En fait, l'Etat ne subventionne plus le pain. Seul le blé tendre national, destiné en principe aux couches défavorisées, est concerné par cette subvention. Pour confectionner une baguette de pain ou un pain rond, vendus au public au prix de 1,10 DH, les boulangeries ont recours, directement et indirectement, à plus d'une trentaine de matières. "Aucune de ces matières n'est subventionnée par l'Etat", affirme, de prime abord, le président du Syndicat national unifié, Azaz Lahoucine. En effet, l'Etat verse à travers la caisse de compensation et de l'Office national interprofessionnel des céréales et des légumineuses (ONICL) la coquette somme de 200 milliards de centimes, au titre de subventions pour la farine nationale de blé tendre. Chaque année, le contribuable paie cette somme astronomique pour 10 millions de quintaux de farine nationale. Celle-ci est, en principe, destinée aux couches défavorisées de la population, essentiellement dans le monde rural. C'est ainsi que les minotiers qui bénéficient de cette subvention doivent vendre cette farine nationale aux marchands de gros opérant dans les zones éloignées du Royaume. Il se trouve que dans la pratique, on retrouve cette farine subventionnée dans les grandes villes. Mais cela est un autre problème. L'essentiel est que les boulangers, qui sollicitent depuis plusieurs années l'autorisation du gouvernement pour augmenter de 30 centimes le prix du pain, ne sont pas concernés par la subvention. Le pain vendu par ces boulangers pèse 200 grammes et est confectionné à base de farine de luxe. Les boulangers l'achètent au prix du marché, au même titre que les autres ingrédients. Selon le président Azaz Lahoucine, "une étude du ministère des Affaires économiques, du temps où Ahmed Lahlimi en détenait les rênes, a montré que le pain de 200 grammes revient à 1,23 DH". Or, cette baguette et son pain rond sont vendus à 1,10 DH. D'où l'urgence d'un réajustement du prix. D'ailleurs, on trouve actuellement sur le marché des pains qui peuvent coûter jusqu'à 10 DH. Certains sont confectionnés à base de maïs, d'autres à base d'orge ou de soja. Mais dès qu'il s'agit de pain à base de blé de luxe, le prix est fixé par le gouvernement. En fait, Azaz assure que les autorités publiques, notamment la Primature et le ministère des Affaires économiques, se sont dits conscientes du bien-fondé des revendications des boulangers. Mais il se trouve que depuis quelques mois, exactement après le mois de Ramadan, ces mêmes autorités ont observé un silence radio inquiétant, pour ne pas dire irritant. C'est ce qui explique la décision d'organiser une grève, hier et aujourd'hui. "Ce débrayage est un droit que nous comptons utiliser malgré toutes les menaces", assure Azaz. Et d'ajouter que "le délégué syndical de Rabat a reçu des menaces de la part des autorités locales pour arrêter la grève et fort heureusement il n'a pas cédé". Pour ce qui est de la réussite de cette grève, Azaz assure que le taux de suivi a varié entre 60 et 100%.