Abdelilah Benkirane, secrétaire général du PJD, dans un entretien avec la chaîne Hiwar, a confié l'ampleur des dégâts produits sur l'image des islamistes marocains par l'assassinat du leader socialiste Omar Benjelloune. Trois décennies plus tard, ils ne s'en sont pas encore remis semble-t-il, mais l'explication qu'il donne de l'acte est un peu tirée par les cheveux aussi bien que tractée par l'attitude politicienne de son parti qui consiste à caresser dans le sens du poil la perspective d'une alliance avec l'USFP. Le titre d'Attajdid, six colonnes à la Une n'est pas non plus une réussite. La réduction de l'assassinat de Omar Benjelloune à une simple mort (maktal) trahit derrière les efforts de contrition une simple opération de charme. L'étreinte de l'araignée ? Va savoir, disons que le secrétaire général du PJD est dans son rôle tout neuf de leader islamiste et en cohérence avec ses positions. Depuis les législatives de 2002, il essaye de positionner son parti dans la recomposition en cours du paysage politique national. Abdelilah Benkirane est un «participationniste» et ne s'en cache pas. Pour ce bon musulman, le gouvernement vaut bien une messe et pour l'instant, il faut le reconnaître, il s'en sort pas mal. D'ailleurs il pourrait bien réussir, mais à deux conditions : ne pas trop déformer l'histoire en faisant des islamistes marocains, par des cabrioles dérisoires, des cibles et des victimes de l'assassinat du socialiste. La récupération est une technique politique connue et admise, mais trop point n'en faut ; il y a des limites. La deuxième condition échappe à la volonté du secrétaire général du PJD qui n'a d'issue que la prière pour qu'un illuminé toqué ne vienne pas contrarier ses desseins en proclamant conforme à la volonté divine le mariage d'une fillette de neuf ans. Il ne le sait peut-être pas encore, mais il n'y a pire ennemi pour Abdelilah Benkirane que Mohamed Maghraoui. Sans doute je passe du coq à l'âne, cependant imagine-t-il l'impact sur son parti si, en l'absence de la nouvelle moudawana, le chef de file du PJD, à supposer qu'il ait une fillette de neuf ans, venait à la donner en injustes noces ? Question majeure : si la loi ne l'interdisait pas, Abdelilah Benkirane, pour ne pas transiger avec la voie du Prophète, laisserait-il de vieux libidineux pratiquer la pédophilie sous prétexte qu'elle se ferait dans le cadre légal et béni du mariage? La question est insidieuse, mais le communiqué du Mouvement Unicité et Réforme en date du 23 septembre la justifie. Déplorant, ce qui est compréhensible, les suites engendrées par la «fatwa» de Maghraoui, le bureau exécutif du MUR se contente de dire son désaccord avec le point de vue du «cheikh» non parce que c'est une atteinte aux droits des enfants, à l'enfance ou aux valeurs humaines, mais seulement parce que la moudawana a tranché la question. Et la moudawana, ce que les islamistes en pensent tout le monde le sait et chacun peut imaginer ce qu'ils en feraient dans un rapport de force différent. Tout le problème avec eux est dans cette mixture constante d'ambiguïté et de funambulisme.