Radi et Oualalou trouveront peut-être ou pas un accord, El Malki fait toujours cavalier seul et Lachgar se considère comme le seul vainqueur du congrès. Depuis l'échec de son congrès, l'USFP n'a pas bougé d'un iota. Bien au contraire, aux dissensions au sein du BP s'ajoutent les manœuvres de la présidence du congrès et la révolte du groupe parlementaire qui, ô surprise, est une institution qui fonctionne normalement. Comme toujours, cette situation, qui achève de démoraliser les bases au point que le parti n'a plus de vie, est mise sur le compte des rivalités entre les pseudo-cadors. Pseudos, car aucun d'entre-eux n'a le charisme de la situation. Radi et Oualalou trouveront peut-être ou pas un accord, El Malki fait toujours cavalier seul et Lachgar se considère comme le seul vainqueur du congrès. Ces péripéties n'auront une importance que si elles enterrent l'USFP, issue possible bien que dramatique pour le Maroc. Le 8ème congrès n'a pas échoué pour des questions de liste. Son échec était programmé parce que la direction a apporté des réponses organisationnelles à des questions hautement politiques. Les congressistes, bien que choisis à travers un S.A.S des plus sévères, sont imprégrès de leur milieu. Ils se posent la question unique : Qui sommes-nous?, ils déclinent ensuite, que faisons-nous au sein de ce gouvernement ? Quel est notre projet? A ces 3 questions, aucun document préparé en vue du congrès ne répond. La direction est dès lors en porte-à-faux. L'appareil fissuré par ses luttes internes a perdu le contrôle de ce qui reste du parti et n'est plus cette machine redoutable. La normalisation du parti est à bout de souffle. Presque par réaction de suivie, instinctivement, le vieux fond Tihadi refait surface. Il n'a pas trouvé son porte-parole. Or, que dit cette lame de fond ? D'abord, qu'il faut faire le bilan de ces dix dernières années. Les concessions vécues parfois comme des reniements ont eu des résultats forts mitigés. Les Tihadis, dans leur majorité, veulent un renforcement des institutions issues de la volonté populaire, y compris et surtout l'exécutif. Ils veulent surtout que leur parti retrouve son identité. Qu'il soit à la tête du combat pour l'extension de la démocratie pour une redistribution plus juste par le biais de la politique économique et non pas du caritatif, que l'USFP redevienne le porte-étendard des forces populaires. Dès lors, ils n'acceptent pas un rôle de comparse dans une alliance hétéroclite, façonnée par des forces occultes. C'est tout et c'est énorme. Cela porte un nom : la refondation. Cette exigence n'ayant trouvé ni son théoricien ni son mentor, elle se transforme en sentiment diffus, en clameur qui peut faire capoter un congrès, mais pas régénérer un parti. Cette situation est aggravée par deux expressions externes : le MTD et le PJD. A tort ou à raison, le MTD est vécu comme une agression contre la gauche, une alternative makhzénienne aux accords ayant abouti à l'alternance. La pression du PJD prend alors une forme hallucinante : une proposition d'alliances. Le sentiment qui prévaut à l'USFP, en l'absence d'un débat sur l'identité du parti, favorise cette dérive. En fait, les militants y voient une réponse au Makhzen et la possibilité du retour à une opposition populaire. Driss Lachgar, en bête politique intuitive l'a compris. L'alliance avec le PJD, il y pensait depuis longtemps, le timing choisi pour l'exprimer publiquement n'est pas innocent. Sclérosée par ses liens incestueux avec le Makhzen, incapable de retrouver la capacité d'imaginer un projet autonome, une ligne politique prônant des alliances conformes au projet, la direction, dans son ensemble, ne peut plus être que le fossoyeur du parti. Pour sauver l'USFP, il faut un nouveau mouvement semblable à celui du 30 juillet 1972 qui a abouti au congrès extraordinaire. La sève existe, elle a besoin d'une direction politique, décidée, combative. Sinon la normalisation du parti, sa domestication aura abouti à sa dislocation et la gauche sera à réinventer. Les accords d'apparatchiks sont impuissants face à cette crise.