Une réunion d'urgence des ministres des Affaires étrangères européens s'est tenue au Quai d'Orsay pour apporter une réponse politique à la brusque poussée de violence au Proche-Orient. Jusqu'aux dernières heures de la présidence française de l'Union européenne exacerbées par les attaques israéliennes contre Gaza, la France a tenu à exercer les dernières parcelles de responsabilité. En témoigne la réunion d'urgence convoquée hier au Quai d'Orsay des ministres des Affaires étrangères des pays de l'Union européenne. Ordre du jour imposé par l'actualité : tenter d'apporter une réponse politique et diplomatique à la brusque poussée de violence au Proche-Orient et l'usage disproportionné de la force par Israël contre les civils palestiniens. Dès les premières heures des bombardements, la diplomatie française avait tenté de reprendre la main en essayant de favoriser les conditions de l'arrêt immédiat des hostilités et le retour à la trêve. Les nombreux contacts téléphoniques entre le président Nicolas Sarkozy et son homologue égyptien Hosni Moubarak, entre Bernard Kouchner et Ahmed Aboul Gheit indiquent clairement que la diplomatie française conserve une grande conviction dans la capacité des Égyptiens à continuer une médiation entre les frères ennemis palestiniens d'un côté et le Hamas et Israël de l'autre, la diplomatie égyptienne qui vient de subir un énorme coup de boutoir de la part du chef du Hezbollalh libanais Hassan Nassrallah. Dans ce contexte, Bernard Kouchner continue de décrire ce que doit être la mission des Européens : «L'Europe doit se battre pour arrêter l'enchaînement de la violence et renouer avec le processus de paix. Cet épisode est tragique. Il intervient dans un contexte de vacance du pouvoir en Israël et aux Etats-Unis. (...) Les Européens ont un rôle à jouer». Bien avant la réunion de Paris qui se fixait comme objectif «l'arrêt des violences et le retour à la trêve», la France avait fait savoir sa disponibilité à accroître son aide humanitaire aux population de Gaza : «La France et l'Union européenne qui sont déjà les principaux soutiens humanitaire et économique des populations de Gaza sont prêts à amplifier leur aide pour répondre à l'urgence». Des pistes multiples se dessinaient à l'issue de la réunion de Paris comme la reprise d'une mission d'observation européenne au terminal de Rafah qui sépare la Bande de Gaza de l'Egypte, le lancement d'un appel solennel à une trêve humanitaire qui pourrait être le préambule à une trêve militaire ou l'envoi sur place d'une délégation comprenant l'actuel ministre des Affaires étrangères français Bernard Kouchner et son homologue thèque Karel Schwartzenberg dont le pays prend la présidence de l'UE à partir du premier janvier. Mais fait important à signaler, Paris réunit les ministres des Affaires étrangères de l'UE à un moment où des divergences entre ses membres sur la politique suivie à l'égard d'Israël refont surface et risquent de faire polémique. Une des porte-voix de ces critiques est l'Eurodéputée socialiste belge Véronique de Keyser qui estime que l'UE a raté l'occasion de faire pression sur Israël. Rapporteur d'un projet de résolution relatifs aux relations UE-Israël, elle estime que les Vingt-sept avaient tort de décider à la mi décembre «d'intensifier» leurs relations avec Israël, de choisir un mode de coopération renforcée alors que la ministre des Affaires étrangères israéliennes Tzipi Livni venait d'évoquer «l'option militaire» contre Gaza à Bruxelles. Et Véronique de Keyser de s'interroger sur l'occasion ratée par les Européens de faire pression sur Israël : «L'UE aurait pu au moins dire (aux Israéliens) : Comment voulez vous demander une revalorisation de votre statut politique alors même que notre aide humanitaire ne parvient pas à Gaza… c'est facile maintenant de dire : arrêtez ! arrêtez ! alors qu'au moment où on pouvait encore arrêter cette machine infernale, nous (les pays de l'UE) nous ne l'avons pas fait» et de conclure, désabusée : «Je pense que jusqu'à présent l'Europe a prouvé qu'elle ne souhaitait pas ou qu'elle ne pouvait pas arrêter les israéliens». Véronique de Keyser semble en vouloir en particulier à la France qu'elle accuse d'avoir forcé la main des autres Européens sur le grand signal adressé à Israël. Tout l'enjeu de la rencontre de Paris est de dégoupiller ses contradictions et sortir de l'impasse dans laquelle un excès de solidarité a été interprété comme un signal d'encouragement.