Nawal El Moutawakel, ministre de la Jeunesse et des Sports, explique dans cet entretien les enjeux de la lettre royale qui a marquée les Assises nationales du sport. ALM : Dans sa lettre royale aux deuxièmes Assises du sport, SM le Roi a établi un diagnostic décapant du sport national. Quelle lecture en-faites-vous ? Nawal El Moutawakel : La lettre royale est hautement significative. C'est une véritable feuille de route pour les décennies à venir car elle trace le chemin réel devant être suivi. Le sport national est unanimement décrit comme un organe qui souffre et qui continue à faire face à de nombreux problèmes qui font obstacle à la bonne gouvernance. De plus, il y a la faiblesse du financement, la mauvaise gestion et la quasi-absence de formation adaptée. En résumé, il y a des lacunes à tous les niveaux. Or, aujourd'hui, nous devons relever plusieurs défis à la fois sous la conduite éclairée de Sa Majesté le Roi. Le Maroc est un pays en perpétuel changement et les Marocains aspirent à plus de modernité, et le sport est une composante essentielle du progrès, car c'est un indicateur du développement d'un pays. L'intérêt porté au sport dans notre pays n'est plus à démontrer. Ce n'est pas un hasard si plus de 700 personnes directement liées au mouvement sportif ont assisté aux Assises nationales du sport. Pour analyser la situation du sport aujourd'hui, un comité a été mis en place depuis plus de dix mois pour établir un diagnostic clair, une stratégie et un plan d'action, plus particulièrement au vu des mauvais résultats enregistrés par les sportifs marocains depuis une dizaine d'années et à leur faible participation aux manifestations régionales, continentales ou internationales. L'étude préliminaire à la tenue des Assises nationales du sport a révélé que moins de 1% des Marocains ont une licence sportive, ce qui est relativement faible en comparaison avec les pays voisins. Toutefois, ce chiffre seul ne peut justifier nos piètres performances. Il y a d'autres problèmes auxquels nous devons faire face ensemble. J'adresse donc, un message franc et direct à tous les intervenants dans le mouvement sportif et à tous les passionnés de sport de se mobiliser pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés à court, moyen et long terme. Quels sont à votre avis les points forts et les faiblesses qui caractérisent le sport national ? Vous savez, le tableau n'est pas complètement noir. Nous continuons malgré tout à obtenir des résultats louables dans quelques disciplines. De plus, les Marocains sont des amoureux du sport et pas seulement du football ou de l'athlétisme. Pour preuve, il y a 44 fédérations sportives, constituant ainsi un réseau de 8000 ONG, clubs et associations. C'est un atout considérable, cependant, le changement est nécessaire et il est demandé par tous. A titre d'exemple, notre loi sur l'activité physique et le sport est inadaptée, il n'y a pas de textes d'application spécifiques à la lutte contre le dopage, le hooliganisme ou l'exercice du sport au niveau professionnel. Nous souffrons également de la faiblesse des financements et du manque d'infrastructures. Connaissant la situation actuelle, il nous reste maintenant à œuvrer ensemble pour y remédier. Notre objectif est double: ancrer la pratique et les valeurs sportives dans le quotidien de tous les Marocains et faire du Maroc une terre de champions. La lettre royale vient à point nommé. Elle nous conforte dans nos efforts pour le bien du sport national. Comment le secteur privé peut-il s'impliquer pour le développement du sport ? Notre département a tenu récemment une réunion de travail avec la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM). Nous avons expliqué aux représentants du secteur privé notre plan d'action auquel plusieurs entreprises ont adhéré, à condition que le sport connaisse le changement escompté et confirmé par la lettre royale. Le sport souffre d'une image négative et les entreprises privées veulent accompagner un projet qui contribuera à leur rayonnement. Selon la loi de Finances, le budget du ministère va augmenter en 2009 de 17%. Est- ce que c'est suffisant ? Depuis de longues années, il n'y a pas eu d'augmentation du budget du ministère. Nous sommes heureux que l'augmentation cette année dépasse 14%, mais ce n'est pas suffisant pour couvrir l'ensemble des projets que nous voulons entreprendre. Il est clair que sans l'apport du privé et des autres secteurs publics, le département ne peut pas réaliser ses objectifs.