Inde-Pakistan. Si elle retient l'attention des observateurs du monde entier, la crise est vue par Washington en fonction de ses intérêts dans le sous-continent indien. Donald Rumsfeld, le secrétaire américain à la Défense, est formel à ce sujet en soulignant dernièrement que Washington avait « clairement et soigneusement signalé aux deux parties l'importance que revêt cette affaire pour nos intérêts ». En somme, libre aux Indiens et aux Pakistanais de se battre, tant que cela ne change rien à la donne dictée par les Etats-Unis. Et cette donne semble actuellement plutôt peser en faveur de New Delhi. Des diplomates en poste à Islamabad estiment que les Etats-unis et la Grande-Bretagne « semblent relayer le message indien pour extraire davantage de concessions d'Islamabad» en liaison avec les groupes de la mouvance islamiste radicale, encore actifs au Pakistan. Des analystes pakistanais notent, toutefois, que la « collusion indo-américaine » est « dangereuse » parce que le gouvernement pakistanais « ne peut se permettre de perdre la face », en particulier à propos du Cachemire, territoire de l'Himalaya à majorité musulmane, dont les deux-tiers sont contrôlés par l'inde et qui est revendiqué dans sa totalité depuis un demi-siècle par Islamabad. Cette pression croissante complique la tâche du général-président Pervez Musharraf, dont le gouvernement a longtemps été un parrain des Taliban, avant un retournement spectaculaire en faveur de la coalition « anti-terroriste », au prix d'une flambée de violences dans la rue pakistanaise. Selon des diplomates occidentaux, trop de pression sur Islamabad pourrait retarder, au lieu d'accélérer, les mesures requises contre certains groupes islamistes. New Delhi, qui accuse Islamabad d'être derrière l'attaque-suicide de militants islamistes présumés contre son Parlement le 13 décembre, a annoncé une série de sanctions diplomatiques contre son voisin et n'exclut pas des représailles militaires contre des « camps terroristes » dans la partie pakistanaise du Cachemire. Des mouvements de troupes ont été signalés de part et d'autre de la frontière, et les deux puissances nucléaires ont multiplié ces derniers temps menaces et avertissements. Islamabad a démenti toute implication dans l'attentat contre le parlement de new delhi, qui a fait quatorze morts, dont les cinq assaillants, et a annoncé des mesures contre deux groupes -Lashkar-e-Taïba et Jaish-e-Mohammed - accusés par l'Inde d'avoir mené l'opération et placés depuis sur la liste américaine des organisations terroristes. Le Pakistan affirme que les comptes bancaires des deux groupes ont été gelés et le chef du Jaish-e-Mohammed, Maulana Masood Azhar, a été arrêté. Des mesures qualifiées de «superficielles » par New Delhi. Le pire est encore à craindre.