L'écrivain, sociologue et chercheur universitaire marocain Abdelkébir Khatibi est décédé lundi 16 mars tôt le matin, dans un hôpital à Rabat, à l'âge de 71 ans des suites de complications cardiaques. C'est avec grande émotion et tristesse que la nouvelle du décès de Abdelkébir Khatibi lundi 16 mars, à l'âge de 71 ans, a été annoncée. «Un homme exigeant et généreux, sensible et profond qui a marqué l'histoire littéraire, philosophique et sociale du Maroc», a indiqué à ALM l'universitaire Asssia Bel Habib qui vient tout juste de publier un ouvrage dédié à l'œuvre de Feu Khatibi . Et d'ajouter : «C'est un choc. On le savait malade, mais jusqu'au bout, on gardait l'espoir. Parce lui-même luttait avec beaucoup de courage et de sérénité. Le Maroc perd un grand poète, un homme redoutable, au sens de la nuance du terme. Un homme qui a beaucoup apporté à l'université marocaine et au Maroc et dont on avait encore besoin», a souligné le chercheur et professeur universitaire Mustapha Ben Cheikh. Abdelkébir Khatibi est de ces personnages qui ont fasciné les écrivains français parce qu'il leur révélait des chemins inexplorés de leur propre langue. Jacques Derrida écrit à son propos: «Comme beaucoup d'autres, je tiens Abdelkébir Khatibi pour un des très grands écrivains, poètes et penseurs de la langue française de notre temps [...] Ce que Khatibi fait de la langue française, ce qu'il lui donne en y imprimant sa marque, est inséparable de ce qu'il analyse de cette situation, dans ses dimensions linguistiques, certes, mais aussi culturelles, religieuses, anthropologiques, politiques». Et Roland Barthes n'en avait pas dit moins : «Ce que j'ai à interroger, à quelque niveau de l'échelle sociale que je me place, c'est un Français «culturel», façonné par les vagues successives du rationalisme, de la démocratie, des communications de masse. Ce que Khatibi interroge, c'est un homme intégralement «populaire», qui ne parle que par ses signes à lui». Abdelkébir Khatibi est né à El Jadida en 1938. Il écrit ses premiers poèmes à douze ans, en arabe, ensuite en français qui devient sa langue d'écriture. Il fait ses études supérieures à la Sorbonne entre 1958 et 1964 et obtient son doctorat en sociologie en 1965. À son retour au Maroc, il mène une intense activité : chercheur, écrivain, enseignant, intellectuel engagé dans la politique. Son œuvre constituée d'une trentaine d'ouvrages et plus de 150 articles : études, entretiens, est traduite en plusieurs langues. Feu Abdelkébir Khatibi est lauréat de plusieurs distinctions internationales notamment le prix du «Grand printemps» de l'Association française « Hommes de lettres» pour l'ensemble de ses œuvres poétiques. Il est le premier écrivain marocain et arabe à obtenir ce prix, décerné par l'Association française créée en 1838 par une pléiade de noms illustres de la littérature classique de l'Hexagone, tels Honoré de Balzac, Victor Hugo et Alexandre Dumas. «L'amour est la seule chose qu'on emporte dans l'éternité», disait Antonine Maillet. Son immense amour pour la connaissance et la vérité, l'amour de ses proches et de tous ceux, nombreux qui l'ont connu de près ou de loin, est ce qu'a emporté Abdelkébir Khatibi avec lui. Son œuvre poétique L'ensemble des oeuvres poétiques d'Abdelkébir Khatibi vient de paraître en trois tomes chez la maison française «La Différence» dans la Collection: Œuvres complètes. Le premier tome s'intitule «Romans et récits», le deuxième «Poésie de l'aimance» et le troisième «Essais».