récemment ajusté à 3,4 % par l'équipe gouvernementale, le déficit public s'établirait à 5,3 %. Il pourrait même atteindre les 5,9 %. Ce taux, avance l'agence, ne prend pas en ligne de compte les recettes des privatisations, ni la contribution du Fonds Hassan II. Cette annonce, tout en remettant sur le tapis le débat sur l'intérêt d'un déficit accentué ou pas, renseigne par la même sur la non-maîtrise de l'équipe gouvernementale de ce taux. « Le déficit public n'est toujours pas maîtrisé. L'Etat ne dispose pas encore de ressources stables. Par conséquent, le déficit ne peut qu'être extensible », affirme un économiste de la place. La part des ressources instables, générées par les recettes des monopoles, ou encore par celles des privatisations (exceptionnelles par nature), a encore la part grande. Les ressources stables, essentiellement à base d'impôts, ne sont pas encore pérennisées. L'élargissement tant attendu de l'assiette fiscale fait face, malheureusement, aux différents lobbies. Ainsi, avocats, médecins et autres pharmaciens viennent de se voir accorder une année de grâce supplémentaire pour intégrer la sphère des impôts… Entre déficit déclaré (annoncé par le gouvernement) et déficit réel, une certaine confusion, préméditée, est toujours entretenue. L'effet annonce est ainsi privilégié. La stratégie de communication retenue par l'équipe gouvernementale intègre, sciemment, l'exceptionnel dans ses calculs. Les recettes de privatisation sont d'office ajoutées alors qu'ailleurs, l'exceptionnel, s'il n'est pas logé dans un budget à part, du moins il sert d'autres objectifs économiques nationaux. Il y va de même pour les montants destinés à l'investissement. L'argentier du Royaume se plait toujours à rappeler que le budget étatique en matière d'investissement comprend toujours les investissements des offices et autres organes de l'Etat. En face, ses détracteurs se plaisent à lui rappeler que le montant de l'investissement public est en constante chute. Pour l'année 2004, il est en baisse de 2,5 %. « D'ailleurs, de manière doctrinale, le déficit public, s'il est consenti, doit être assurément justifié », laisse entendre un président d'une fédération professionnelle. Ainsi, les Keynésiens, Habib El Malki en tête, sont partisans d'un déficit prononcé mais justifié par une vision expansionniste. S'ils peuvent tolérer une inflation plus importante ou une croissance moindre, le corollaire doit être une politique dynamique d'investissement public. Certains partis comme le PPS, par la voie de son secrétaire général My Ismail Alaoui, y sont favorables. Des projets d'envergure sont à initier. Au-delà de la proche actuelle prônée par le Premier ministre Driss Jettou, un « plan Marshall » marocain est à mettre en chantier. Ainsi, à titre d'exemple, des axes autoroutiers entre Casablanca et Laâyoune sont à considérer au lieu de l'approche actuelle des portions. « C'est ce genre de projets qui peuvent justifier, à mon sens, un déficit public, sinon, pour financer le train de vie de l'Etat, il n'en est pas question », estime un militant de la gauche. Cette approche est en train de prendre le dessus, en Europe notamment, sur l'austérité prônée par la Banque Mondiale ou la Commission Européenne. Les gouvernements laissent « filer » leurs déficits publics mais tout en le justifiant bien. Une démarche et une philosophie qui obéissent plus à des considérations de change qu'à des déficits que les Américains qualifient de théoriques. La politique économique est fortement ajustée à celle de change. Il y va de la compétitivité réelle des économies. Au Maroc, il est désormais prouvé que la politique Oualalou est largement dictée par les prérogatives de la Banque Mondiale et du FMI. L'orthodoxie budgétaire affichée n'est qu'apparente. Indépendamment des priorités nationales, l'équilibre budgétaire est dû, en grande partie, à une jonction d'éléments exceptionnels. Les générations futures, aux noms desquels cette orthodoxie est prônée, ne sont pas à l'abri de mauvaises surprises futures. Reste à comprendre l'origine de l'effort de communication affiché et dont l'objectif semble à celui de brouiller les pistes. Des chiffres, aussi clairs que transparents, gagent à être généralisés en lieu et place des actuels chiffres politisés. Mais la politique a sa raison qu'un simple raisonnement finit toujours par démasquer.